Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction le Tchad et le Mali, deux pays où la France est de moins en moins la bienvenue.
Mais cette présence française, voire la position de la France au Tchad, est de plus en plus critiquée dans le pays. Beaucoup d'habitants de N'Djamena dénoncent des ingérences trop nombreuses et trop de paternalisme. Un sentiment antifrançais émerge très fortement depuis la mort du président Idriss Déby en avril et la mise en place d'un pouvoir militaire dirigé par son fils. La France est accusée d'avoir soutenu la prise de pouvoir par la junte militaire. Un soutien illustré, selon ces habitants, par la présence d'Emmanuel Macron aux obsèques du président Déby aux côtés du nouveau chef de la junte. Depuis, des drapeaux français sont brûlés à chaque manifestation contre la junte militaire.
La lutte contre le terrorisme est au cœur des relations entre le Tchad et la France, c'est même le socle de leurs relations, expliquait récemment l'un des opposants historiques du pays Saleh Kebzabo. Les accords de coopération militaire ont d'ailleurs été renforcés en octobre 2019 avec la signature de nouvelles conventions. Mais cette coopération militaire peut aller trop loin, selon l'opposant. Par exemple en 2019 lorsque la France a procédé à des frappes aériennes dans le nord du Tchad pour repousser une colonne rebelle faisant route sur N'Djamena. L'ingérence de trop pour beaucoup. Les autorités en place à N'Djamena soulignent que la France et le Tchad font front commun dans la lutte contre le terrorisme mais rappellent aussi que le Tchad est un pays souverain.
Au Mali, les relations diplomatiques avec Paris au plus basRien ne va plus entre Paris et Bamako depuis l'annonce par Emmanuel Macron en juin 2021 de la fin de l'opération Barkhane. Les autorités maliennes accusent la France "d'abandon en plein vol" dans la lutte antiterroriste. "Sans la France au Sahel, il n'y aurait plus de gouvernement au Mali", a répondu Emmanuel Macron mardi 5 octobre. Des mots durs qui n’ont toujours pas été commentés par les autorités maliennes, mais qui en disent long sur les rapports entre les deux pays.
Pour une frange de la population de Bamako, la rupture entre la France, l’ex-pays colonisateur, et le Mali est largement consommée. Régulièrement, des manifestations se tiennent dans les rues de la capitale malienne pour protester contre la présence française dans le pays. Mais au Mali, on ne parle pas de sentiment antipolitique francaise, plutôt de sentiments antifrançais. Depuis 2013 et le début de l’opération Serval devenue Barkhane, les relations entre la France et le Mali sont dominées par l’aspect militaire et pour beaucoup, sans grand résultat.
À Gao ou Tombouctou, deux grandes villes du nord du pays, la perception est tout autre : les populations ne sont pas favorables à un départ des troupes françaises. Dans les localités reculées, les services rendus par la force française et l’effort de guerre se font sentir. Les armées françaises et sahéliennes coordonnent certaines opérations. Mais tout comme dans le sud du pays, c’est le ton et ce qui est considéré comme des injonctions des autorités françaises qui sont décriés.
En janvier 2020, les pays du G5-Sahel étaient conviés au sommet de Pau. Une invitation perçue comme une convocation des chefs d’États africains à qui il était demandé de se positionner contre les opinions locales, très critiques de la présence française. Du coté de la société civile, on reproche au gouvernement français de perpétuer les mauvais réflexes de la Françafrique. La prise de pouvoir du fils d’Idriss Déby au Tchad a reçu des condamnations de principe alors que le coup d’État au Mali a été fortement rabroué. Un "deux poids, deux mesures" qui passe mal auprès d’une jeunesse qui réclame des rapports d’égalité entre les États