PolitiqueDr Choguel Maîga, premier ministre : « Le Mali appartient aux maliens, pas à la France. Et, c’est à eux seuls de décider ce que sera l’avenir de leur pays ! »
Peu importe la cabale médiatique lancée contre lui par ses détracteurs pour le mettre dos à dos avec le président de la Transition. Après son intervention fort applaudie à la 76e session de l’Assemblée générale de l’ONU, à New-York, le Premier ministre malien a attiré la sympathie du monde entier sur notre pays. Pour la première fois, un chef de gouvernement africain a exprimé, avec les mots justes, les préoccupations de son peuple. Sans insulter, ni injurier. Même en France, le discours du chef du gouvernement malien a fait mouche. A telle enseigne que, les ministres français des Affaires Etrangères et des Armées ont été entendus, l’un par l’assemblée nationale, l’autre par le Senat.
Dans cette interview qu’il nous accordée, le week-end dernier, Dr Choguel Maïga revient sur ce fameux discours, qui a failli faire perdre à « Jean-Yves Le Driand » ses dernières mèches de cheveux qui lui restent sur le crâne. Entretien. Sans concession.
Comment vous est venu, Mr le Premier ministre, l’idée de ce discours qui a fait mouche à cette 76e session de l’Assemblée générale de l’ONU ?
Je l’ai élaboré, de concert avec le président de la Transition. Nombre de Maliens pensent que je l’ai fait tout seul. C’est faux ! Le président de la Transition et moi l’avons élaboré ensemble. Nous avons estimé que, pour une fois, ce discours doit refléter la vérité, la réalité du terrain. En somme, les préoccupations de notre peuple. Qui n’a que trop souffert de cette crise, qui n’a que trop duré.
Aviez-vous prévu une telle réaction de la France ?
Bien sûr ! Nous savons que l’ex-pays colonisateur n’aime certaines vérités soient connues du monde. Et pour le président de la Transition et moi-même, il n’y a pas un lieu mieux indiqué que la tribune de l’ONU pour dire ces vérités. La suite, vous la connaissez.
Plusieurs pays africains et européens vous ont témoigné leur soutien et leurs encouragements après avoir écouté ou lu votre discours.
Bien sûr ! Parmi ces pays africains, on peut citer le Sénégal, dont le président nous a manifesté son soutien ; mais aussi, la jeunesse centrafricaine, qui nous a adressé une lettre de félicitation.
En France, la ministre française des Armées avait été convoquée par le Senat qui voulait l’entendre sur la réalité de la présence militaire française au Mali.
C’est vrai, parce que leur gouvernement leur a toujours menti sur la réalité de ce qui se passe sur le terrain. A mon avis, le peuple français ne croit plus au discours de ses élites. Un mauvais présage pour Macron, à quelques petits mois de la présidentielle française.
Le gouvernement français a été, tellement, choqué par vos propos qu’il a basculé dans l’insulte. Alors, vous n’avez, ni insulté, ni versé dans un langage ordurier.
Le monde entier a condamné la France pour avoir insulté le gouvernement malien, pour avoir insulté le peuple malien. Mais, vous savez, quand on n’a pas d’argument, la seule arme qui vous reste, c’est l’insulte. Chez nous, au Mali, on n’insulte pas, quand on est bien éduqué.
L’arrivée des quatre hélicoptères, des armes et des munitions de la Russie, dans la nuit du 30 au 1er octobre, a cloué le bec à la France et à ses alliés. Qu’en pensez-vous ?
Jusque –là, la France ne nous prenait pas au sérieux. Mais depuis que ce matériel est arrivé, elle s’est rendue compte que cette affaire avec la Russie et Wagner, c’est du sérieux.
Florence Parly a dit à Bamako, que l’armée française ne quittera pas le Mali. Qu’en dites-vous ?
Le Mali n’appartient pas à la France ; mais aux Maliens. Et, c’est à eux seuls de décider de ce que sera leur pays. Pas à la France, dont les intentions sont, désormais, connues du monde entier.
Cette crise, entre le Mali et la France, a révélé, aussi, que la France n’a plus d’influence en Afrique, encore moins, en Afrique francophone où elle est montrée du doigt.
Je crois plutôt que la françafrique est en train de mourir de sa belle mort. Et le Mali et les Maliens peuvent être fiers d’avoir anticipé la fin de cette recolonisation de notre continent de la France.
Que répondez-vous à ceux qui tentent, sans succès pour l’instant, de vous mettre en conflit avec le président de la Transition ?
Ce sont des gens qui sont en mission commandée. Instrumentalisés par la France, ils sont en train de rendre un mauvais service à notre pays. Ils doivent se le dire une fois pour toute : le président de la Transition et moi-même, nous nous concertons sur tout. Je ne prends jamais une décision, sans recueillir son avis. Alors, ils perdent leur temps.
A quand l’arrivée du Groupe Wagner dans notre pays ?
Soyez patients, elle ne saurait tarder. Je ne peux vous donner une date précise, mais croyez-moi, son arrivée ne saurait tarder.
Et si vous avez un message à l’intention du président de la Transition, ce sera lequel ?
Ce ne sera pas facile, mais nous réussirons notre pari, celui de refonder notre pays.