L’organisation du 28ème sommet Afrique-France sans les Chefs d’Etat est une autre politique menée par la France pour toujours avoir la main mise sur les pays africains, surtout francophone. Après son échec qui consistait à pousser certains Chefs d’Etat à tripatouiller leur Constitution pour un troisième mandat, la France vient de changer le fusil d’épaules. Maintenant, à travers ce sommet de Montpellier, la France veut détecter les jeunes talents africains dès maintenant pour les mettre sous la tutelle.
Le 28e Sommet Afrique-France s’est donc tenu, ce 8 octobre, à Montpellier, en l’absence des chefs d’Etat africains, mais avec le président Macron, qui avait convié plus de 2 500 Africains ou Franco-Africains. Devant le président français Emmanuel Macron, onze (11) jeunes (talents) africains ont pris la parole pour s’adresser au président français au nom de l’Afrique. Un président français bousculé par certains des onze participants choisis pour lui donner le change, dans une séance de questions-réponses.
L’on aurait tort de faire comme s’ils étaient allés à un congrès de parti ou à un meeting politique. La plupart voulaient croire qu’ils peuvent faire enfin confiance à une France dont certains d’entre eux se méfiaient héréditairement. Ce serait une erreur de les prendre pour une foule que l’on aurait retournée. D’autant que, comme beaucoup parmi eux l’ont répété, leurs proches vivent cette excursion comme une trahison. La suite doit absolument leur donner raison d’y avoir cru. Sinon, d’autres incompréhensions suivront, et les anciennes grandiront.
Pour le reste, ce sommet, qui a porté toutes sortes de dénominations à travers le temps : ” Sommet franco-africain “, Conférence au Sommet des chefs d’Etat de France et d’Afrique… est pratiquement une marque déposée, une appellation contrôlée. Soustrayez-en les chefs d’Etat africains, et cela devient autre chose, ne serait-ce qu’en raison de ce que l’on appelle, en droit, le parallélisme des formes.
Sur un tout autre sujet, Emmanuel Macron lui-même a répondu qu’il devait bien traiter avec ceux qui étaient aux commandes des Etats africains. Parce que ses interlocuteurs de Montpellier ne lui seraient d’aucun secours s’il devait obtenir une autorisation de survol quelque part pour les avions de l’armée française. Qu’ils tiennent les Etats par la grâce d’un coup d’Etat ou au nom d’un troisième mandat, ils comptent, même si on ne les prend pas comme partenaires. Et puis, dans la mesure où certains, comme l’a reconnu le président Macron, sont parfaitement honorables, on ne peut laisser leur place à table à la société civile, sans risquer d’autres psychodrames.
La Malienne Adam Dicko qui lui opposait fermement ses arguments, lors du sommet Afrique-France de Montpellier, ce 8 octobre 2021, le chef de l’Etat français a fait observer qu’Elisabeth Moreno, sa Ministre, l’affrontait de manière identique, lors d’une rencontre avec la diaspora africaine en juillet 2019, en présence du président Nana Akuffo-Addo du Ghana. Si l’on veut sincèrement que l’Afrique finisse par s’en sortir un jour, ne faudrait-il pas lui laisser un peu de ses talents ?
Le délégué du Sénégal a appelé le président français à ”demander pardon au continent africain” pour les crimes de la colonisation. Emmanuel Macron, qui apprécie visiblement l’exercice, répond à chacune des interventions. ”Je ne crois pas à une politique de pardon mais de reconnaissance, rétorque-t-il. Mais à une politique qui doit mettre en place un processus de mémoire et d’histoire commune”.
Quant au représentant guinée, il a interpelé le président Macron sur les ambiguïtés de Paris vis-à-vis des troisièmes mandats présidentiels. ” Vous devez refuser de collaborer et de considérer comme des interlocuteurs, des partenaires, des responsables politiques qui utilisent des ” tripatouillages constitutionnels pour rester au pouvoir”, a conclu le jeune Guinéen.
Sur la Guinée Conakry, Emmanuel Macron a répondu -sans jamais pour autant prononcer le nom d’Alpha Condé- qu’il a toujours condamné le tripatouillage constitutionnel avant, pendant et après la présidentielle d’il y a un an.
Un exemple, l’intervention du Burkinabé qui a comparé la relation entre la France et l’Afrique à une ”marmite sale” et qui a demandé au président de la République de la récurer, sinon elle ne mangerait pas dedans.
Une manière de tester la détermination d’Emmanuel Macron à changer les bases de la relation avec l’Afrique. Le président de la République n’a pas esquivé en disant qu’il fallait ”laver la marmite, mais qu’il y aurait forcément des traces”, autrement dit, on ne peut pas effacer l’Histoire.
Il y a eu aussi des débats sur le vocabulaire. Le mot ”aide” a été contesté, Emmanuel Macron s’est engagé à parler désormais d’investissement solidaire. Certaines choses étaient de l’ordre du symbolique, d’autres très concrètes. Le président français a annoncé durant ces échanges la création d’un fonds d’innovation pour la démocratie. Objectif visé est de soutenir les acteurs du changement, notamment sur les questions de gouvernance et de démocratie.
UNE CAMPAGNE ÉLECTORALE VERS LA DIASPORA AFRICAINE ?
Un bilan et un projet. Tous les ingrédients d’une campagne électorale étaient réunis au cours de ce 28ème sommet Afrique-France. A Montpellier Emmanuel Macron a d’abord voulu montrer qu’il tenait les engagements pris lors de son discours de Ouagadougou au début du quinquennat et notamment celui de donner à la société civile une attention plus importante. Mais il s’est aussi projeté dans les années à venir au cours desquelles il espère poser les bases d’une nouvelle relation avec l’Afrique en faisant miroiter des promesses qui ne tiendront que s’il est toujours président.
Même si Emmanuel Macron n’est pas officiellement candidat à sa réélection, il était bel et bien en mode conquête sur la forme en se mettant en scène dans un échange sans tabou et sur le fond. Il a défendu une vision des relations franco-africaines et continué à creuser le sillon d’un président qui regarde l’histoire en face, qui reconnait certaines responsabilités de la France mais en même temps veut tourner la page des souvenirs historiques douloureux. Une manière aussi d’essayer de séduire, de convaincre la diaspora, ces 7 millions de Français d’origine africaine qu’il veut placer au cœur de son action. Un électorat potentiel parfois stigmatisé dans le débat national sur l’immigration.
Au regard des objectifs que poursuivait le président français Emmanuel Macron, il doit sans doute être satisfait. Car, il s’agissait pour lui et son gouvernement d’aller à la conquête des jeunes talents africains. Une autre politique française pour avoir la main mise sur les pays africains surtout francophones. A l’approche des élections présidentielles françaises.
Après la fin des travaux, certains participants qui étaient intervenus, durant la plénière disaient n’avoir pas reçu de réponses satisfaisantes à leurs questions, et se demandaient si le flou n’était pas délibéré.
L’un d’eux s’est allé très loin dans ses réflexions en mettant en doute sur la sincérité de tout cet exercice. Puis, il a conclu qu’il espérait n’avoir pas été instrumentalisé. S’il y a une crainte que les organisateurs ne doivent pas minimiser, c’est que des jeunes gens rentrés chez eux avec un tel doute, et que leurs dirigeants, parents et amis, qui leur avaient dit de se méfier, les accueillent avec un : ” on t’avait prévenu que tu te ferais avoir !”