Organisé par l’État français et sur le territoire français, le 28e Sommet Afrique-France sans chefs d’États africains aura été largement commenté par les internautes au Mali et ailleurs. Au-delà des attaques personnelles, des perspectives de réflexion intéressantes.
S’il y a un événement marquant ces derniers jours, notamment sur la toile malienne et africaine, c’est bien le Sommet Afrique-France. Au Mali, les internautes ont eu droit à un avant-sommet avec la publication des photos prises avec le président français et d’autres personnalités. Certains de nos concitoyens se sont du coup trouvés à tenir des procès ou s’ériger en éternels défenseurs. Dans cette opposition se trouve poser la question de représentativité de la jeunesse, mais aussi celle d’appréciation approfondie ou réfléchie.
Des réponses apportées
Ce n’était pas peut-être le moment idéal pour poster ces photos. Surtout dans le contexte actuel des tensions verbalo-diplomatiques entre les autorités maliennes de la transition et les autorités françaises. Un contexte, où à la moindre des choses, même pour une réflexion personnelle ou objective portant sur les rapports entre Paris et Bamako, relayée sur les réseaux sociaux, on risque d’être traité « d’apatride » par des groupes d’internautes, qui pourraient passer 12 mois sans même ouvrir un dico. C’est là un constat de ce qu’est devenue la toile malienne : il y a des gens très suivis, il faut le reconnaître, qui pensent être les mieux placés pour savoir qui est patriote et qui ne l’est pas.
La question de la représentativité est toujours problématique quand on parle des jeunes au Mali. Même le Conseil national de la jeunesse (CNJ) qui, en principe et officiellement, doit représenter les jeunes, ne fait plus assez l’unanimité. Mais peu importe qui est invité et qui a accepté, pour une raison ou une autre, de s’exprimer au nom des jeunes, c’est l’un de [nos] derniers soucis.
Perspectives de réflexion
S’agissant du Sommet en tant que tel, nombre d’observateurs sont unanimes que le président Macron s’est inspiré du modèle américain, surtout Yali. Un autre point unanime est que la France est dans une perspective de redorer son image sur le continent africain. D’aucuns sont allés jusqu’à soutenir que si les chefs d’État africains sont écartés de cette rencontre de Montpellier, ce serait pour « préparer la relève » des nouveaux Ambassadeurs de la politique étrangère française sur le continent africain. Ont-ils raison ou tort ? Non, ce n’est pas la question qu’il faudrait poser. La bonne serait de se demander : à quand parviendrons-nous à respecter les choix des uns et des autres d’avoir accepté l’invitation des organisateurs de ce Sommet ? Ou, pour reprendre Dr Gilles Yabi : « Allons-nous construire une Afrique forte, digne, respectée en nous écharpant les uns les autres ? ».
De toutes les façons, l’initiative est à saluer. À saluer parce qu’elle a donné lieu à des perspectives de réflexion beaucoup plus sérieuses au-delà des attaques personnelles. On note que les dirigeants africains sont interpellés à organiser des « scénarios » de « dialogue franc et sincère » avec leur jeunesse et sur le sol africain. Pour discuter avec eux de l’avenir de leurs pays et du continent africain dans le concert de la mondialisation et des relations géopolitiques. Parce qu’il faut se le dire, sans tomber dans une forme de dénigrement : rien de nouveau n’a été et n’aurait pu être exposé et débattu par les jeunes africains invités à Montpellier pour la table ronde très médiatisée et très commentée. Toutes les préoccupations soulevées, avec plus d’émotion souvent que de raison, ont déjà été traitées dans les livres, les médias, les colloques… Mais, c’est toujours un plus d’avoir contribué à relancer le débat.
S’il y a de plus valu dans ce Sommet, ce serait deux points sur lesquels on se focalise peu. Il s’agit des jeunes entrepreneurs africains et de la diaspora qui y ont pris part. Et qui, on l’espère bien comme beaucoup d’observateurs, sauront ou ont su y tirer profit en termes de partenariat. Le second point, c’est bien l’excellent travail du philosophe Achille Mbembé et son comité scientifique. À suivre le débat, ou, disons la table ronde des jeunes avec Macron, on pourra même penser que tout a été préparé sur la base de ce document de 142 pages au titre interpellatif « Les nouvelles relations Afrique-France : relever ensemble les défis de demain ».