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Litige foncier à Lassa, Commune IV : la mairie accusée de prédation foncière !
Publié le mercredi 27 octobre 2021  |  zireinfo
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Après avoir utilisé le Commissariat du 5e Arrondissement qui a placé en garde à vue sept personnes du quartier Lassa pendant cinq jours (du 8 au 12 octobre 2021) sur la base d’une plainte qui serait ‘’téléguidée’’ par le commissaire lui-même pour des raisons que l’on ignore, le maire de la Commune IV, Adama Bérété, a refusé d’aller au tribunal de Grande Instance de la Commune IV le 12 octobre 2021, lors de la présentation desdites personnes du juge. Pire, la mairie continue d’incommoder les populations, en envoyant fréquemment des agents municipaux pour inspecter les lieux.

Pour rappel, ce litige foncier concerne, selon nos interlocuteurs à Lassa, un espace situé entre Baconi, Sanakoro et Diakoni et qui appartient aux trois familles fondatrices de Lassa (Camara, Konaté et Cissé) connues sous le nom de ‘’Gwada-Saba’’. Au départ, l’affaire opposait Koloba Coulibaly aux trois familles fondatrices. Pour tirer les choses au clair, Koloba Coulibaly, cultivateur domicilié à Lassa, a assigné en justice les trois familles aux fin de confirmation de droits fonciers du même espace en sa faveur.

Malheureusement, le 20 septembre 2021, le Tribunal de Grande Instance de la Commune IV tranche en sa défaveur. «Attendu que pour obtenir la confirmation de droits fonciers coutumiers contre Bakary Camara, Souleymane Konaté et Mamadou Cissé, le sieur Koloba Coulibaly a saisi le tribunal en son propre nom ; que cependant, dans l’assignation il parle d’un bien commun, terre coutumière appartenant au quartier de Lassa-Fouga ; qu’il échet de déclarer sa demande irrecevable conformément à l’article 118 du code de procédure civile, commerciale et sociale », a précisé le tribunal.

Par ces motifs, ajoute le greffier en chef du Tribune, Me Diarra Cissé Doucouré, vidant le délibéré ; statuant publiquement contradictoirement, en matière civile coutumière et en premier ressort ; déclare l’assignation irrecevable ; met les dépens à la charge des demandeurs.

La mairie dans le mensonge !

Après avoir perdu le procès, Koloba Coulibaly se tourne vers la mairie et lui adresse une lettre d’affectation de l’espace. Dans un document signé le 07 Avril 2021 par Koloba Coulibaly lui-même et dont la mairie a mis une copie à notre disposition, on peut lire: «J’ai l’honneur de venir par la présente solliciter auprès de votre haute bienveillance, au nom de la population de Lassa, une demande d’affectation de terrain sis a Lassa en commune IV du District de Bamako. En effet, le terrain sollicité appelé couramment « Lassa Fouga » est un espace d’une superficie de 89 ha 80a 84ca, c’est un lieu de pâturage villageois qui fait l’objet aujourd’hui de convoitise de toute sorte de la part des spéculateurs fonciers donnant ainsi lieu à des conflits violents entre les habitants. Dans le souci de répondre aux besoins exprimés par la population relatifs à l’agrandissement du quartier, aux besoins d’infrastructures modernes et une forte demande de lot à usage d’habitation des habitants. Aussi, la population de lassa, fatiguée de la surveillance du site et de conflit permanent, demande pour toutes ces considérations l’affectation dudit site au quartier de lassa. »

C’est après cela que la mairie a adressé une demande de réhabilitation de l’espace au gouverneur du district de Bamako le 06 Juillet 2021. «J’ai l’honneur de venir par la présente solliciter auprès de votre haute bienveillance la réhabilitation de ‘’lassa Fouga’’ d’une superficie de 89 hectares 80a 84 ca sis à Lassa en Commune IV du District de Bamako au nom de la mairie de la commune IV du District de Bamako », peut-on dans ledit document signé par le maire, Adama Bérété, lui-même.

Selon la mairie, ce dossier a été transmis au ministre de l’Administration territoriale dans le cadre du respect de procédures administratives. « Les dossiers sont en cours », nous a confié le chargé de la communication de la mairie, Amadou Aya.

Auparavant, le directeur national du Cadastre avait envoyé une lettre au ministre des Domaines et des Affaires foncières d’alors, Badara Alioune Berthé, à la date du 28 avril 2020 dont les familles fondatrices de Lassa ont reçu une copie. Dans ce document, l’on peut lire: « En réponse à la fiche de circulation de courrier à l’arrivée dont les références et l’objet sont ci-dessus indiqués, j’ai l’honneur de vous informer qu’après investigation au niveau de nos archives, il ressort que la direction nationale du Cadastre ne dispose pas d’information sur la dénonciation faite par les familles fondatrices de Lassa ‘’Gwada-Saba de Banconi’’. De l’analyse du dossier, il résulte l’existence d’un contentieux entre les parties. Aussi, il est à signaler que l’Etat n’a affecté, ni cédé une quelconque parcelle dans cette zone pour le compte de la mairie de la Commune IV du District de Bamako. Il serait loisible d’attendre que la procédure judiciaire soit bouclée pour une meilleure application de la décision résiduelle.»

Selon nos sources, en vraie prédatrice foncière, la mairie fait croire aux populations de Lassa que l’espace lui a été cédé par l’Etat à travers le ministère des Domaines et des Affaires foncières. Un mensonge qui n’a pas tardé à être découvert grâce à la bonne volonté de la direction nationale du Cadastre qui a fourni les informations nécessaires au ministre des Domaines et des Affaires foncières d’alors, Badara Alioune Berthé.

Abus de pouvoir ?

La même source souligne que malgré ces différentes décisions, la mairie de la Commune IV du District de Bamako avec Adama Bérété à sa tête continue d’importuner les habitants du quartier, tout en foulant au pied une décision de justice qui présente les familles fondatrices comme les seules propriétaires de l’espace concerné.

Soungalo Konaté, l’une des sept personnes qui avaient été placées en garde à vue pendant cinq jours, témoigne : « Aujourd’hui, aucune des trois familles fondatrices de Lassa ne mène des réalisations sur l’espace concerné. Mais, les agents de la mairie continuent d’aller ramasser les matériels des gens déjà installés à Kaderbougou et qui sont en train de construire sur des terres appartenant à Lassa. Il faut le dire, ces gens sont aussi illégalement installés par des géomètres de la Commune III qui ont spéculé et morcelé une partie de nos terres sans notre accord.»

Selon lui, la mairie est en train de mentir au nom du quartier de Lassa pour pouvoir s’accaparer de l’espace. «Tout le temps, on voit passer les agents de la mairie pour aller inspecter un espace où la mairie n’a absolument rien. Mais nous ne disons rien, nous informons juste notre huissier de justice. Nous ne partons jamais les voir et souvent on ne sait même pas ce qu’ils y font. C’est après leur retour que les enfants viennent nous dire qu’ils ont ramassé les matériels des gens de Kaderbougou qui sont, comme je l’ai dit, illégalement installés sur nos terres par des géomètres de la Commune III. Malgré tout cela, la mairie est allée porter plainte contre nous pour démolition de ses installations, alors qu’elle n’a même pas une parcelle sur l’espace concerné. Vous voyons le comportement de la mairie qui est censé être au service de toutes les populations de sa commune », nous a-t-il confié.

Selon Soungalo Konaté, la mairie a eu à engager des négociations auprès des familles fondatrices pour avoir un terrain d’entente ou un accord afin de procéder ensemble au morcèlement de l’espace et ces dernières lui avaient demandé de faire une proposition. « Au moment où cette proposition était attendue par les familles fondatrices, la mairie est allée s’allier avec l’autre camp et ils ont procédé au morcèlement. C’est ainsi que les familles fondatrices ont porté plainte contre la mairie de la Commune IV et ses complices. Lorsque le Commissaire du 5ème Arrondissement a su cela, il a immédiatement informé la mairie qui, à son tour, a fait aussi une plainte contre nous. C’est le 8 octobre 2021 que les familles fondatrices reçoivent une convocation en lien avec cette plainte de la mairie pour destruction de ses installations. Les personnes déléguées pour aller écouter la convocation, ont été placées en garde à vue par le Commissaire du 5ème Arrondissement pendant cinq jours avant d’être relâchées le 12 octobre 2021 par le procureur à la suite d’une audience au tribunal de Grande Instance de la Commune IV à laquelle le maire n’a pas voulu assister », a-t-il ajouté.

La mairie s’explique

Joint par téléphone, le chargé de la communication de la mairie, Amadou Aya, a souligné qu’il s’agit de bornages ou délimitations que ses agents sont en train de mener sur l’espace. « Elles (les familles fondatrices) ont agi au nom du droit coutumier. Or, la mairie a demandé un espace à l’Etat du Mali par voie officielle à travers le gouverneur du District de Bamako qui a saisi le gouvernement. Pour ce faire, il faut faire une délimitation et c’est ce processus qui était en cours à la demande de la chefferie de Lassa », a-t-il ajouté.

A la question relative à la lettre de la direction nationale du Cadastre dans laquelle, il est clairement dit que l’Etat n’a affecté, ni cédé une quelconque parcelle dans cette zone pour le compte de la mairie de la Commune IV du District de Bamako, contrairement à ce qu’elle voulait faire croire aux populations, Amadou Aya a répondu : « C’est parce que le ministre de l’Administration territoriale a saisi le domaine pour voir est-ce qu’il y a une charge sur l’espace et les domaines ont répondu qu’il n’en y a pas. Si les domaines avaient constaté qu’il y avait une charge ou un titre foncier, la procédure se serait arrêtée.» Il a aussi ajouté que le dossier était toujours en cours.

Concernant la garde à vue des sept personnes, il a souligné : « Les jeunes qui ont été arrêtés, ont été relâchés, mais il y a un jugement qui est prévu. Vous voyez ! (rire). Mais ce qui est clair, c’est que le procureur qui a tous les éléments, en les relâchant, leur a dit de ne pas toucher à l’espace. »

Ces arguments suffisent-ils pour que la mairie de la Commune IV fasse la délimitation dudit espace sans tenir compte du droit coutumier que son chargé de la communication a d’ailleurs reconnu dans ses propos ? Qu’est-ce que la mairie gagne en intentant un procès contre des populations, qu’elle est censée protéger, dans le seul but de les spolier de leurs terres ? Allez-y savoir.

Ousmane BALLO

Source: Ziré
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