Fidèle à sa tradition de publication sur les grands sujets et les grandes préoccupations de l’heure, Moussa Mara s’est exprimé le 1er novembre 2021 sur la question de la représentation des Maliens de l’extérieur dans les futures institutions de la République. Nous vous proposons ici une synthèse de la réflexion et ce grand intellectuel et leader politique qui nourrit la légitime ambition de diriger un jour le Mali.
«Nos compatriotes de l’extérieur seront d’une importance stratégique pour le Mali post crise et indispensables à la refondation souhaitée. Nous devons en être conscients et engager ainsi une réforme profonde de leur système de représentation pour qu’ils puissent mettre à la disposition du pays le potentiel insoupçonné dont ils disposent» : Telle est la conviction exprimée par l’ancien Premier ministre et leader politique, Moussa Mara, dans une tribune publiée le 1er novembre 2021.
Le Fondateur du parti Yelema (Changement) rappelle que nos compatriotes de l’extérieur représentent plusieurs millions de personnes et apportent au pays «des moyens indispensables à la survie de millions d’autres compatriotes vivant sur le sol national». A ce titre, souligne-t-il, «ils sont indispensables à la stabilité et à la prospérité de notre pays. Ils pourraient être d’un apport encore plus important si l’Etat exploite au mieux toutes les opportunités qu’ils offrent».
Et pour l’ancien Premier ministre, «cela passe par l’amélioration de leur système de représentation vis-à-vis des autorités maliennes, mais également vis-à-vis des autorités des pays d’accueil». Selon son diagnostic, le dispositif actuel (reposant sur les conseils de base et le Haut conseil des Maliens de l’étranger) s’est «progressivement sclérosé» au point de susciter presque partout des contestations extérieures et au sein de ces structures. Tout comme il a été fragilisé par «une politisation importante» qui ne pouvait que profondément discréditer ses responsables. De ce fait, ce dispositif a besoin d’être «renouvelé et amélioré de manière approfondie».
Et c’est plus que jamais le moment de le revoir d’autant plus que le gouvernement de transition a «posé les jalons des réformes à travers la définition du statut de Malien de l’extérieur et de retour d’émigration». Pour M. Mara, cela permettra de «fixer définitivement qui peut mériter ce titre et qui peut également représenter nos compatriotes de l’extérieur». Selon lui, le second niveau de réforme devra porter sur leur représentation et le gouvernement envisage de créer «une nouvelle organisation des Maliens de l’extérieur».
N’empêche que, poursuit Moussa Mara dans sa tribune, «une autre option de réforme est possible et sans doute souhaitable. Elle se basera sur des changements à tous les niveaux de représentation et se traduira par un dispositif de représentation dans les pays d’accueil et un autre dispositif au niveau central. Elle pourra également comporter des suggestions sur d’autres domaines en rapport avec la représentativité de nos compatriotes de la diaspora».
Dans chaque pays d’accueil, propose-t-il, les Maliens doivent être représentés par des citoyens exemplaires. Et puisque la liberté d’association consacrée par la Constitution malienne permet de créer ou de militer dans les associations de son choix, il n’est pas possible de limiter le nombre de groupements des Maliens de la diaspora. Tout comme il n’est également pas souhaitable de les inciter à se regrouper dans une superstructure associative puisque cela ne fait que «déplacer les problèmes des membres au niveau de la structure faîtière».
Il convient donc de «laisser les citoyens animer» autant d’associations qu’ils souhaitent et laisser coexister toutes les structures y compris celles ayant vocation à être des regroupements d’organisations (Conseils de base, Conseil Supérieur de la Diaspora Malienne/CSDM…).
Choisir tous les 5 ans des délégués élus nominalement
En revanche, rappelle l’ancien Premier ministre, «l’Etat doit organiser le mode de désignation des responsables des Maliens de la diaspora pour veiller à une représentation légitime et efficace. Ce qui facilitera sa collaboration avec elle dans chaque pays». Pour ce faire, il peut envisager quelques innovations. Les membres de la diaspora peuvent être ainsi appelés à choisir tous les 5 ans des délégués élus nominalement parmi toute personnalité (indépendante ou membre d’association) voulant représenter ses concitoyens de l’extérieur.
La liste électorale peut être soit celle des élections présidentielles soit le fichier de tous les titulaires de la carte consulaire. Le nombre d’élus (de 3 à 25 par exemple) dépendra de la population estimée de la diaspora malienne dans le pays. Les élus formeront un collège des délégués de la diaspora malienne du pays d’accueil, chargé de la représenter sur toutes les questions officielles, publiques ou collectives. Le collège désignera un bureau avec au moins un Président, un vice-président et un secrétaire. 2
Au niveau central, le dispositif sera une émanation des collèges des pays d’accueil. Le choix des délégués élus par un vote transparent sera de nature à améliorer «fortement la représentativité et surtout la légitimité de ceux en charge de travailler avec l’Etat autour de toutes les questions liées aux Maliens de l’extérieur». Ce système de représentation sera renforcé par une instance centrale appelée par exemple «Conseil des Maliens de l’extérieur» pouvant être créé et composé par les délégués désignés par le collège de chaque pays. Ce conseil peut être composé d’une centaine de membres répartis entre les pays en fonction du nombre de Maliens qui y vivent. Il aura un mandat de 5 ans. Le conseil fonctionnera comme une assemblée qui se réunira une ou deux fois par an. Il mettra en place un organe exécutif de 25 représentants parmi ses membres. Cet organe élira un président et son ou ses vice-présidents.
«C’est cette instance et cet organe qui auront la charge de la question des Maliens de l’extérieur pendant leur mandat et désigneront des représentants à chaque occasion où cela est sollicité (membre d’institutions, de commissions, d’autorités…)», le leader politique et intellectuel… Pour lui, le dispositif ainsi présenté n’est pas contradictoire avec la prise en compte des Maliens de la diaspora dans d’autres institutions comme l’Assemblée Nationale, le Conseil économique, social et culturel ou encore le probable futur Sénat. «L’institution envisagée pourra nommer certains membres et d’autres pourront être élus conformément à la loi», précise-t-il. Et Mara de conclure en rappelant que ce dispositif complète «une réforme de notre système consulaire en y accordant la priorité aux Maliens résidant à l’extérieur pour pourvoir aux postes de consul». Ce qui n’est que justice à leur égard compte tenu de leur immense apport au pays !