C’est parti pour les Assises Nationales de la Refondation depuis plus de 48 heures maintenant. Dans un geste de fair-play politique et citoyen, le Président de la transition, Colonel Assimi Goïta, a reçu ensemble les représentants de la classe politique et des acteurs de la société civile pour leur faire part de la haute idée qu’il a de la situation et du futur et du devenir du Mali. Si tant est que futur et devenir ne riment pas forcément dans la versification française, les deux mots ne traduisent pas moins le souhait que tout bon citoyen nourrit pour son pays. Il s’agit, clairement, de l’avenir de la patrie commune, le bien le plus précieux que nous avons en partage et que nous devons surtout sauvegarder, coûte que coûte, pour les générations à venir.
Le colonel Assimi Goïta a-t-il été compris par ses interlocuteurs le vendredi, 19 novembre 2021, date anniversaire du premier coup d’État opéré dans notre pays ? Au-delà de la symbolique, ce jour, dans le saint des saints de la République, il y avait matière à réflexion. Chacun pouvait bien défendre son positionnement ou camper sur sa position anté, mais le Mali interpelait fortement.
Les positions sont tranchées, on le sait. Mais les autorités de la transition, après avoir courageusement notifié à la CEDEAO qu’elles ne peuvent organiser sur le vif aucune élection au regard de la situation de délitement avancé du pays, ont engagé les Assises Nationales de la Refondation le lundi. Peu importe désormais de multiplier les énergiques philippiques contre le pouvoir transitoire qui n’est en rien responsable de la mal gouvernance qui a causé son avènement. En effet, outre qu’en sept ans le régime d’IBK a fait peser sur le Mali des hypothèques mortelles (le pays a perdu deux tiers de son territoire, l’insécurité sévit partout et une menace morbide de partition plane toujours sur lui), en plus il a fait le lit aux armées étrangères, pléthoriques et inefficaces. Le dernier gouvernement vrai d’Ibrahim Boubacar Keïta issu de l’Accord politique en mai 2019, qui a été marqué par l’entrée de certains des derniers mohicans censés apporter les remèdes de cheval, a été l’échec le plus retentissant. Il ne tiendra qu’une petite année, de mai 2019 à fin mai 2020, date du dernier conseil des ministres jusqu’à la première mobilisation populaire le 05 juin. La suite est connue. Non seulement le chef de ce gouvernement n’a jamais pu présenter une déclaration de politique, mais en plus les agiotages sont devenus une banalité.
La France sait tout cela, mais va-t-elle les nier ou les expliquer à sa façon : autant de manquements à la bonne gouvernance pour justifier on ne sait quel retour rapide à l’ordre constitutionnel ? Tout compte fait, elle est en face de l’effet papillon. Le battement d’ailes de cet insecte à Niamey peut provoquer, après effet d’entraînement et d’amplification, des bourrasques dévastatrices à Paris. En s’abattant sur le Mali comme une nuée de sauterelles, la France est en train de récolter dans le Sahel la tempête qu’elle n’a pas souhaitée. Mais comprendra-t-elle que les peuples conscients qui se dressent ne sont pas des ours qui dansent au cirque ?