Face à la difficile situation que traverse notre pays, le Mali, je ne peux rester insensible. Comment ne pas agir après l’odieuse attaque de Songho, dans laquelle plus de 30 de nos compatriotes ont été brûlés vifs ? En effet, depuis plusieurs années, la crise ne fait que s’aggraver au point de priver des milliers de nos compatriotes d’un avenir certain. La peur et la fébrilité dominent les actions de nos compatriotes en cette période où l’engagement et le courage auraient dû l’emporter. Voir tous les jours ces milliers d’enfants déscolarisés et désolidarisés, qui vivent dans une extrême misère, est un véritable supplice. Ces conditions m’ont interpellé et elles continuent à m’interpeller.
La situation dans la capitale, Bamako, est certes déplorable, mais que penser des zones reculées ?
Lors de mes déplacements à l’intérieur du pays, je rencontre des femmes et des hommes qui s’accrochent à ce qui leur reste de plus précieux, à savoir leur dignité. Leur quotidien n’est fait que de misère et de désolation. Beaucoup n’ont plus de perspectives à part quitter coûte que coûte leur espace naturel qui est devenu un véritable enfer.
Pendant ce temps, l’élite peine à trouver une volonté commune pour construire une trajectoire cohérente et productrice de résultats rapides pour le pays. Pourtant, rien de potable pour le pays n’est envisageable sans la réunion des savoirs, des expériences et des compétences. Assister chaque jour aux confrontations du pour et du contre est une grande souffrance car les perspectives d’un avenir désirable s’éloignent, laissant le chaos et la désillusion émerger.
L’indifférence n’est pas la bonne option, mais encore pire est l’égoïsme personnel empêchant la réalisation d’un projet commun, surtout en cette période délicate. Il est alors nécessaire pour chaque Malienne et chaque Malien de renoncer à une part de son confort personnel pour donner une chance à l’effort collectif, source de réconfort pour nos compatriotes.
La division est la plus grande menace pour notre pays, tous les discours n’allant pas dans le sens du travail et de l’union ne servent pas les intérêts du Mali. Dans aucun pays au monde l’on ne pourrait parler d’entente parfaite à l’interne, la diversification des opinions est une richesse et un atout pour la démocratie. Ces débats doivent cependant se faire dans l’intérêt du pays et sans jamais vouloir arrêter sa progression. Ce sont les fondamentaux même de notre pays qui ont été fragilisés ces dernières années.
La compétition mondiale est rude et la pandémie de la Covid-19 est en train de nous imposer de nouvelles règles de gouvernance. La prospective s’est imposée comme étant la meilleure manière de résister face à un monde où l’incertitude domine. Les acteurs doivent désormais décider dans l’incertitude et cela n’est possible qu’à travers un soutien national.
Au Mali, aucun sujet ne trouve grâce et ne permet l’union sacrée, pourtant cela fait près de dix années que nos jeunes soldats sont engagés dans un conflit qui n’en finit pas. A se demander si nous sommes devenus insensibles au point d’ignorer les nombreux sacrifices ?
La scène politique n’est pas devenue le seul endroit où les postures contradictoires l’emportent, j’ai pu remarquer que la contradiction est devenue un mode d’action qui concerne désormais toutes les sphères de notre société. Pourtant pays du Sanankouya, le Mali aurait dû servir d’exemple à de nombreux pays, comme il l’a été jadis.
Nous devons nous retrouver autour de l’essentiel.
J’appelle solennellement mes compatriotes à nous retrouver tous ensemble autour de l’essentiel. Nous ne sommes pas obligés de taire nos convictions, mais nous devons les mettre à discussion et trouver un consensus transparent, c’est cela le principe de la palabre.
Nous devons prendre conscience de l’évolution du monde et de ses enjeux, cela nous oblige à penser à nos capacités internes de production. Notre pays possède d’innombrables atouts et nous avons une population équilibrée et capable de créer de la richesse interne.
Nos terres arables, notre cheptel, nos deux fleuves ne demandent qu’à être mieux valorisés. C’est donc un véritable déchirement de voir nos jeunes emprunter des voies incertaines. Cette triste situation est le résultat de l’absence d’un objectif commun. La technosphère étatique ne devrait pas souffrir des perturbations politiques, car celle-ci devrait travailler sur des objectifs de long terme.
Ensemble, nous devons prioriser les défis à travers l’enclenchement d’un débat de qualité. Nous devons parvenir à choisir la meilleure solution. Reconnaitre son tort n’est pas une faiblesse mais une force surtout lorsqu’il s’agit de formuler des solutions pour le pays.
A chaque évènement, ce sont des médecins venus de partout qui viennent se pencher sur notre pays et, très souvent, avec des remèdes peu efficaces pouvant produire des effets contraires. Cela est rendu possible parce que nous n’avons pas été en mesure de diagnostiquer les maux de notre pays et de proposer des solutions crédibles. C’est à nous, Maliennes et Maliens, de trouver les ressources nécessaires à la résolution de la crise qui secoue notre pays. Dans cette perspective, la culture joue un grand rôle car nous sommes obligés de puiser au fond de notre culture pour produire la recette miracle et personne ne pourrait le faire à notre place.