Le président français Emmanuel Macron se rendra au Mali le lundi 20 décembre 2021. Une visite pour clarifier les relations entre les deux pays, alors que les sujets de tension s’accumulent ces derniers mois. La défiance à l’égard de la France est attisée par la désinformation sur les réseaux sociaux. Et RFI n’est pas épargnée par les infox.
Cela fait maintenant une vingtaine d’années que notre correspondant Serge Daniel travaille au Mali. Il est depuis quelque temps la cible d’une campagne de désinformation sur les réseaux sociaux. Une vidéo circulant sur Facebook, accuse la France de tout faire pour « couler la Transition Malienne ». Son auteur affirme que notre confrère serait utilisé à cette fin.
Cette publication s’inscrit dans un narratif anti-Français qui présente la France comme l’alliée des terroristes au Sahel. Cette vidéo, déjà vue plus de 140 000 fois, prétend faire des révélations sur Serge Daniel, et affirme détenir des preuves, qu’elle s’abstient néanmoins de fournir. La publication cite des éléments de la vie de Serge Daniel. Notamment le fait qu’il soit Franco-Béninois, ce qui n’est un secret pour personne. Nos confrères fact-checkeurs du Mali ne s’y sont pas trompés. Le site BenbereVérif expose la manipulation dès le 8 décembre 2021.
Sur la vidéo incriminée, on aperçoit une série de photos du journaliste, accompagnée d’extraits d’interview, et d’une voix de synthèse qui l’accuse, à tort, de « vendre son peuple ». Cette même voix lui reproche d’être « en contact direct avec les terroristes présents au nord du Mali ». Une accusation qui n’a aucun fondement. La bande son ajoute qu’à « chaque fois qu’une mission doit être exécutée par les terroristes au Mali, Serge Daniel est au courant de tout ». C’est une interprétation volontairement erronée d’un entretien qu’il a tenu à la Radiodiffusion Télévision du Burkina en 2018.
Accusations calomnieuses
Ce qui est pervers dans cette affaire, c’est l’insinuation d’une proximité avec les terroristes. En fait, si l’on se réfère à l’entretien original, accordé il y a deux ans à la RTB, notre correspondant explique bien comment il traite ce sujet sensible des attaques terroristes. Des revendications d’attentats peuvent lui parvenir, mais elles ne sont pas systématiquement diffusées et en tout cas, jamais sans vérification, notamment auprès des autorités locales.
C’est le travail de base du journaliste. Recevoir des revendications de terroristes, ce n’est pas relayer leur propagande. L’entretien original est tout à fait clair, les accusations proférées sur ce compte Facebook suivi par près de 12 000 personnes sont injustifiées. Outre l’utilisation fallacieuse de cette ancienne interview, la campagne de désinformation recourt également à deux faux tweets.
Ces fabrications viennent soi-disant compléter le message de la vidéo. En substance, le journaliste s’excuserait de travailler pour la France. Mais en réalité, il s’agit de textes inventés, apposés sur des tweets de Serge Daniel. Ce sont des montages bas de gamme puisque ni la typographie, ni la charte graphique de Twitter ne sont respectées. Serge Daniel a déposé plainte.
Influence russe
Ce sont des attaques anonymes donc difficiles à tracer. Mais en examinant les partages, on constate que ceux qui contribuent à amplifier la circulation de l’infox, sont aussi d’ardents défenseurs d’un rapprochement russo-malien. Le caractère artificiel de l’amplification est manifeste, car l’infox est parfois retweetée toutes les minutes par un même compte. Les twittos les plus actifs diffusent également des messages à la gloire de Vladimir Poutine, appelant les mercenaires russes de Wagner à venir au Mali et dénonçant la venue d’Emmanuel Macron ce lundi 20 décembre.