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Redéploiement hors du Mali des soldats allemands de la MINUSMA et EUTM : Effet Wagner ou ténacité de Bamako ?
Publié le vendredi 24 decembre 2021  |  L'Observatoire
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Premier pays à avoir reconnu le Mali dès son ascension à l‘indépendance, la République fédérale d’Allemagne s’apprêterait à faire le bagage de ses 1500 soldats en mission au Mali pour des raisons sécuritaires. Mais, l’effet Wagner ou la coriacité de Bamako obligeraient, à en croire certaines sources.


Au Mali où ils interviennent au sein de la Minusma et de la mission de formation de l’UE (EUTM), les soldats allemands seront bientôt déployés sur d’autres horizons que le Mali. Et pour cause l’insécurité, selon la ministre allemande de la Défense Christine Lambrecht.

En effet, dans l’hebdomadaire allemand Bild am Sonntag, la ministre Lambrecht a été claire sur sa gestion des missions étrangères des soldats allemands, qu’elle souhaite « davantage débattus au parlement » et dont « l’objectif constamment réexaminé ». « Je veux que nous reparlions davantage des mandats au Parlement, car les députés envoient les soldats en mission et en portent donc la responsabilité », a expliqué Mme Lambrecht.

Elle est revenue sur« la mission de la Bundeswehr de former les forces maliennes » et le contexte spécifique du Mali où la situation sécuritaire se dégrade alors que les forces Barkhane se replient à Gao.« La sécurité de nos soldats est ma première priorité. Nous devons maintenant vérifier s’il est possible de former des soldats maliens aussi bien, voire mieux, dans un autre endroit plus sûr pour nos soldats », a-t-elle fait savoir.

Les raisons sécuritaires évoquées par le ministre de la Défense allemand sont loin d’être acceptées comme les seules valables. Selon certaines sources bien avisées, l’option malienne de traiter avec la société de sécurité russe Wagner, dont l’arrivée au Mali est décriée à tort ou à raison par les partenaires du Mali. De la CEDEAO à l’ONU en passant par l’UA et l’UE, une éventuelle intervention de Wagner ne serait compatible avec la mission de maintien de paix au Mali. Pis, elle aurait des conséquences fâcheuses dans la sous-région. Tous ces partenaires du Mali ont mis en garde les autorités maliennes de Transition « contre les conséquences que pourrait avoir l’arrivée » de la société paramilitaire privée Wagner au Mali.

Les partenaires traditionnels du Mali accusent le groupe Wagner « de se rémunérer sur les ressources des pays dans lesquels il intervient et de servir les intérêts du Kremlin dans sa conquête géopolitique. Le vrai problème, c’est que le recours à Wagner ne sera pas sans conséquence, d’une part pour les populations, et d’autre part, pour l’armée malienne qui sera attaquée très frontalement et n’aura pas le backup de ses autres partenaires ».

Bamako tenace face à Paris

Dans ce dossier Wagner, Paris est la figure farouchement opposée et qui met la pression sur Bamako. L’ire des autorités maliennes ne s’exprime pas en sourdine. Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, est activement sur la défensive. Dans une interview accordée récemment au Journal l’ESSOR, le ministre Diop dénonce des interférences par rapport à la politique intérieure du Mali. D’abord en appelant la France à la realpolitik : « Nous attendons de la France qu’elle comprenne qu’à Bamako, il y a une autorité de Transition dirigée par Son Excellence, le colonel Assimi Goïta. Qu’il y a aussi un gouvernement dirigé par le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga ».

Ce sont ces autorités avec lesquelles il faut travailler aujourd’hui pour aller vers un retour à l’ordre constitutionnel au Mali. Il faut que l’action de la France s’inscrive dans ce cadre et qu’elle puisse, comme elle l’a indiqué, inscrire aussi son action dans le cadre du respect de ce qui est convenu dans le cadre régional : la Cedeao et l’Union africaine. Même si nous sommes suspendus de ces institutions, il y a quand même un dialogue en cours afin de lever les entraves.

Les entraves, estime le chef de la diplomatie malienne, « sont de plusieurs ordres parce que nous sentons souvent des interférences par rapport à notre politique intérieure. Il est important que la France prenne quelque distance dans la gestion de la crise au Mali. C’est pourquoi, j’ai rappelé qu’il y a des autorités et qu’il faut que la France travaille avec ces autorités et non avec des parties maliennes ici et là ».

Dans la même interview, le ministre Abdoulaye Diop, depuis longtemps au four et au moulin pour plaider la cause malienne, est, on ne peut plus explicite, sur la question d’un recours à ce que d’aucuns appellent « un groupe de mercenaires russes » : « Nous l’avons appris par la presse. Au début, nous avons estimé qu’en tant que gouvernement responsable, nous n’avons pas à répondre à toutes les rumeurs. Et puis cela a pris une toute autre ampleur et c’est devenu pratiquement une campagne d’acharnement contre le Mali. Nous comprenons aussi que ces accusations de recours à des mercenaires sont pratiquement utilisées comme un moyen de chantage pour que le Mali puisse renoncer au renforcement de la coopération avec la Russie. Mais le gouvernement du Mali a clarifié cette question avec nos partenaires français et avec les autres qu’il n’y a pas de contrat signé avec qui que ce soit. Notre politique n’est pas de fonder nos efforts sur une société de sécurité privée, mais c’est plutôt de privilégier le renforcement et l’équipement de nos forces de défense et de sécurité. »

Somme toute, le redéploiement annoncé des soldats allemands hors du Mali ne met pas encore fin à la coopération militaire entre le Mali et l’Allemagne, puisque ces forces vont continuer dans la formation des forces de défenses et de sécurité. Cependant, le dernier mort revient à Bamako de décider de ses partenaires militaires.

Cyril Adohoun

Source: L’Observatoire
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