Depuis bientôt un an, environ 150 militaires des forces spéciales suédoises forment l’ossature de la Force de réaction rapide [QRF – Quick Reaction Force] du groupement européen de force spéciales « Takuba » qui, créé à l’initiative de la France, a la mission d’accompagner les Forces armées maliennes [FAMa] dans leurs opérations de contre-terrorisme.
Signe de l’importance de cette participation, un colonel suédois a remplacé le général français Philippe Landicheff à la tête de Takuba en novembre dernier.
« Pour la première fois, un pays européen autre que la France prend le commandement de la TF Takuba pour les quatre prochains mois. La Suède montre à nouveau toute sa détermination et sa volonté d’agir auprès de la France, de ses partenaires européens et des Forces armées maliennes pour poursuivre la lutte contre les Groupes armés terroristes au Sahel », s’était alors félicité l’État-major des armées [EMA].
Seulement, et sans doute parce qu’elles doivent se préparer à faire face à d’autres menaces, les forces suédoises ne maintiendront pas leur participation à au groupement européen au-delà du mandat d’un an qui avait été initialement fixé.
« Nous avons d’ores et déjà décidé que nous quitterons cette année la force Takuba », a en effet déclaré Ann Linde, la ministre suédoises des Affaires étrangères, en marge d’une réunion avec ses collègues de l’Union européenne, organisée à Brest, ce 14 janvier.
Cette annonce n’est donc pas vraiment une surprise… Et ce retrait suédois devrait être partiellement compensée par l’arrivée – prévue – d’un contingent danois fort d’une centaine de militaires du Jaegerkorps au sein de Takuba. D’ailleurs, à Conpenhague, on s’interroge sur le bien-fondé de cette mission, à l’image du quotidien Politiken, pour qui « tout porte à croire qu’une solution militaire est impossible » au Mali.
Cela étant, le gouvernement suédois s’interroge aussi sur sa contribution à la Mission multidimentionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali [MINUSMA], notamment en raison de l’attitude des autorités maliennes de transition, issues d’un coup d’État conduit en deux temps… et de l’arrivée de « formateurs » militaires russes, dont on ne sait s’il s’agit de mercenaires du groupe Wagner ou de membres des forces réguilières russes.
« La question qui se pose est celle de savoir ce que nous allons faire avec la MINUSMA », a en effet déclaré Mme Linde. Il ne serait donc pas surprenant non plus que Stockholm rappelle ses 250 militaires actuellement engagés au sein de cette mission des Nations unies…
L’avenir de l’EUTM Mali, la mission conduite par l’Union européenne [UE] pour former les FAMa, se pose également. À Brest, le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a dit souhaiter la maintenir… mais « pas n’importe quel prix ».
« Pour l’instant nos missions de formation et de conseil aux forces armées et de sécurité intérieures maliennes vont continuer », via l’EUTM Mali, « mais on a déjà suspendu l’aide budgétaire aux autorités maliennes à partir du moment où on a su que les élections n’allaient pas avoir lieu », a expliqué M. Borrell, en faisant référence à la décision des autorités de transition maliennes de ne pas organiser d’élections en février prochain, contrairement aux l’engagement qu’elles avaient pris.
« Nous discutons […] dans quelles conditions cette lutte contre le terrorisme pour laquelle nous sommes mobilisés peut se poursuivre », a, de son côté, précisé Florence Parly, la ministre française des Armées, pour qui il est « urgent que la transition politique [malienne] soit menée à son terme ».
La coopération avec les FAMa « n’a de sens que si elle s’intègre dans un cadre plus global […] avec des réformes de fond notamment sur la gouvernance. Ce travail-là n’est possible qu’avec des autorités légitimes », a poursuivi Mme Parly. « La question de la légitimité est posée. Cette junte est arrivée au pouvoir après deux coups d’État. Ce sont des autorités qui sont dans une logique de fuite en avant pour se maintenir au pouvoir à tout prix », a-t-elle insisté.