"Il y a beaucoup de questions et un grand gâchis à constater", estime sur franceinfo le sénateur Christian Cambon alors que la junte au pouvoir au Mali vient d'expulser l'ambassadeur de France.
"Perdre la vie pour assurer la sécurité d'un pays qui ne veut pas de vous pose beaucoup de questions", a estimé, mardi 1er février sur franceinfo, Christian Cambon, président de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat, et sénateur du Val-de-Marne. Il va auditionner dans les prochains jours Jean-Yves Le Drian et Florence Parly sur la situation au Mali. La junte malienne, au pouvoir dans ce pays, va expulser l'ambassadeur de France, a annoncé la télévision d'Etat lundi 31 janvier. Les autorités maliennes ont justifié cette décision par les récentes déclarations "hostiles" de responsables français à leur encontre.
franceinfo : Comment évaluez-vous la situation de la France au Mali ?
Christian Cambon : C'est un sentiment d'amertume parce que dans ces jours difficiles pour la France au Mali je pense aux 53 soldats qui y ont laissé la vie et aux centaines de blessés qui seront marqués à vie. Le constat c'est que la junte, actuellement au pouvoir au Mali, ne souhaite pas la présence française et les humiliations qu'on nous fait endurer doivent nous conduire à un examen en profondeur pour évaluer les solutions que nous avons devant nous. Cette humiliation pose nos relations avec les pays d'Afrique. Le ministre dit qu'elle est excellente mais malgré tout c'est un signe de faiblesse que nous identifions et c'est aussi un questionnement en Europe. J'espère que les indications du gouvernement sont les bonnes. Il y a beaucoup de questions et un grand gâchis à constater.
La France doit-elle désengager ses militaires ?
Le désengagement avait commencé puisque le président de la République avait annoncé un redéploiement mais je pense que maintenant il faut être très clair. Quand je vois le Mali remettre en cause nos accords militaires, quand je vois qu'il interdit le survol d'une partie du territoire du Mali à notre propres avions, quand je vois la présence des milices Wagner alimentées par les Russes qui prennent de plus en plus de positions dans le pays, les campagnes anti-françaises, bien évidemment on en peut que tirer les conclusions de cette situation.
"Je pense qu'il faut avoir le courage de dire que ce n'est sans doute plus à partir du Mali qu'il va falloir poursuivre notre présence au Sahel."
Christian Cambon, président de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées du Sénat à franceinfo
Est-ce que la lutte contre le terrorisme continue ?
Bien sûr, mais il faut savoir qu'il n'y a jamais de solution militaire à ce genre de conflit. La solution politique qui est dans la main des dirigeants maliens finira un jour par s'imposer, mais elle doit respecter un certain nombre de principes. Nos soldats se sont battus pour assurer la sécurité et la souveraineté du Mali. Quand on apprend qu'un certain nombre de ses dirigeants sont en train d'ouvrir des pourparlers avec des terroristes qui ont du sang français sur les mains, c'est inacceptable.
Qu'attendez-vous du gouvernement français ?
Nous demandons qu'il associe la représentation nationale. Nos concitoyens se posent beaucoup de questions sur cet engagement. Ils voient nos soldats revenir blessés ou pire encore et se demandent pourquoi on est là-bas. Perdre la vie pour assurer la sécurité d'un pays qui ne veut pas de vous pose beaucoup de questions.