Le 35ème sommet de l’Union africaine s’est tenu les 5 et 6 février, au siège de l’institution panafricaine à Addis-Abeba en Ethiopie. L’Union africaine, comme les organismes sous-régionaux à l’image de la CEDEAO ou de la CEMAC, souffre d’un manque de crédibilité aux yeux d’une grande partie de la population du vieux continent, laquelle a du mal à percevoir son impact sur les questions vitales. L’UA et les organismes sous-régionaux sont critiqués pour leur manque de cohérence face aux putschs. Autant l’UA doit être intraitable sur les coups d’Etat, autant elle ne doit pas transiger avec les violations répétées des questions de bonne gouvernance.
Ce sommet consacre le passage de témoin entre le Président de la République démocratique du Congo, Félix Antoine Tshisekedi et, celui de la République du Sénégal, Macky Sall. Le Président Sall prend la présidence de la conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine dans un contexte assez difficile marqué par la résurgence des coups d’Etat militaires (Soudan, Tchad, Mali, Guinée et Burkina Faso) et la persistance des conflits (Ethiopie, Centrafrique, Libye, Somalie, etc.). Devant les ministres africains des affaires étrangères, le Président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a dénoncé la « résurgence inquiétante des coups d’Etat militaires ». Pour contrer ces coups d’Etat militaires et promouvoir l’alternance pacifique du pouvoir en Afrique, l’Union africaine doit aller au-delà des simples condamnations. Cela est valable pour la CEDEAO.
Cette présidence sénégalaise intervient aussi dans un contexte de fortes tensions au Sahel avec un risque réel de collusion entre les grandes puissances. Les défis sont nombreux pour le Président sénégalais qui doit travailler à promouvoir la démocratie et favoriser l’émergence d’une bonne gouvernance prenant en compte les aspirations des populations africaines. Il doit œuvrer pour qu’au Mali, au Burkina Faso, en Guinée, au Soudan et au Tchad, on retourne à l’ordre constitutionnel.
Macky Sall doit travailler sur la lutte contre le terrorisme notamment au Sahel. Aujourd’hui, les pays comme le Bénin, le Togo, le Ghana, la Côte d’Ivoire sont sous les menaces des groupes armés radicaux qui sèment la terreur au Mali, au Burkina et au Niger au nom d’une idéologique digne du moyen âge. Tous les efforts de lutte contre le terrorisme au Sahel seront vains sans une pacification de la Libye, un Etat sans gouvernail depuis l’assassinat du guide Mouammar Kadhafi par les forces de l’OTAN. Or, on ne sent pas trop l’Union africaine sur le dossier libyen, devenu un terrain de confrontation entre l’Europe, la Turquie et certaines monarchies du Golf.
Macky Sall doit axer aussi ses énergies sur la défense des intérêts stratégiques de l’Afrique face à l’Union européenne, la Chine, la Russie et les USA. Il y a une urgence pour l’Afrique de s’affirmer dans le concert des grandes nations.
Pour l’ONG Human Rights Watch, le président Macky Sall « devrait veiller à ce que la protection des civils, les droits humains, la justice et l’obligation de rendre des comptes soient au cœur de l’agenda de l’Union africaine. Le président sénégalais Macky Sall assume la présidence de l’Union africaine à un moment où le continent est confronté à d’énormes défis en matière de sécurité et de santé, à des bouleversements politiques et à des troubles sociaux », a déclaré Carine Kaneza Nantulya, Directrice du plaidoyer au sein de la division Afrique de Human Rights Watch. « Malgré ces défis, Macky Sall a l’occasion de démontrer le leadership de l’UA et son engagement vis-à-vis de ses principes fondateurs en adoptant des positions courageuses et sans compromis contre les abus cautionnés par des États, en répondant aux appels à la protection et à la justice des victimes et en faisant pression pour des relations multilatérales justes et équitables avec les pays du nord.»