PolitiqueDr Choguel KoKalla Maïga face aux ambassadeurs accrédités auprès de la République du Mali : « Le Mali n’est ni un pays belliqueux ni va-t-en guerre. »
Le premier ministre de la Transition, Dr Choguel Kokalla Maïga, a rencontré hier lundi, 7 février 2022 à la Primature, les ambassadeurs accrédités auprès de la République du Mali. Il a profité de l’occasion pour indiquer que le Mali n’est ni un pays ni belliqueux ni va-t-en guerre.
A l’entame de ses propos, le premier ministre Choguel Kokalla Maïga a réitéré l’intérêt qu’accordent les autorités maliennes à la coopération internationale. « Au-delà des échanges bilatéraux directs que nous avons au quotidien, le Gouvernement se fait le devoir de vous rencontrer, chaque fois que de besoin, sous forme de réunion d’information ou d’échanges, autour de sujets d’intérêt commun, dont l’objectif ultime est de renforcer la compréhension mutuelle », a déclaré Dr Choguel Kokalla Maïga qui a ajouté que l’action diplomatique du Mali repose sur la coopération, la solidarité, l’entraide, compréhension mutuelle, le bon voisinage.
Ce qui oppose le Mali à la CEDEAO
Le premier ministre Choguel Kokalla Maïga a profité de cette rencontre pour dénoncer les sanctions de la CEDEAO contre le Mali. « Il se trouve également que notre réunion de ce jour se tient dans le contexte diplomatique et politique sous régional que vous connaissez tous, un contexte marqué par les sanctions illégales, illégitimes et inhumaines de la CEDEAO à l’encontre de notre pays, le Mali, victime d’une triple crise sécuritaire, politique et institutionnelle, et sanitaire liée à la COVID-19 », a-t-il fustigé avant de préciser que ce qui unit le Mali et la CEDEAO est très fort. Il est, selon lui, plus fort que la conjoncture politique et transcende les vicissitudes du moment.
Mais selon le premier ministre, un problème de compréhension oppose le Mali à l’organisation sous régionale. « Ce qui nous oppose à la CEDEAO en ce moment est la différence de grille de lecture sur la Transition politique en cours au Mali, notamment sur ses spécificités, sur ses défis et ses enjeux qui la différencient de beaucoup de processus politiques similaires en cours en Afrique », explique le chef du gouvernement de la transition. Il ajoute que ce qui oppose le Mali à la CEDEAO, est « le prisme simpliste d’analyse qui ne tient pas compte, de notre point de vue, ni de l’aspiration profonde du peuple malien au changement et à la stabilité, ni de la complexité de la crise multidimensionnelle qui affecte le Mali depuis plus d’une décennie ».
A en croire le premier ministre malien, certains chefs d’État de la CEDEAO travaillent pour le service de certains pays à agendas cachés. «Ce qui nous oppose à la CEDEAO, c’est cette volonté acharnée, sous le couvert de la préservation de l’ordre constitutionnel, de certains Chefs d’Etat de vouloir vassaliser le Peuple malien pour le compte de l’agenda caché de puissances extra-africaines, profitant du fait qu’aujourd’hui l’Etat malien est affaibli, ébranlé dans ses fondements et se trouve à terre, pour des raisons sur lesquelles il n’est nullement besoin de s’attarder, car suffisamment connues de tous les observateurs avisés », a-t-il déclaré.
Par ailleurs, le docteur en télécommunications a affirmé que la Transition malienne n’est pas le fruit d’une prise de pouvoir classique de la part de militaires ayant fait irruption par effraction sur la scène politique par attrait du pouvoir. «La Transition malienne est le couronnement du soulèvement populaire qui a mobilisé le Peuple dans la rue, des mois durant, pour exiger la fin de la dérive et l’abîme dans lesquelles la mauvaise gouvernance, la corruption, l’impunité et l’impasse sécuritaire ont fini par plonger notre pays, menacé de dislocation si non de disparition en tant que Nation, en tant qu’Etat indépendant et souverain », a-t-il expliqué.
« Nous ne sommes pas des va-t-en guerre »
Le premier ministre a également saisi l’occasion pour préciser que les autorités maliennes sont ouvertes au dialogue, et avec la CEDEAO et avec tous les autres partenaires. Ce partenariat, selon lui, doit se faire dans le respect mutuel. « Je m’empresse de vous rassurer que le Mali demeure une terre de dialogue. Notre pays et notre peuple, profondément pacifistes et tolérants, n’entendent engager de bras de fer avec aucun Etat, ni avec aucune institution, surtout pas avec les peuples frères de la sous-région avec lesquels il est lié par un destin commun, par l’histoire et la géographie », a-t-il déclaré devant les Ambassadeurs accrédités auprès de la République du Mali. Selon lui, le Mali est un pays de dialogue, d’accueil, de dignité et de respect. « Héritiers de ce grand pays, nous ne sommes pas des va-t-en guerre. En recevant le Président de la Commission de l’Union africaine le 25 janvier 2022, notre frère Moussa Faki MAHAMAT, le Président de la Transition et moi-même lui avons exprimé la totale disponibilité du Mali au dialogue avec la CEDEAO », a précisé Dr Choguel Kokalla Maïga avant de remercier certains pays voisins qui ont soutenu le Mali dans la difficulté, à savoir la République de Guinée, la République Islamique de Mauritanie, et la République Algérienne Démocratique et Populaire.
Aussi, le chef du gouvernement a indiqué que « les Autorités de la Transition n’ont aucune intention de s’isoler de leurs partenaires, comme on l’entend si malicieusement, çà et là, de la part de ceux qui se sont donné pour mission de les combattre et de les déstabiliser, au moment même où notre Armée engrange sur le théâtre des opérations des victoires indéniables contre les Groupes armés terroristes ».
Pour lui, le Mali est une digue pour la stabilité régionale en Afrique de l’Ouest. « Que personne ne s’y méprenne. Le Mali mérite la solidarité et non des sanctions dans sa lutte contre le terrorisme, contre les défis climatiques, économiques et sanitaires. Perdre cela de vue relève soit de l’hérésie, soit d’un agenda de déstabilisation dont on ne sait à qui il va profiter. En tout cas pas aux Maliens ni aux Africains », prêche-t-il.
Choguel sollicite partenariat dans le respect mutuel
Comme on pouvait s’y attendre, le premier ministre s’est prononcé, au cours de cette rencontre avec les Ambassadeurs, sur la brouille entre le Mali et son partenaire historique, la France. Aussi, a-t-il expliqué les raisons de la diversification des partenaires dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. « Il va s’en dire que nous avons décidé de tirer les leçons de tout ce qui précède et de nous donner désormais les moyens de protéger davantage les Maliennes et les Maliens. C’est notre responsabilité première », a-t-il indiqué avant d’ajouter : « Ce choix patriotique que nous assumons pleinement nous vaut aujourd’hui des menaces, des invectives, des pressions politiques, diplomatiques, économiques et financières de la part de certains partenaires qui ne conçoivent le partenariat que dans le sens de leurs intérêts exclusifs et leur seule vision de l’organisation de l’Etat. Qui estiment que c’est à eux, mais pas au peuple malien, de décider d’avoir à la tête du pays les dirigeants qu’il veut et qui font son bonheur ».
Pour le premier ministre, le partenariat doit se faire dans le respect mutuel. « Pour nous, le partenariat, c’est l’écoute mutuelle, c’est le respect mutuel, c’est agir ensemble, c’est travailler de concert sur des objectifs communs, au bénéficie mutuel de nos pays et de nos peuples respectifs », dit-il avant d’ajouter : « Le partenariat, c’est la non-immixtion et la non-ingérence dans les affaires intérieures d’un Etat ; c’est le respect plein et entier de sa souveraineté et de son indépendance ».
A l’en croire, le partenariat, c’est se parler en faisant preuve d’écoute mutuelle, pour comprendre et si possible prendre en compte nos préoccupations et réciproquement. « Ces principes sacro-saints auxquels le Mali demeure fermement attaché n’ont, hélas pas toujours été observés ni respectés ces derniers temps. Ils sont même mis à mal dans le moment présent par ceux qui se croient fondés à décider pour nous et à notre place », a-t-il précisé.
Pour sa part, le doyen des ambassadeurs accrédités auprès de la République du Mali, a indiqué que le Mali se trouve au milieu de la diplomatie internationale. « C’est très nécessaire de savoir ce qui se passe au Mali. La Communauté internationale veut la réalisation rapide du retour à l’ordre constitutionnel. Soyez convaincus que nous sommes tous des grands amis du Mali », a-t-il rassuré.