Réveil douloureux chez les Bathily dans la commune rurale de Mountougoula. Frères et sœurs ne sentaient plus que leur fatigue et leur cœur toujours serré. Sur les visages, le mot malheur se formait et ne disparaissait pas aussitôt comme une bulle naît et éclate en même temps. D’habitude, on se chahutait à l’entame de la journée, histoire de ne pas débuter la journée avec une mine d’enterrement, préjudiciable aux bonnes affaires. Les Bathily sont commerçants de père en fils, ils excellent dans le ciment, le fer à béton.
Un malheur frappait. L’aîné se balançait un peu d’un pied sur l’autre. Le benjamin pensait que c’était à Ousmane d’annoncer aux autres la mauvaise nouvelle. Gafou se tenait la tête dans les mains et se demandait quel démon avait quitté l’enfer pour venir loger ce matin chez eux. Mamadou se saisissait d’une chemise et la passait prestement, quand Malick annonçait, d’une voix détimbrée, le vol des cinq motos de type Jakarta garées dans le magasin.
Il ne s’agissait pas d’une farce, d’un poison d’avril – encore très loin. L’audace et le professionnalisme des auteurs d’un tel forfait étaient déconcertants. La porte n’avait pas été forcée, laissant croire que les auteurs disposaient de clés passe-partout. Les barbelés sur les murs étaient intacts, donc l’intrusion ne s’était pas faite par le mur de clôture, mais par l’entrée principale qui ne souffrait d’aucune trace d’infraction. L’hypothèse qui dansait dans la tête des occupants de la demeure privilégiait la piste d’une complicité interne, ou du moins les auteurs. Pour l’instant, les recherches se poursuivaient.