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Sadio Lamine Sow, ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale du Mali
Publié le lundi 30 avril 2012   |  Autre presse


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© Autre presse par dr
Sadio Lamine Sow, ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale du Mali


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La nomination à Bamako d’un président de la République intérimaire, puis d’un Premier ministre « non politique » - bien que candidat à la présidentielle – issu de la diaspora, n’avait pas suscité d’intérêt du côté de Radio Méditerranée Internationale (Médi 1), la radio marocaine « franco-arabe » qui émet depuis Tanger. Pas au point, en tout cas, de me demander d’apporter mon éclairage « Out of Africa » sur ces décisions. Mais la réactivité a été forte dès lors qu’a été connue la composition du premier gouvernement Traoré/Diarra*.
Certes, il s’agissait de dire d’où venaient les 24 ministres nommés mais, surtout, d’apporter mon point de vue sur l’implication, de plus en plus forte, du Burkina Faso sur la scène diplomatique et (en ce qui concerne la Côte d’Ivoire, le Mali, la Guinée Bissau) politique ouest-africaine. J’ai déjà eu l’occasion de dire la préoccupation qui est celle du Royaume du Maroc en ce qui concerne la situation dans le « corridor sahélo-saharien » et l’indépendance de « l’Azawad » (cf. LDD Spécial Week-End 0533/Samedi 7-dimanche 8 avril 2012).

Saad Eddine El Othmani, ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération, était voici peu, à Ouaga, dans le cadre d’une tournée africaine qui l’a conduit à Abidjan et Niamey. Reçu le samedi 14 avril 2012 par le président du Faso, Blaise Compaoré, il a, au nom du Roi Mohammed VI, souligné l’intérêt que Rabat porte à l’évolution de la situation au Mali et a rendu hommage à l’action menée, au titre de la Cédéao, par le médiateur burkinabè.

On notera que le conseil exécutif des ministres des Affaires étrangères de la Cen-Sad se tiendra à Fès (Maroc) du 26 au 28 mai 2012 et que le Burkina Faso s’attache à refonder une institution créée par la Libye pour la gloire (africaine) de Mouammar Kadhafi (cf. LDD Sen-Sad 001/Jeudi 1er mars 2012). On notera aussi que les entretiens avec Compaoré ont porté sur la situation au Mali et celle qui prévaut en Guinée Bissau. « Deux nouveaux fronts de déstabilisation » écrivait le quotidien marocain Le Matin dans son éditorial du 18 avril 2012, soulignant que « Le Maroc, engagé dans le combat de l’unité africaine, reste fidèle à sa vocation […] C’est un objectif d’avant-garde constant - rappelle-t-il dans un papier intitulé : « Le Maroc, chantre de la solidarité africaine » - aux antipodes des discours lénifiants, une profession de foi qui privilégie l’action et anticipe sur l’histoire ».

La formation du gouvernement Traoré/Diarra intrigue les commentateurs. Alors qu’il y a une flopée d’hommes et de femmes politiques au Mali, tout autant de partis et de candidats à la présidentielle, parmi les 24 ministres (un ministre d’Etat et trois ministres délégués) nommés difficile de trouver des têtes d’affiche. Pas même un Touareg. Mais trois officiers supérieurs (colonel + colonel-major + général) sont les numéros 3, 4 et 6 du gouvernement avec, pour deux d’entre eux, des jobs en adéquation (Défense/Anciens combattants ; Sécurité intérieure/ Protection civile) ; le troisième (colonel Moussa Sinko Coulibaly), chargé de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de l’Aménagement du territoire, est, en quelque sorte, le ministre de l’Intérieur et aura, à ce titre, à connaître des questions cruciales liées au fichier électoral et à l’organisation des élections. Pour le reste, hormis la nomination de Tiéna Coulibaly, le patron du coton malien, à l’Economie, Finances et Budget, rien de notable. Sauf…

… Sauf que le seul ministre d’Etat de ce gouvernement – et donc un quasi vice-premier ministre –, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, s’appelle Sadio Lamine Sow et qu’il était connu, jusqu’à présent, pour avoir été, depuis plus d’un quart de siècle, l’éminence grise de… Blaise Compaoré. Mais cette éminence grise reste, pour beaucoup, à Ouaga comme à Bamako, dans le… noir complet. Sow n’est pourtant pas un inconnu à Ouaga. Il figure, officiellement, sur le listing des vingt-quatre « collaborateurs du président » comme le premier de ses « conseillers » sans attribution spécifiée** aux côtés de Mahamoudou Ouédraogo, Joseph Kahoun et Frédéric Assomption Korsaga.

La présence de Sow dans l’entourage du président du Faso remonte à la nuit des temps. Quand Thomas Sankara a émergé sur la scène politique voltaïque et a été nommé secrétaire d’Etat à la présidence de la République chargé de l’Information, le 8 septembre 1981 (il sera, par la suite et avant la « Révolution du 4 août 1983 » nommé Premier ministre du 19 janvier au 17 mai 1983), il a suscité un intérêt tout particulier au sein de la presse panafricaine. C’est ainsi qu’il s’est lié d’amitié avec un ancien journaliste de Jeune Afrique et de Demain l’Afrique, le zaïrois Buana Kabué.

Le 17 mai, quand Sankara a été destitué de ses fonctions de premier ministre, arrêté et enfermé à Dori avec le capitaine Henri Zongo, Blaise Compaoré et Kabué, tous deux célibataires et qui partageaient la même villa à Ouaga, n’étaient pas encore revenus de Bobo-Dioulasso où un important meeting avait été organisé. Compaoré échappera au coup de filet grâce au flair de son chauffeur Hamidou Maïga et se refugiera à Pô (où il était le chef du Centre national d’entraînement des commandos) mais Kabué, qui avait fait un détour par l’hôtel Silmandé pour se doucher, va se faire cueillir en ville.

Kabué va, dans le sillage de Compaoré, vivre les jours et les heures qui, dès la libération de Sankara, vont aboutir à la conquête du pouvoir le 4 août 1983. Kabué deviendra le conseiller de Sankara puis de Compaoré, fera carrière dans le monde des affaires (il sera conseiller de l’industriel camerounais James Onobiono avant de se retrouver à la tête de la Ligue zaïroise des droits de l’homme et d’assurer, pour le compte du président Mobutu, un rapport sur… la presse et l’information au Zaïre).

C’est Kabué qui va servir de pôle d’ancrage de journalistes panafricains dans l’entourage de la nouvelle équipe au pouvoir. Parmi ceux-ci deux Maliens : Mohamed Maïga*** et Sadio Lamine Sow. Maïga est mort à Ouaga en décembre 1987 dans « des circonstances troubles » mais son nom sera donné au Centre de presse de la capitale burkinabè (fermé depuis quelques années). Il collaborait à Afrique-Asie, le plus engagé à gauche des magazines panafricains. Sow débarquera à Ouaga, au temps de la « Révolution », dans les bagages de Maïga et signera, lui aussi dans Afrique-Asie, plusieurs articles sur le Burkina Faso avant de s’imposer dans l’entourage de Blaise Compaoré au lendemain des événements du 15 octobre 1987.

Sow va rapidement confondre information et communication. Puis va devenir, dit la rumeur ouagalaise, l’éminence grise du chef de l’Etat, l’homme des missions confidentielles à la frontière de la diplomatie secrète. On le dira proche du colonel Kadhafi mais aussi d’Omar Bongo Ondimba ainsi que de Charles Taylor et de quelques autres personnalités africaines.

Voilà donc que Sadio Lamine Sow sort de l’ombre. Mais pas des ambiguïtés de sa fonction. Ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale après quelques décennies au service du Burkina Faso, les commentateurs ne manquent pas de s’interroger sur le rôle qu’il va jouer à Bamako. C’est, effectivement, la bonne interrogation !

* On notera que le décret de nomination du gouvernement, par « le président de la République sur proposition du Premier ministre » est signé « Cheick Mohamed Abdoulaye Souad dit Modibo Diarra ».

** Dans le listing officiel des conseillers, Sow vient ainsi après François Compaoré, le petit frère du président du Faso (conseiller économique), Thomas Palé (conseiller diplomatique), Gabriel Tamini (conseiller aux affaires sociales), Léontine Marie-Florence Zombré/Zida (conseiller juridique).

*** Maïga est notamment l’auteur de « 12 heures avec Thomas Sankara », une interview du président du Faso publiée dans le numéro de septembre-octobre 1983 d’Afrique-Asie. Simon Malley, l’emblématique patron d’Afrique-Asie interviewera également lui-même le leader burkinabè, entretien publié dans le numéro de mars-avril 1984.

Jean-Pierre BEJOT

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