La Journée internationale des femmes est célébrée au Mali depuis 1994 et tire ses origines de la révolte des ouvrières des usines textiles de Chicago, aux Etats-Unis, pour l’amélioration de leurs conditions de vie dans les années 1857. Elle a été institutionnalisée et déclarée en 1977 par l’Organisation des Nations unies (ONU) comme “Journée internationale de la femme” (JIF). La 28e édition est célébrée sous le thème national : “Rôle et place de la femme dans la refondation du Mali”.
Le défi de la célébration du 8 mars est de rendre les femmes du passé fières et de renforcer l’inspiration des femmes d’aujourd’hui. Selon Sokona Gakou, présentatrice et actrice, elles ont fait beaucoup de progrès en matière d’égalité, néanmoins, il reste beaucoup à accomplir. “La loi 052 a besoin d’être encore renforcée parce que le quota donné à la femme dans les instances de décision n’est pas suffisant parce qu’elles ne sont pas assez représentées dans les sphères de la société. Elles ont besoin d’occuper les places qui leur faut, car une femme peut faire tout ce qu’un homme peut faire. Je ne revendique pas un féminisme aveugle où la femme pense que quand un homme crie, elle doit crier aussi, elle reste femme.
Je ne suis pas contre la soumission de la femme dans son foyer parce que sans cela, le foyer ne marcherait pas. Je ne veux pas aussi qu’on enlève aux hommes leurs rôles de chefs de famille, mais je voudrais qu’ils acceptent qu’on ait notre mot à dire parce que dès qu’une femme a une compétence quelque part, les hommes cherchent à l’écraser. Il est temps que cela cesse. Il faut que les hommes sachent que nous ne voulons pas les évincer, mais qu’on veut simplement partager ce qu’on a appris avec les autres”, explique Sokona Gakou.
La Journée Internationale de la femme constitue une occasion propice et unique pour réanimer, inspirer et marquer les efforts des femmes en vue de l’égalité des chances et l’autonomisation des femmes.
“J’apprécie en j’encourage énormément l’entreprenariat féminin. Quand on met une femme quelque part, elle est obligée de se battre doublement par rapport à un homme parce qu’elle vient avec un statut d’infériorité. Elle se bat pour montrer sa compétence pour être acceptée”, indique la présentatrice de l’émission An Ka Ben.
Notons que Sokona Gakou a fait ses débuts à la RTS avant de poser ses valises à Africable Télévision où elle a créé deux émissions. “J’ai créé ‘Le Grand Sumu’ et ‘Rencontres’ et je les présentais aussi. En créant le Grand Sumu, je voulais faire revivre la tradition africaine, de faire en sorte que les artistes puissent rester dans la tradition musicale pure et dure du Mali pour que cela ne se perde pas. ‘Rencontres’ était une émission moderne qui consistait à inviter les artistes pour qu’ils parlent de leurs parcours et il y avait des clips entre les interventions”, rappelle-t-elle. Au moment où la présentatrice finissait avec Africable, elle a été sollicitée par le cinéaste et réalisateur Souleymane Cissé pour être l’actrice principale de son film “Min yè”. “Ce rôle principale m’a amené partout dans le monde. J’ai été invitée en 2009 au Festival de Cannes où j’ai fait le tapis rouge. J’ai été traitée avec les plus grands honneurs réservés à toutes les grandes stars du monde. Après cela, j’ai été invitée au Festival de New York où je suis restée pendant 7 ans. Ensuite, je suis revenue au Mali et maintenant j’ai repris à l’ORTM où j’ai créé une émission dénommée «An Ka Ben» (Réconcilions-nous, en bambara)”.
A ses dires, cette émission c’est pour réconcilier les personnes qui ne s’entendent pas. “On ne peut pas régler la guerre, parvenir à la paix si les personnes en bas ne s’entendent pas d’abord. Pour qu’il y ait paix, il faut d’abord que les personnes s’aiment entre elles, qu’elles se pardonnent, se réconcilient, se comprennent et se tolèrent. Je m’attaquer à la mésentente des artistes qui ne se parlent pas, les religieux qui se font la guerre et qui ne se parlent pas, les politiciens qui ne se comprennent pas, les pères de famille qui ne se comprennent pas avec leur famille, les enfants qui ne s’entendent pas avec leurs parents, les époux qui ne s’entendent pas avec leurs épouses. C’est cette paix que je veux d’abord”, déclare Sokona Gakou.
Elle est fière d’avoir initié cette émission, car le lancement a été un succès. “Iba One était mon premier invité pour parler de paix et de réconciliation. La dernière émission que j’ai enregistrée et qui n’a pas encore été diffusée, j’ai réussi à réconcilier Mariam Ba et Balla Camara qui ne s’entendaient pas et à ma grande surprise, il y a Maïmouna Haïdara aussi et Balla qui se sont réconciliés. J’essaye de diversifier le maximum possible mes invités”, se réjouit-elle.
De son accession à l’indépendance à nos jours, le Mali s’est engagé dans un processus de construction d’une République démocratique, plurielle et laïque. D’où le thème : “Rôle et place de la femme dans la refondation du Mali”. “La femme est le pilier de la famille. Quand son époux a mal, elle a mal, quand son enfant a mal, elle a mal, n’importe qui a mal dans la société, la femme a mal, donc obligatoirement les femmes jouent un rôle très important dans la reconstitution du tissu social. C’est la mère qui éduque, c’est l’épouse qui guide et conseille son époux. Pour qu’un pays avance, il faut que les femmes soient utilisées à bon escient. Il faut qu’on donne la place qui revient à la femme parce qu’on l’a beaucoup sous-estimée dans le temps. Elle était seulement cantonnée au rôle de ménagère où elle se faisait belle et se taisait, mais avec la modernité, les choses ont changé. C’est cela le sens du 8 mars, le combat de la femme pour qu’on lui reconnaisse sa place et qu’on lui redonne cette place”, martèle la femme battante.
Sokona Gakou continue en ces termes : “Il s’agit véritablement du combat de la femme pour son affranchissement de femme au foyer et elle devient battante, combattante, défenseure, protectrice, un membre influent et important de la société.
Rien ne marche sans la femme qu’elle soit visible ou pas. J’ai beaucoup de respect pour les hommes parce qu’ils sont nos pères, époux et frères, mais je n’ai pas besoin de leur donner une place parce que naturellement ils ont déjà cette place. Ce sont nous les femmes qui revendiquent cette place qu’on nous a refusée. Il ne s’agit pas d’une place de suprématie ni de supériorité, mais de complémentarité. Il faut que les hommes sachent que les femmes sont une sorte d’associée morale et physique pour eux”.
S’agissant de la discrimination faite aux femmes dans les administrations en termes de poste de responsabilité, la conceptrice de l’émission “Grand Sumu” indique qu’il est difficile d’être une femme sans être victime de cette situation qu’on le dise ou non. Elle ajoute que si un jour, il y a une loi votée en faveur du harcèlement au sein des administrations qu’elle serait la première à défendre cette loi.
Sokona Gakou rappelle à ses cadettes qu’une femme c’est un trésor et qu’elle a besoin de se respecter physiquement et moralement et de respecter les autres. “Un homme se glorifie quand on le qualifie de coureur de jupons. Par contre, quand une femme fréquente plusieurs hommes, on la qualifie de prostituée. Je demande à mes cadettes de faire beaucoup attention, car elles ont la chance de se construire un bel avenir, qu’elles ne gâchent pas cela. On peut bien vivre dans la dignité, le respect et le travail. Je leur conseille de revenir en arrière pour comprendre nos valeurs”, lance-t-elle.
Pour terminer, Sokona Gakou souhaite que la paix, l’entente sociale, la cohésion sociale et le développement s’instaurent au Mali et que les femmes puissent bénéficier loyalement des postes qu’elles méritent. A éducation égale, diplôme égal, emploi égal.