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Dossier du bradage des immeubles de l’état : Un ex-PDG de l’ACI et plusieurs ex-ministres dans le viseur de la justice ! Près d’un milliard de Fcfa versés à des intermédiaires
Publié le samedi 16 avril 2022  |  Aujourd`hui
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© aBamako.com par A.S
Le Premier ministre s’est rendu hier sur les chantiers de la Cité universitaire de Kabala
Bamako, le 12 décembre 2014. Kabala. Le Premier ministre s’est rendu hier sur les chantiers de la Cité universitaire de Kabala. Cette visite de Moussa Mara s’inscrivait dans le cadre des nouvelles reformes en cours par le gouvernement pour le développement du nouveau pôle universitaire de Kabala.
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Les nombreuses irrégularités qui caractérisent les opérations de cession des immeubles de l’Etat, bien que relevées par le Bureau du vérificateur général, en son temps, n’avaient connu aucune suite, jusqu’à ce conseil des ministres du mercredi 6 avril 2022 où les autorités de la Transition ont annoncé avoir transmis ce dossier sulfureux à la justice. D’ores et déjà, dans le viseur de la justice, deux ex ministres de Feu le président IBK et un ex Pdg de l’ACI qui a mené cette opération ayant rapporté plus de 16 milliards de Fcfa, non sans permettre à des intermédiaires déclarés de se partager un peu moins d’un milliard de Fcfa.

Nous avions évoqué dans nos colonnes que pour une opération qui s’est déroulée dans l’opacité totale, sans publicité, encore moins d’appel d’offres, comment les acheteurs ont-ils eu vent des immeubles à céder pour prendre connaissance des prix et des conditions de vente ? Qui les a contactés et comment cela s’est-il déroulé ? Par ailleurs, est-ce qu’on a procédé à l’expertise réelle des immeubles en question avant de procéder à l’estimation de leur valeur ? Qui a fait les estimations ? Mais le cas le plus étonnant que nous avions posé est celui des intermédiaires grassement rémunérés. En effet, comment pour des opérations si secrètement gérées, ces gens présentés comme des intermédiaires ont-ils pu être informés des ventes des immeubles pour pouvoir jouer le rôle de “coxeurs” afin d’empocher, chacun, une somme équivalant à 5% de la valeur de l’immeuble concerné ? En plus, qui étaient ces intermédiaires et en avaient-ils la qualité ou étaient-ils des prête-noms pour récupérer une part non négligeable du produit de la vente de ces immeubles de l’Etat ?


Kalifa Sissoko
Rappelons que le Ministère du Logement, des Affaires foncières et de l’Urbanisme (MLAFU) avait commis l’Agence de cessions immobilières (ACI), par mandat n°2013-001/MLAFU-SG du 25 juillet 2013, pour procéder à la vente de certains bâtiments publics de l’Etat. C’est ainsi qu’un nombre important de bâtiments de l’Etat dans le district de Bamako “a fait l’objet de cession suite au changement de leur vocation ou en raison de leur situation au centre commercial dans le District. Ces cessions n’ont néanmoins fait l’objet d’aucune évaluation tant sur le plan technique que financier par les services compétents” écrivait le Bureau du vérificateur général (BVG) dans son rapport annuel 2015.

Il n’existe aucun Décret autorisant la vente des immeubles de l’Etat

Plus grave, le ministre du Logement, des Affaires Foncières et de l’Urbanisme, en donnant ce mandat à l’ACI, violait la loi car il n’existe aucun décret pris en Conseil des ministres pour autoriser la cession desdits immeubles. Il y a donc violation des dispositions du Décret n°01-040/P-RM du 2 février 2001 déterminant les formes et conditions d’attribution des terrains du domaine privé immobilier de l’État, comme le signalait d’ailleurs le BVG dans le rapport précité.


Mamadou Tieni Konate
Il faut retenir que le MLAFU s’est borné à s’en référer aux Lettres n°0653/PM-CAB du 21 mai 2008 et n°0236/PM/CAB du 14 mars 2013 du Premier ministre pour donner mandat à l’ACI en vue de la vente ou de la location des bâtiments administratifs au Centre commercial de Bamako. Et le BVG de dénoncer des faits graves: “Le MLAFU a inclus dans le mandat octroyé à l’ACI des immeubles non immatriculés. En effet, la cession de cinq immeubles non immatriculés au Livre foncier, donc sans numéro de titre foncier, a été inscrite dans le mandat donné à l’Agence, en violation de la réglementation en vigueur. Cette situation affecte la sécurité des transactions y afférentes et le droit de propriété de l’Etat”, écrit le Vérificateur général.

Un cabinet privé recruté en catimini pour l’expertise des immeubles en lieu et place des services compétents de l’Etat

Par ailleurs, ajoute le BVG: “Le MLAFU a irrégulièrement inclus dans le mandat de l’ACI un immeuble faisant l’objet d’une hypothèque. Il a fait figurer sur la liste des immeubles dont la gestion a été confiée à l’ACI un bâtiment ayant fait l’objet d’une hypothèque dans le cadre de l’accord de prêt entre une banque étrangère et l’État malien, relativement au financement des travaux de construction de la Cité Administrative de Bamako. Pourtant, l’ACI a cédé le bâtiment pour un montant de 1,45 milliard de Fcfa en l’absence de la radiation de l’hypothèque consentie en faveur de ladite banque”.

Cela renvoie à la question des études préalables qu’il fallait mener avant d’exécuter ces opérations de cession des immeubles de l’Etat et principalement l’évaluation de la valeur desdits immeubles afin de pouvoir fixer un prix e cession convenable.

A ce niveau, le rapport du Vérificateur révèle que “le MLAFU a irrégulièrement recruté un expert privé. Il a commis un cabinet d’architecture privé pour procéder au recensement et à l’expertise immobilière des bâtiments appartenant à l’Etat, alors que cette compétence relève de la Section Promotion Immobilière de la Direction Nationale de l’Urbanisme et de l’Habitat. Le recrutement ainsi opéré renchérit le coût financier de l’opération de cession des bâtiments publics de l’Etat”. Comme si cela ne suffisait pas, le MLAFU en rajoute à la série de gaffes, notamment en recrutant un Cabinet d’Expertise Immobilière “sans mise en concurrence”. Pis, pour procéder au recensement, à l’état des lieux et l’expertise immobilière des bâtiments administratifs du centre commercial de Bamako, “le Ministre a choisi, par simple lettre, un Cabinet d’Expertise Immobilière, en violation des dispositions régissant la commande publique. La transparence et le libre accès à la commande publique n’ont ainsi pas été respectés” constate le BVG.

Le Ministre a recruté un expert immobilier qui a sous-évalué

la superficie de certains immeubles

En outre, “le Ministre du Logement des Affaires Foncières et de l’Urbanisme a commis un expert immobilier qui a sous-évalué la superficie de certains immeubles. En effet, les superficies de deux immeubles dont la gestion a été confiée à l’ACI ont été sous-évaluées avec conséquemment une diminution des montants de mise à prix à hauteur de 768, 25 millions de Fcfa” relève le BVG. Autant d’irrégularités, voire des fautes pour lesquelles les responsabilités doivent être situées et les auteurs en répondre devant la justice. C’est en ce sens que la saisine de la justice par les autorités de la Transition est salutaire.

Du côté de l’ACI, ce mandat donné par le Ministère, bien qu’illégal a été quand même exécuté, mais avec aussi beaucoup d’irrégularités.

A ce niveau, les constats du BVG en dissent long: “L’ACI n’a pas recouru à la vente aux enchères publiques lors de la cession des bâtiments publics. Elle n’a fourni aucune preuve de publicité donc de mise en concurrence des acquéreurs potentiels des bâtiments concernés. Cette non mise en concurrence a entaché la transparence des opérations de cession et a procuré des situations de privilégiés à certaines personnes physiques ou morales”. Et le BVG d’enfoncer le clou: “L’ACI a cédé des bâtiments publics suivant un mode d’attribution illégal. Lors de certaines cessions, le mode “location-accession” qui ne figure ni au nombre des modes d’attribution prévus par le Code domanial et foncier, ni dans le mandat donné par le MLAFU à l’ACI a été utilisé comme mode d’attribution”. Les opérations de cession s’étant donc déroulées en catimini, comment les acquéreurs ont-ils été choisis ? Qui a pris contact avec eux ? Et quid des intermédiaires tombés comme des cheveux dans la soupe pour encaisser ensuite 5% du montant de chaque cession ?

Une véritable chaine de complicité

Il fallait bien être ami d’enfance, un proche ou simplement un prête-nom d’un des responsables en charge de la vente des immeubles de l’Etat pour détenir des informations permettant d’être intermédiaire ou de le simuler pour encaisser des centaines de millions de Fcfa. Ceux qui parlaient en son temps de pure délinquance concernant ce dossier de bradage des biens de l’Etat n’avaient pas tort et d’ailleurs, trouver un terme plus fort aurait mieux qualifié ce qui s’est réellement déroulé.La justice, par le biais du parquet de la République, a bien raison d’intervenir car ce dossier nécessite d’être passé au crible pour savoir qui est réellement impliqué ? Qui a fait quoi et à quel titre ? Et déterminer ainsi le niveau de responsabilité de chacun des intervenants. C’est toute une chaine de complicité qui a été mise en place, dans laquelle des gens, jusque-là insoupçonnés, ont eu un rôle à jouer pour gagner des dizaines, voire des centaines de millions de nos francs, sans aucun effort. Une véritable tontine à ciel ouvert !

Les intermédiaires déclarés reçoivent près d’un milliard de Fcfa : des prête-noms ?

Parmi ces intermédiaires, il y a des retraités tranquillement assis chez eux depuis des années, mais qui, subitement, se sont retrouvés mieux informés que tout le monde pour entrer dans ce business de bradage des immeubles de l’Etat en tant qu’intermédiaires et gagner des sommes faramineuses. Qui les a informés ? Comment ont-ils identifié les acquéreurs potentiels ? De quel droit ont-ils agi pour vendre un bien public ? Quelle autorité a validé leur intervention en tant qu’intermédiaire ? C’est dire qu’ils ont tout simplement été parrainés. Les intermédiaires seraient-ils donc de véritables commissionnaires de gens qui jouent aux plus malins, se cachant derrière eux pour récupérer une partie des 5% de la valeur de cession de chaque immeuble ? Au finish, c’est près d’un milliard de Fcfa que représente la somme déclarée versée aux intermédiaires.



Amadou Bamba NIANG
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