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L’aveu d’impuissance de la CEDEAO face au juntes militaires
Publié le lundi 2 mai 2022  |  mondafrique
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Face à la fronde des juntes au pouvoir en Afrique de l’Ouest qui défient la Cedeao, l’institution ouest-africaine a répondu par un bref communiqué renvoyant ses menaces aux calendes grecques. L’institution s’avoue donc désarmée et constate qu’elle est incapable de forcer les colonels insoumis à revenir à l’ordre constitutionnel dans des délais raisonnables.





La CEDEAO avait donné aux juntes guinéenne et burkinabè un délai pour revenir à la raison et proposer des calendriers de transition acceptables. La date limite avait été fixée au 25 avril 2022, mais les deux pays ont demandé des délais supplémentaires. Si la requête de Ouagadougou paraît acceptable, en revanche, celle de Conakry dépasse les bornes et de très loin…

Traitement de faveur pour le Burkina
Le lieutenant-colonel Damiba et ses frères d’armes ont pris le pouvoir le 24 janvier 2022 et c’est peu de dire que jusqu’à présent la CEDEAO a été très compréhensive. Elle a, jusqu’à ce jour simplement suspendu le Burkina Faso de ses instances, rien de plus. De son côté, la junte a donné un gage en permettant au président déchu, Roch Marc Christian Kaboré de regagner son domicile, où il est néanmoins étroitement surveillé.

C’est le seul geste de bonne volonté qu’elle a manifesté. Elle a validé une charte de la transition fixant celle-ci à trois très longues années. Un délai inacceptable pour l’institution sous-régionale et probablement pour les militaires eux-mêmes qui risquent d’être contestés dans la rue s’ils ne parviennent pas à ramener la sécurité sur le territoire. Reviendront-ils à la raison ?

La Guinée sur une mauvaise pente
Le colonel Doumbouya a perpétré son coup d’Etat en septembre 2021 et depuis huit mois, la CEDEAO lui demande très gentiment de publier un chronogramme de retour à l’ordre constitutionnel. Ce que le putschiste ne s’est pas encore résolu à faire. Les sanctions prises par l’organisation présidée actuellement par le ghanéen Nana Akufo Ado ont été minimales : gel des avoirs et interdiction de voyage pour les militaires au pouvoir. Le très autoritaire chef d’Etat s’est même payé le luxe de faire rentrer illico et presto Alpha Condé partit se faire soigner aux Emirats arabes unis.

De plus, la situation en Guinée Conakry se dégrade de jour en jour. Si l’arrivée des militaires au pouvoir avait suscité un immense espoir, l’enthousiasme a fondu comme neige au soleil devant un régime autoritaire et imprévisible. Mamadi Doumbouya est de plus en plus décrié et le parti de l’opposant Celou Dalein Diallo s’apprête à reprendre la direction des manifestations. Les lendemains s’annoncent sombre pour ce pays…

La quadrature du cercle
Comment la CEDEAO peut-elle réagir face à ce non-respect de sa charte ? Cela a été beaucoup commenté, écrit, mais il n’en est pas moins vrai : le fait qu’elle ait validé les troisièmes mandats anticonstitutionnels d’Alpha Condé et d’Alassane Ouattara lors des élections présidentielles de 2020 ont totalement décrédibilisé l’institution.

Ce n’est toutefois pas le seul problème auquel les chefs d’Etat d’Afrique de l’Ouest sont confrontés. Les sanctions très lourdes qu’ils ont imposées au Mali n’ont pas porté leurs fruits. La junte au pouvoir à Bamako n’a baissé que de très peu ses prétentions et a réitéré sa volonté de prolonger la transition de deux années à partir du 22 avril 2022. Ce qui équivaudrait à un mandat « cadeau » de 44 mois ! En outre, ces mesures drastiques ont pénalisé les Etats voisins, notamment le Sénégal et la Côte d’Ivoire, même si elles ne sont pas appliquées à la lettre. En prime, la CEDEAO, qui était déjà perçue par les populations comme « un syndicat de chef d’Etat » est devenue encore plus impopulaire après les punitions infligées au Mali. Elle fait face à une véritable fronde dans tous les pays d’Afrique de l’Ouest.

Imposer des sanctions au Burkina Faso et à la Guinée ne ferait que renforcer les mécontentements et inversement cela augmenterait la cote des militaires qui ne manqueraient pas de se poser en victimes. D’autant que ces derniers n’hésiteraient pas non plus à jouer la solidarité entre eux, comme l’a montré le récent voyage du colonel Damiba à Bamako.

Que reste-t-il à la Cedeao comme outil ? Menacer avec son bras armé, l’Ecomog, comme elle avait envisagé de le faire au Mali après le « coup dans le coup » de mai 2021 ? Inenvisageable, dans la mesure où elle échoué avec la Misma et n’a pas été en mesure de mettre en place une force pour lutter contre le terrorisme, elle se ridiculiserait.

Il ne lui reste plus que la patience et la diplomatie, c’est d’ailleurs la teneur de sa réponse à la demande de délai des deux récalcitrants : « la Cedeao a décidé d’envoyer des missions dans ces deux pays qui permettront de préparer un rapport pour le sommet ». Un rapport pour un sommet ! Qui dit mieux ?
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