La fermentation verbale de cet autre Français contre le Mali a toutes les vertus de relancer l’escalade verbale entre la France et le Mali. Et pour cause, sur la chaine de télévision du Sénat français, le sénateur Christian Cambon a pris tout son courage à deux mains pour vomir sa rancune tenace sur la Nation malienne éprise de paix et de justice.
Tout cela, parce que le Mali a dénoncé l’ensemble des accords de défense qui le liait à l’ancienne Métropole, qui d’ailleurs est en position de faiblesse dans sa volonté cynique de maintenir l’Afrique dans son vilain néocolonialisme. Il devrait s’inspirer du cas de son patron, Macron et de son homologue des Affaires étrangères, Le Drian dans un passé récent.
Sur le plateau de cette télévision, Christian Cambon est allé pour son malheur étaler toute sa médiocrité au grand jour. Des propos absurdes qui sont dénués de tout sens ont été proférés par lui, forçant du coup la réaction de plus d’un sur les réseaux sociaux de par le monde entier.
La journaliste l’a invité à parler de ce qui se passe au Sahel. Elle a soulevé la dégradation des relations entre Paris et Bamako notamment le sujet des vidéos concernant le charnier de Gossi qui serait, selon les Français, un coup monté par l’armée républicaine du Mali et son partenaire Wagner pour accuser la France de crimes de guerre.
Quand la journaliste lui demande s’il est inquiet de la situation, il s’est montré évidemment inquiet de ce qui se passe puisque pour lui, l’actualité ukrainienne a passé sous silence ce qui se passe au Sahel. Cela est faux. Toute personne qui suit l’actualité doit le savoir. Monsieur Cambon doit être vraiment sous informé. Il devrait réfléchir par deux fois d’abord avant d’agir pour éviter de dire des contrevérités. La guerre entre la Russie et l’Ukraine n’a jamais cessé de faire parler de l’imbroglio politique en cours dans les pays du Sahel. Alors, si ce qu’il dit s’avère, comment le Mali est arrivé à mettre l’ambassadeur Joël Meyer à la porte ? De ce fait, il est indéniable que le monde en particulier et l’Afrique en général avaient les yeux rivés sur l’actualité maléano-française. Sur cette première question de la journaliste, monsieur Cambon a passé à côté.
Le fameux sénateur a eu l’audace de dire que le risque de conflit et de déstabilisation du continent africain continue. Selon lui, la junte issue du coup d’Etat a non seulement dénoncé la totalité des accords très anciens et très solides qui liaient le Mali à la France, mais elle a aussi dénoncé Takuba, c’est-à-dire le départ des contingents européens qui accompagnaient la France dans cette affaire. Voilà que le mot est lâché, C’est la fin de la coopération militaire que la France n’arrive pas à digérer. Or toute chose a un début et une fin dans ce bas monde. Cela est évident.
Le poète, Paul Valéry ne l’a pas caché. Il disait que « nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles ». Ce texte peut être pour monsieur Cambon d’une grande importance pour qu’il ne raconte plus d’autres bêtises. « Rien ici-bas ne termine et n’achève », disait Victor Hugo. Monsieur Cambon doit savoir que la France n’était pas un pays libre. De la manière dont l’ancienne Gaulle s’est libérée du joug colonial romain, les Africains à partir du Mali peuvent secouer le cocotier pour sonner la victoire sur le colonialisme sous des formes larvées.
Par la suite de son narratif mensonger, le sénateur Cambon aboie que cette dénonciation repose sur des raisons qui sont absolument stupides du genre. De son point de vue, la France a utilisé l’espace aérien du Mali sans prévenir est absolument invraisemblable. En plus, dit-il, on se sert de la milice Wagner qui a tenté un coup, monté un faux charnier. « Les malheureux qui sont morts, ils ont tenté d’enterrer ces gens-là comme si c’étaient les soldats français qui avaient exécuté des gens. Les satellites qui circulent dans le coin ont démonté cette manœuvre grossière ». La logique voudrait que ce sénateur mette un peu d’eau dans son vin. L’on est en droit de lui dire, comme il n’y a pas d’effet sans cause, Wagner est arrivé au Mali après Barkhane dont l’appellation initiale était la Force Serval. Plus de 5000 hommes plus les autres forces anti-terroristes, rien n’y fit. Les Maliens ne sont pas une nation à regretter des actes posés car depuis belle lurette, le Mali regorge des valeurs sures qui ne lui permettent pas de dire des choses sans fondement. Les satellites dont parle Cambon devraient donc être défectueux quand les terroristes semaient le désordre au Sahel.
Le sénateur pense que le Mali va payer cher d’avoir dénoncé les accords. « Il n’y a plus de respect des normes internationales. Je pense que le Mali paiera très cher le fait de s’être séparé de manière aussi violente des forces françaises qui ont quand même, durant huit ans, assuré la souveraineté de ce pays. Je pense ici encore à ces 57 jeunes qui ont laissé leur vie pour le Mali. On ne sait pas dans quel état serait le Mali si la France n’était pas intervenue. Beaucoup de craintes pour le nord du Mali, tout le Maghreb si un Etat terroriste, un califat s’installe à Bamako ».
Oui, il chante ici comme le cygne. Mais par la grandeur de Dieu et les bénédictions des aïeux, le Mali se relèvera de cette guerre à plusieurs inconnus pour enfin briller dans le concert des nations qui comptent. Quand le sénateur parle des 57 soldats français tombés pour le Mali, il a oublié qu’au cours de ce même terrorisme, des milliers de Maliens militaires et civils ont perdu la vie, des villages entiers ont été incendiés, des écoles fermées avec la volonté d’appauvrir intellectuellement le pays. Mais Dieu est au contrôle, le Mali ne croulera point comme le dit la langue visqueuse. Monsieur Cambon a certainement oublié l’histoire de son pays. En 1944, l’armée de l’Afrique aux côtés de la France et ses alliés s’est battue contre l’Allemagne nazie.
« Une armée profondément originale comme la France n’en a jamais connue, une armée qui compte moitié d’Européens et moitié de musulmans et de coloniaux », écrit Philippe Masson dans son ‘’Histoire de l’armée française de 1914 à nos jours’’. Fin 1944, elle compte près de 600000 hommes dont les deux tiers viennent d’Afrique. Combien ont laissé leurs peaux dans cette guerre qui n’était pas la leur ? Le sénateur doit avoir la réponse à cette question s’il n’ignore pas l’histoire de son pays de l’ingratitude et de la crise de la civilisation, à n’en pas douter.
« La junte agit de manière bien irresponsable et notre souci, c’est d’assurer la sécurité de nos soldats qui restent encore pour un nombre conséquent », dit-il. Si cela est vrai, monsieur Cambon doit savoir aussi que cette ‘’irresponsabilité’’, s’il y en a, est la réaction à l’écart verbal de ses chefs qui ont touché le fond du paternalisme dans leurs propos. Personne n’est dupe et le monde évolue.
La part de vérité d’Ako Maruki à la face de monsieur Cambon
Ako Makuri lance le défi à monsieur Cambon de venir débattre avec lui sur le Mali au Sénat français. Il lui fait savoir qu’ils le suivent, l’écoutent et le scrutent. Selon lui, monsieur Cambon a compris que ses propos ne tombent pas dans les oreilles de sourds. « Vous mesurez maintenant l’importance de tourner votre langue plusieurs fois dans votre bouche avant de parler. Monsieur Cambon dit que je fais semblant de ne pas comprendre ses propos. Quand il dit cela, dit que je suis de mauvaise foi », dit Makuri.
Il fera savoir que c’est Cambon qui est dans le déni. « Vous ne reconnaissez pas vos propres propos. C’est bien vous, au nom de la France qui menacez le Mali. Vous portez la colère de la France. Ni l’armée malienne ni le peuple malien n’ont violenté la France. Ils n’ont agressé aucun soldat français. La violence se fait à coup de canon, je ne sais de quelle violence vous parlez. Monsieur Cambon, quand vous parlez de la déstabilisation du Mali, commencez par parler de la Libye », a-t-il balancé à la figure du sénateur Cambon.
Si c’est la dette que la France pensait venir payer, dans ces conditions de rupture totale, elle reste entière. Les propos malencontreux et les menaces saugrenues sont loin d’être la solution. Un peuple qui crie, « n’est pas un ours qui danse », selon le mot emprunté au poète de ‘’Cahier d’un retour au pays natal’’, Aimé Césaire. « Voici les hommes noirs debout », avait aussi averti Jean Paul Sartre.