Mettre les outils innovants de cartographie et de collecte de données à la disposition du développement communautaire, notamment pour aider les communes à lutter contre les inondations, les dépôts illégaux d’ordures dans les quartiers, ou le manque d’eau potable dans les centres de santé ou les écoles, est désormais une réalité à Bamako. Deux centaines de jeunes maliens ont travaillé entre mars 2020 et mai 2022 pour concrétiser cette initiative dans les quartiers de Daoudabougou en Commune V, de Niamakoro en Commune VI et de Kalabancoro, dans la Commune du même nom. Le résultat a révélé une performance saluée par les responsables de Humanitarian OpenstreetMap Team (HOT) et OpenStreetMap Mali (MapMali), qui ont accompagné ce projet dénommé « OpenCities Africa (OCA) Bamako », sur financement de la Banque Mondiale. C’était au cours de la cérémonie de clôture dudit projet dans la salle Malitel de l’Agetic Mali, le 26 mai 2020.
« Ces travaux nous ont permis de produire une base de données sur les équipements de santé, les équipements scolaires, les points d’eau, les sites de déchets, ainsi que la cartographie du réseau de drainage, parce que tout cela rentre en compte dans la prévention des inondations », s’est réjouie Nathalie Sidibé, responsable de OpenStreetMap Mali, qui a présenté devant un public très intéressé, les résultats du projet OpenCities Africa (OCA) Bamako.
Le projet OpenCities Africa (OCA) Bamako, a pour objectifs d’établir et de mettre à la disposition des autorités et des ONG, une base de données numérique et géo localisée des infrastructures à Bamako, en particulier dans les zones d’intervention. Ainsi ce projet pilote a concerné Daoudabougou en Commune V, Niamacoro en Commune VI et Kalabancoro (Commune de Kalambacoro). Le libre accès et l’utilisation de ces données sont garantis par un hébergement sous licence open data base, selon Nathalie Sidibé. L’utilisation des données collectées a été matérialisée par la confection par le projet d’une carte comportant des éléments nécessaires à la prise de décision. L’atteinte des objectifs de ce projet a été matérialisée par la remise en cérémonie de clôture de la carte confectionnée. Des attestations ont été remises aux jeunes formés et opérationnels pour relever de nouveaux défis. Ainsi le projet a permis de former 230 jeunes sur les outils innovants de cartographie, de collecte de données, avant de les engager dans l’exécution des différentes activités de ce projet dans les quartiers de Daoudabougou (CV), de Niamacoro (CVI) et de Kalabancoro. Il s’est agit de développer les compétences, les mécanismes pour aider les autorités à mieux prévenir et mieux gérer les inondations. Ainsi, le projet a pu localiser tous les sites de déchets dans le district de Bamako, d’abord avec l’imagerie des drones, ensuite avec les collectes des données. Une base de données sur les équipements de santé, les équipements scolaires, les points d’eau, les sites de déchets, ainsi que la cartographie du réseau de drainage, pour prévenir des inondations, est désormais disponible dans les zones d’intervention. Les résultats obtenus permettent de voir les sites de déchets, les dépotoirs non officiels. En outre, le travail dans les centres de santé et les écoles publiques a permis de savoir les écoles ou les centres de santé qui sont en manque de latrine ou qui n’ont pas accès à l’eau potable, pour permettre à la banque mondiale d’intervenir dans ce domaine. La cartographie des réseaux de drainage a été réalisée aussi par les jeunes du quartier qui ont été formés sur les outils de collecte.
Tous les partenaires ainsi que les jeunes desdits quartiers (il s’agit aussi de leur avenir) étaient au rendez-vous de cette cérémonie de clôture d’un projet qui a été jalonné de difficultés, au cours des deux dernières années, telles que le Mali en a connues. On notait la présence des responsables de Humanitarian OpenstreetMap Team (HOT) et OpenStreetMap Mali (MapMali), de la Banque Mondiale, du maire adjoint de la Commune V en charge de l’Assainissement, de l’ancien Premier ministre Moussa Mara et non moins ancien ministre de l’Urbanisme, ancien maire de la Commune IV, des représentants du ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle, du ministère de la Communication et de l’Economie numérique, et de la Modernisation de l’Administration, du gouvernorat du district de Bamako, du projet de résilience de Bamako, de l’Agence de Développement régional de Bamako et de la Croix rouge malienne.
Un projet, trois volets
Le projet OpenCities Africa (OCA) est une initiative de la Banque mondiale, qui est mise en œuvre avec ses partenaires dans 16 villes africaines dont Bamako. Le premier volet de ce projet est l’activité de collecte des données dans les zones d’intervention, parce que la pertinence des décisions dépend de l’existence des données fiables. « Sans données on ne peut pas planifier, prendre de bonnes décisions et c’est comme si on avance à l’aveuglette », schématise Nathalie Sidibé, présidente de l’Association OpenStreetMap Mali et non moins CEO de DataTIC Consulting SARL. Ce volet comporte la digitalisation des zones d’intervention du projet, l’utilisation de l’imagerie des satellites et des drones pour faire la numérisation des zones d’intervention. Dans cette optique, la Banque mondiale a fourni une imagerie de drone datant de mars 2020, qui a permis de digitaliser les zones d’intervention du projet, a indiqué Nathalie Sidibé. Il y a aussi le renforcement des capacités qui concerne la formation des décideurs, des ONG et les start-up à l’utilisation des données, à la mise en valeur des données collectées. Ce volet concerne également la création de partenaires qui travaillent dans le domaine pour la mise en œuvre du projet. « Avant de commencer le projet, nous avons eu à rencontrer individuellement et collectivement, tous les partenaires, qui sont d’une manière ou d’une autre concernés par les différentes thématiques du projet », a-t-elle expliqué. Il s’agit aussi de créer des partenariats autour du projet pour permettre son élargissement dans d’autres villes du pays.
Il y a ensuite les inondations, les déchets qui causent ces inondations, parce que les caniveaux sont considérés pour certains comme des poubelles où ils jettent des ordures qui les bouchent et empêchent les eaux de pluie de s’écouler normalement. Tel est le lien entre les déchets qui bouchent les caniveaux et les inondations. « Quand on veut prévenir et mieux gérer les inondations dans la ville, il faudra aussi prendre en compte la question relative aux déchets, des ordures », a souligné Nathalie Sidibé. C’est ainsi que le conseiller en charge de ces questions au niveau de la Commune V a été très impliqué dès le début du projet jusqu’à son terme. Enfin, le troisième volet du projet concerne l’eau et l’assainissement. La question WASH Eau potable et Assainissement a été également un centre d’intérêt de ce projet, a expliqué Nathalie Sidibé.
Les intempéries sanitaires et politiques
Selon Nathalie Sidibé, le projet qui était conçu pour six mois, a dû prendre deux ans pour être exécuté, à cause des facteurs sanitaire et politique, comme le Covid-19 et le coup d’Etat d’Août 2020, avec la suspension des opérations de la banque mondiale au Mali, qui avait entrainé celle des activités du projet. Celui-ci a officiellement démarré en mars 2020, juste avant la pandémie au Mali, qui a occasionné une suspension de six mois. A la reprise, le coup d’Etat a occasionné une deuxième suspension jusqu’en 2022, a déploré Natalie. Elle s’est toutefois réjouie que les objectifs ont été atteints, d’où le besoin de partager les résultats pour faire bénéficier le plus grand nombre et dégager les perspectives d’un élargissement du projet à d’autres localités en dehors de Bamako.
Pour l’ancien Premier ministre Moussa Mara, et ancien ministre de l’Urbanisme et ancien maire de la Commune IV, ce qui a été réalisé est utile à deux titres. D’abord les jeunes de la capitale ont été dotés en capacité de pouvoir faire de l’identification des ouvrages, de faire le recensement des infrastructures urbaines et donc d’augmenter leur chance d’accéder à un emploi avec des structures qui sont dans ce secteur. Plus de 200 jeunes ont bénéficié de ce renforcement de capacité dont certains sont employés à différents titres. Pour cela, le projet mérite d’être félicité et encouragé. Ensuite, c’est que vous avez permis aux collectivités territoriales et à l’Etat de disposer de bases de données sur les infrastructures urbaines, sur les différents réseaux, sur les équipements. En matière de prise de décision, sans données, c’es aller au hasard. « Nous avons très peu de ressources, il est important de disposer de données, ensuite de prendre des décisions afin d’optimiser ces ressources », a-t-il fait comprendre. A ce titre aussi le projet est très innovant, très impactant positivement. Moussa Mara a mis l’accent sur la nécessité d’amener les collectivités territoriales et l’Etat d’être disposer à se joindre à la phase suivante du projet qui est la réalisation d’infrastructures, la gestion de ces questions d’assainissement avec les ressources disponibles. Il faut que l’Etat aussi joue sa partition, ce qui va encourager les partenaires.
B. Daou
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Encadré: Renforcement des compétences locales
Selon Nathalie Sidibé, tout ce travail a été réalisé par des jeunes du quartier qui ont été recrutés et formés et redéployés sur le terrain pour ce faire. Ils ont fait la collecte des données, sans qu’on appelle des compétences d’ailleurs. Nathalie a lancé un message clair à nos gouvernants qui n’ont plus « aucun prétexte pour aller chercher des compétences ailleurs, pour venir faire ce que nous-mêmes pouvons faire ici. Ce projet que nous venons de réaliser est une preuve palpable que nous pouvons avec les jeunes d’ici, obtenir les résultats qu’on projette, il suffit de les former au fur et à mesure, en fonction des résultats qu’on veut obtenir d’eux », a expliqué Nathalie Sidibé. Il faut avoir confiance en la jeunesse, les gouvernants doivent avec les partenaires accompagner ses initiatives. Selon Nathalie Sidibé, le projet a permis de former plus de 200 jeunes sur différents outils de collecte de données. « Bien formés certains de ces jeunes ont été déjà sollicités et recrutés pour travailler dans d’autres projets. Nous nous en réjouissons, parce que cela fait partie des objectifs de notre projet, à savoir développer les compétences locales et permettre à ces jeunes diplômés d’avoir un emploi », a-t-elle fait remarquer.