SociétéAffaire 600 millions de Francs CFA de l’aide à la presse : Le silence coupable du ministre de la communication, le flou de la maison de la presse
La presse malienne n’est pas arrivée au bout de ses peines. Le quatrième pouvoir craint et souvent haï pour le combat qu’il mène fait aujourd’hui face à un mal qui durant des années a contribué à la dégradation et au ternissement de l’image de ce noble métier . C’est bien la un scandale peu flatteur pour la presse malienne qui vient d’éclater. En effet tout est parti de révélations faites par l’actuel ministre de la communication Harouna Toureh, qui a déclaré que la maison de la presse a perçu plus de 600 millions de francs CFA au titre des aides à la presse de 2018 à 2021. Il n’en fallait pas plus pour mettre le feu aux poudres.
Il faut rappeler que le principe d’aide à la presse qui concerne l’ensemble des organes médiatiques du pays notamment les journaux et les radios a été institué suite au besoin exprimé lors de la conférence d’entente nationale en 1991 « d’instaurer une aide à la Presse indexée au budget de l’État pour promouvoir le professionnalisme dans les médias, favoriser l’encrage de la démocratie et assurer le triomphe de la liberté d’expression par l’exercice d’une presse libre, indépendante et plurielle ». Tout comme l’aide octroyé par l’Etat aux partis politique, cela devait permettre à la presse malienne d’être performante pour mener a bien son combat de tous les jours pour la démocratie et la liberté d’expression, gage d’un état démocratique. Ainsi de 1996 à 2017 les montants versés par la présidence et par le ministère de la communication a toujours été de 200 millions Francs CFA par An.
Toujours en est-il que cela fait des années que la presse malienne est privée de toute aide qu’elle réclame sans cesse pour son épanouissement. Ces aides comprennent l’aspect financier mais aussi la formation, la fourniture d’équipements aux organes entre autres.
C’est dans la foulée de cette réclamation , et pour justifier son bilan d’une année effectué au sein du département de la communication , que l’actuel ministre de la communication, Mr Harounah TOUREH a tenu a mettre les points sur les « I » en donnant les détails des versements effectués au compte de l’aide à la presse . Selon les déclarations faites par le ministre de la Communication lors de son passage dans l’émission « Malikura taasira » en mai dernier : « L’état du Mali de 2018 à 2021 a déjà mobilisé et mis à la disposition de la maison de la presse, 606 millions et quelques. Je dis bien 606 millions ». Choqués de cette annonce, les journalistes ont tenté de comprendre si réellement un tel montant avait été perçu et comment cela serait possible dans le plus grand silence à l’insu de tous , sans que ni le ministère de la communication ni la maison de la presse ne pipent mois durant plus de quatre ans!
La contestation prenant ainsi de l’ampleur, l’actuel président de la maison de la presse et son bureau ont initié une réunion le jeudi 2 juin dernier a laquelle ont pris part l’ensemble des directeurs de publications, pour d’amples explications . Aux dire du président Bandiougou Danté, et sur la base des documents montrés a l’assemblée le jour de cette réunion, C’est bien un total de 602.591.950 francs CFA qui a été versé dans les comptes de la maison de la presse entre 2018 et 2021, et qui se décline comme suit : 71.250.000 FCFA versés en 2018, 290 millions de CFA en 2019. Le cumul de ces deux montant ( soit 361.250.000 FCFA) ayant été reparti entre les radios à travers l’URTEL (150 millions), aux journaux à travers l’ASSEP (150 millions), et à la maison de la presse a raison de 61.250.000 francs CFA.
Pour ce qui est du reste, la maison de la presse avoue avoir perçu 105 223 550 Francs CFA en 2020 dont 50 000 000 ont été utilisés « pour l’achat de matériels audiovisuels pour la Maison de la Presse, d’équipements pour les salles de conférences, de mobiliers de bureau ». Ce montant selon la maison de la presse n’était aucunement destiné à l’aide à la Presse au titre de l’année 2020. Ainsi, pour l’aide a la presse de 2021, la maison de la presse annonce avoir perçu un total de 136.118.400 CFA payé en deux tranches par le ministère de tutelle. A bien faire le calcul c’est bien un total de 602.591.950 francs CFA qui ont été versé par l’état entre 2018 et 2021. Actuellement selon la maison de la presse, le montant disponible à nos jours serait de 191 341 950 Francs CFA. Montant qualifié d’ « insuffisant » et d’ « insignifiant » pour le président de la maison de la Presse Bandiougou Dante et son bureau composé de sept personnes.
LES ZONES D’OMBRE
Alors que nombreux pensaient que les révélations du ministre de la communication n’étaient que poudre aux yeux pour diviser les membres de cette noble corporation, bien de directeurs d’organes de presse sont tombés des nues lorsqu’ils ont découvert le poteau rose, et pour cause ! les montant annoncés ont été perçus par la maison de la presse (entre 2018 et 2021), qui a malgré tout préféré garder le silence tout comme le ministère de la communication qui a aucun moment n’a daigné faire ne serait-ce qu’un communiqué pour annoncer. Au vu de ces agissements nombreux sont ceux tenté de penser à une probable entente entre la maison de la presse et ce département ministériel dont l’actuel locataire a déclaré «Nous avons d’excellentes relations avec la maison de la presse ». Ce qui amène à se demander pourquoi jusqu’à aujourd’hui le ministère de la communication n’a pas convoqué la commission chargée de la répartition des montants alloués ? Pourquoi avoir gardé ce silence alors que les textes à ce sujet sont clairs ?
Apres des années durant lesquelles, il faut le dire, une minorité s’est accaparé les droits d’une majorité, a l’image des pratiques décriées sous le régime IBK, des directeurs d’organes de presse ont décidé de s’unir et de changer la donne. Ainsi pour continuer à défendre les droits de la presse, une association est en passe de voir le jour. Cette association qui suscite l’engouement est pour certains synonyme du « malikura » que tant bien que mal les maliens tentent de concrétiser dans tous les secteurs.
Toujours en est-il que les autorités sont vivement interpellées a plus de rigueur, à s’impliquer, et à communiquer davantage comme cela est fait pour d’autres corps de métiers.