Le mandat de la MINUSMA, la mission onusienne de maintien de la paix au Mali, expire à la fin de ce mois (le 30 juin). La question de son renouvellement est en débat au Conseil de sécurité des Nations Unies depuis hier lundi 13 juin 2022, avant d’être soumise au vote le 29 juin prochain. La MINUSMA est présente dans le pays depuis 2013. Elle compte actuellement près de 15 000 Casques bleus et policiers, mais les relations avec les autorités de la transition se sont dégradées au cours des derniers mois.
Du côté malien comme du côté onusien, le renouvellement du mandat de la MINUSMA est souhaité. Toutes les déclarations officielles vont dans ce sens. Dans les faits, c’est un peu plus compliqué. Abdoulaye Diop, ministre des Affaires étrangères malien, ne cache pas la position du Mali aux Nations Unies. “Je voudrais être clair, nous ne connaissons pas de Wagner, notre problème, c’est comment assurer la survie de notre état qui a perdu les 2/3 suite à l’intervention que vous connaissez. Notre problème, c’est comment assurer la sécurité des Maliennes et Maliens désespérés et que nous n’arrivons pas à protéger ? Notre souci, c’est comment préserver l’unité et l’intégrité territoriale de notre pays’’, a-t-il fait savoir.
Selon lui, c’est la situation qui oblige le Mali à penser à la diversification des partenaires. Devant les diplomates, le ministre Diop a rappelé que le Mali fera le choix de ses partenaires en toute liberté et souveraineté comme chacun des pays et continuera dans ce sens. Toutefois, il a souligné que le Mali reste ouvert aux partenaires qui veulent l’aider dans cet effort, mais, selon lui, le Mali n’acceptera pas qu’un partenaire nous impose, que si un partenaire vient par la porte, l’autre sorte par la fenêtre’’.
Les cadres de la MINUSMA s’inquiètent de la considérable restriction du champ d’action de la mission. Une vaste zone d’exclusion aérienne est imposée par Bamako depuis la mi-janvier dans le centre du pays. D’une manière générale, les exigences pour obtenir des autorisations de vol sont de plus en plus pénalisantes. Plusieurs contingents ouest-africains de Casques bleus se sont d’ailleurs retrouvés bloqués au Mali en fin de mission, alors qu’ils devaient rentrer chez eux.
Surtout, les équipes onusiennes se voient refuser l’accès à de nombreuses parties du territoire. C’est le cas de plusieurs sites où l’armée malienne est soupçonnée d’exactions contre des civils. Et le cas le plus emblématique, c’est le village de Moura.
Recrudescence des violences contre les civils
Les Fama y affirment avoir tué 203 djihadistes en fin mars. Mais de nombreux témoignages font état du massacre de plus de 300 civils par l’armée malienne et ses supplétifs russes. La MINUSMA a donc ouvert une enquête, mais n’a jamais été autorisée à se rendre sur place. Sur ce, Abdoulaye Diop a également salué les grandes opérations d’envergure dans le cadre de la lutte contre le terrorisme faite dans le respect du droit international humanitaire et des droits de l’Homme.
Il a fait savoir que le Mali respecte ces droits pas pour plaire à des partenaires étrangers. “Nous le faisons pour nous-mêmes d’abord, nous les faisons pour nos engagements internationaux, nous le faisons, parce que nous sommes conscients que la lutte menée contre les groupes terroristes, nous ne pouvons pas la gagner en violant les droits. Nous avons besoin de gagner les cœurs et les esprits des Maliens’’, a-t-il souligné, rappelant que son pays est victime d’une campagne médiatique pour ses choix.
C’est que le travail de la division droit de l’Homme de la Minusma n’est pas perçu d’un bon œil par les autorités de la transition. Cette division enquête sur les violences commises contre les civils par les groupes djihadistes, par les groupes armés d’autodéfense, les groupes signataires de l’accord de paix, les forces internationales et l’armée malienne. Or, un rapport publié en fin mai a suscité la colère de Bamako. Il pointait l’explosion des exactions de l’armée : 249 personnes tuées entre janvier et mars dernier, selon ce rapport, par les Fama et, dans certains cas, leurs nouveaux alliés russes. Dix fois plus qu’au trimestre précédent.
Bamako a catégoriquement démenti toute allégation d’exactions et dénoncé une volonté de ternir l’image des forces nationales.