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Lutte politique : Le maestro homme politique, Choguel K. Maïga, explique comment il a survécu grâce à la presse malienne
Publié le jeudi 16 juin 2022  |  Le DEMOCRATE
Séance
© aBamako.com par DR
Séance de travail entre le président de la Transition, le colonel Assimi Goïta, et le Premier ministre Choguel Kokalla Maiga, au Palais de Koulouba
Bamako, le 28 septembre 2021. Le président de la Transition, le Colonel Assimi Goïta, a eu une séance de travail avec le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga de retour de l`Assemblée générale des Nations Unies, à New York.
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Au cours d’une audience qu’il a récemment accordée au bureau sortant de l’Association des éditeurs de presse privée (Assep) du Mali, le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga est revenu sur le rôle que la presse a joué dans le changement intervenu dans les années 1990. Nous vous proposons ici quelques extraits de son intervention.

« Votre demande d’audience a été traitée avec diligence. Ça ne pouvait pas être autrement parce que nous accordons une place de choix à la presse, d’une façon générale, au niveau du gouvernement et des autorités de la transition, et moi-même, par conviction. Parmi les hommes politiques au Mali, s’il y a un qui a survécu, pendant les moments difficiles grâce à la presse, je crois que je dois en faire partie. Il y avait des années où en dehors des journaux, on n’avait pas d’espace d’expression. Nos réunions étaient interdites souvent. Mes adjoints étaient enlevés, souvent par les services spéciaux de l’État, à la sortie des mosquées, souvent à 5h 30, mis dans des coffres des véhicules, le Mercedes cent quatre-vingts dix. Il disparaissait pendant deux semaines. On n’avait même pas où aller se plaindre. Si ce n’est pas quelques journaux privés qui prêter leurs pages, des aspects que beaucoup de Maliens ne connaissent pas, c’est bien arrivée.



Nos familles n’avaient pas de vie. Ma famille ne pouvait rien faire. Mon épouse ne pouvait pas sortir. Mes enfants ne pouvaient pas aller au jardin. On les frappait au retour, finalement j’ai pris toute ma famille et je l’ai amenée au village. Et je suis resté seul. On rentrait à dix-huit heures, je m’enfermais jusqu’au lendemain. Et c’est comme ça pendant trois à quatre ans. Et certains ont démissionné comme ça après les enlèvements quand on les a libérés. La condition, c’est de démissionner du MPR et quand ils amenaient la démission, je les classais discrètement sans en faire leur publicité, pour que la peur ne gagne pas certains. On a passé une phase difficile comme ça. Donc, la Presse était le seul moyen pour nous de continuer à nous faire connaître auprès de l’opinion publique. C’est pourquoi, moi, je suis très sensible à la presse. Je crois d’ailleurs qu’il y a ce débat souvent entre les hommes politiques sur la liberté de presse, qui est un acquis de 1988. Et je vous recommande de prendre votre propre information, prenez la loi de quatre-vingt-huit et celle de quatre-vingt-treize ; vous les comparez, et ça vous donnera une idée pourquoi après les élections de 1992, l’une des premières lois qui ont été modifiées, c’est la loi sur la presse.



La presse indépendante a joué son rôle dans le changement de quatre-vingt-onze. Pour des articles, moins vigilants, des journalistes ont été emprisonnés. Vous allez lire en novembre, décembre 1990, des éditorialistes avaient écrit que Moussa Traoré aura le même sort que Nicolas Ceausescu. Nicolas Ceausescu, quelques mois, on l’a pris avec son épouse, on les a fusillés. Je ne suis pas sûr qu’aujourd’hui un journaliste puisse écrire ça et qu’il soit en liberté. Le premier journaliste qui a été emprisonné, c’est Sambi Touré. Il était au journal L’Indépendant, et Le Républicain en 1994. Il a été emprisonné parce qu’il a écrit un article en disant qu’il y a des bruits de bottes dans les casernes. Pour ça, il a été emprisonné. Le journal ‘’La Roue’’, pour ceux d’entre vous qui avez un certain âge, titrait : le Gouvernement des voleurs et des escrocs’’. C’était pour qualifier le gouvernement de Moussa Traoré. À chaque fois que vous vouliez intenter des procès contre les journalistes en son temps, le président disait non ; ils sont en apprentissage et le moment viendra où personne ne va les écouter. Et vous pouvez aller lire un peu pour votre propre culture les journaux du dernier trimestre de 1990. Vous allez voir de la violence des articles. Pour moins que ça, des journalistes ont été emprisonnés. Cheick Oumar Konaré, il a été obligé de quitter la presse d’ailleurs vous le savez. Il faisait des petits billets dans Nouvel horizon. Il a été pris, battu et jeté pour mort au flanc de la colline. La suite, vous la connaissez, jusqu’aux disparitions forcées des journalistes. Cela fait partie des revendications de la Transition. Donc, la presse malienne, moi, j’ai suivi son évolution et souvent, les débats, je porte la contradiction, mais au Mali, dès que vous portez la contradiction, c’est fini. On dit que c’est les hommes de Moussa Traoré qui parlent, sinon tu n’aurais pas dû parler. Il y en a même qui me disent oui, c’est grâce au 26 mars que vous parlez comme ça. J’ai dit à quelqu’un ici qu’en septembre 1990, personne ne pensait que le Mali allait changer. Aucune association dite démocratique n’était créée encore. Moi j’ai écrit avec d’autres collègues qui étaient dans le bureau national de l’Ungm.

Nous avons demandé la réhabilitation du président Modibo Keita et l’organisation des funérailles nationales pour lui en septembre 1990. Il y en a qui sont venus le dire après la chute du régime. Mais nous, on l’a dit, quand personne ne pensait que le régime allait changer, on l’a dit, étant encore dans le parti parce que pour nous, on allait vers l’ouverture politique. Il fallait solder tout ce qui nous a divisés par le passé. Ça se fait en septembre 1990. En août 1994, j’ai moi -même fait un article, il est intitulé : ‘’Le multipartisme se précipite doucement et dans le développement’’. Je disais que c’est un processus inéluctable historiquement, mais il faut y aller sans croire que le multipartisme résout tous les problèmes. Tout ça a été créé en août septembre 1990 ; il n’y avait même pas d’association. Et de la part de la jeunesse d’un parti unique, c’était osé. Et quand les gens voulaient en faire des débats ou des motifs de sanction contre les responsables des jeunes que nous étions, le président a dit non. Il leur a dit que c’est leur avis, il faut les laisser s’exprimer. C’est pourquoi, lorsque, après le changement de 1991, certains ont dit que la liberté de presse date de 1991 et c’est ce que tout le monde écrit. Même certains d’entre vous qui ne connaissent pas l’historique, je leur dis souvent que ce n’est pas vrai, ce n’est pas vrai. Historiquement, ce n’est pas vrai… » No comment !

Tientigui

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