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Forces et faiblesses de la transition : Les 10 leçons à tirer
Publié le mardi 28 juin 2022  |  L'Alerte
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Dans la suite logique de mes écrits des 02 et 22 mars 2022, puis du 07 mai dernier, je caricaturais la transition comme suit « la transition est une période d’exception pour baliser le terrain. Comme telle, en aucun cas elle ne peut s’étaler dans le temps comme un régime issu d’un processus constitutionnel normal. Bref, la transition se reconnait par sa durée courte. Autrement, une autre appellation s’impose ».





Et conformément à cette ligne d’intervention, la situation nous invite à un certain nombre de questionnement comme suit :

Revoir la gouvernance dans son ensemble oui, mais comment s’y prendre efficacement ?
Avancer vers de lendemains meilleurs oui, mais comment sauvegarder les libertés d’opinions stigmatisées car prônant de stratégies différentes pour y arriver ?
Redistribuer notre carte géostratégique oui, mais comment l’inscrire dans la durée en promouvant l’inclusivité des compatriotes soucieux de la forme ; le fonds étant notre dénominateur commun ?
A la lumière de cette triple question, une posture humble et patriotique (et non chauvine) doit prévaloir en tout lieu et en toute circonstance pour avancer résolument ensemble vers l’horizon béni rendant irréversible la marche communément amorcée.

Dans cette dynamique, il sied de lister les progrès accomplis en termes d’anéantissement des terroristes qui pullulent au septentrion tels des fourmis, de remise en cause de nos partenariats, de retour au positionnement géostratégique de feu Modibo KEITA, le père de l’indépendance….

Cependant, l’arbre ne peut nullement cacher la forêt même s’il est vrai que la branche ne peut se casser dans les mains du caméléon ; dixit feu Mathieu KEREKOU de la République de Bénin.

En effet, la bonne foi à elle seule ne peut résoudre l’équation, surtout celle de gouvernance si complexe et si délicate car s’agissant d’assurer le bien-être de tout un peuple sur une aire géographique donnée tenant compte de sa culture, de son histoire et de la caractéristique de ce peuple. Voilà l’inextricable alchimie de la gouvernance tant la crise en la matière est récurrente voire perpétuelle.

A côté des progrès, examinons les limites. Il s’agit de l’intolérance à divers niveaux qui gagne du terrain notamment en matière d’expression ou d’opinions, toutes choses acquises de haute lutte au Mali à la suite des tragiques évènements de mars 1991 ayant mis fin à la dictature militaire qui régnait.

Autre limite, toute aussi déplorable : c’est l’embargo très nuisible à l’économie avec comme corollaire la régression du pouvoir d’achat des populations. Et cet embargo, bien qu’évitable car lié uniquement à la durée de la transition comme pomme de discorde, perdure et met en péril les fruits des années de labeur des braves compatriotes.

Au finish, la crise qui a fait chuter un Président démocratiquement élu avec comme résultat la mise en place d’un pouvoir de transition qui a fait couler plus d’encre que nulle autre transition au Mali, nous ENSEIGNE DIX (10) LECONS A TIRER

Leçons pour la classe politique : 3 leçons
En lieu et place de jeter de l’anathème sur les partis politiques au rôle constitutionnellement reconnu dans cette gouvernance démocratique, c’est l’heure de l’entre aide pour sortir du gouffre, d’autant que « AM BE NO DON » traduction Nous sommes tous coupables en référence à ce film culte de Falaba Issa Traoré.

Il est évident que cette classe politique soit se remettre en cause à partir de trois leçons car une crise s’avère salutaire si l’on rebondit de plus belle pour ne plus y retomber.

Leçon numéro 1 : S’inscrire uniquement et durablement dans la dynamique de conquête et d’exercice du pouvoir à travers les URNES en investissant dans la formation et l’éducation des citoyens devant servir de militants convaincus de longue durée conformément aux textes régissant les partis. Cela n’est pas une simple assertion, loin s’en faut car dans la pratique, beaucoup de partis, incapables de mobiliser 5% de l’électorat, excellent dans les manifestations de rue pour se faire entendre. Or, il y a le revers de la médaille qui fait que la mauvaise balle lancée se retourne contre l’auteur

Leçon numéro 2 : Mettre à profit les financements publics pour la mise en œuvre d’actions d’envergure afin d’atteindre les nobles objectifs qui sont les leurs et ci-dessous mentionnés dans leçon numéro 3 devant servir de « livret vert » pour chaque parti politique digne de ce nom. En effet, le travail de longue haleine demandé aux partis politiques justifie leur financement qui doit aller à destination, précision plus que nécessaire en ces temps d’épreuve nationale et au vu des pratiques antérieures maintes fois décriées se résumant au peu d’efforts déployés dans l’éducation/sensibilisation.

Leçon numéro 3 : Veiller au renforcement de l’adhésion populaire aux principes et valeurs démocratiques car il y a actuellement de l’enthousiasme d’une partie de la population à voir les militaires comme des sauveurs au détriment des politiques. Or, gouverner, n’est pas le rôle des militaires. Cela revient aux politiques. C’est UNIVERSEL. Là, le travail consiste à renverser cette tendance de par l’éducation approfondie de tous et de toutes aux principes et valeurs démocratiques faisant que la démocratie et le développement riment au bénéfice de l’intérêt général. Ah, c’est là la pierre d’achoppement car véritable sacerdoce découlant de mille et un objectifs parmi lesquels : assurer la prospérité, partager équitablement les dividendes de cette prospérité entre les enfants du pays réduisant du coup l’injustice économique, appliquer convenablement les règles de droit, assurer l’accès à l’emploi pour réduire les chômeurs et les laisser pour compte plus prompts à l’insurrection voire à la rébellion via l’attaque des symboles de la République au lieu d’exercer leur droit de vote, prévenir et lutter contre la corruption autant par les textes de droit que par des actions de renforcement de la citoyenneté et du patriotisme, j’en passe.

Leçons pour la société civile : 2 leçons
Que ce soit en contre-pouvoir ou en complémentarité (selon l’école), cette société civile par essence sans conquête du pouvoir ni exercice doit pouvoir jouer son rôle premier ; et en ces temps de crise et de multiple questionnement apporter sa plus-value au retour rapide de l’ordre constitutionnel normal.

A ce titre, elle a une double leçon à retenir de l’épreuve qui entrave le fonctionnement normal des institutions de la République à savoir :

Leçon numéro 1 : assurer la veille permanente pour le respect de la Constitution autant dans la conquête du pouvoir par les partis politiques que dans l’exercice.

Leçon numéro 2 : renforcer l’effort de formation citoyenne pour l’édification d’Etat de droit, de meilleure connaissance des règles de fonctionnement des institutions de la République.

Leçons pour les forces de défense et de sécurité : 2 leçons
L’interruption de l’ordre constitutionnel place le pays dans des dispositions diplomatiques et sécuritaires si problématiques que nul n’a envie que cela se répète. Fort heureusement et exceptionnellement que 2020 fut différent de 2012 en matière de conquête territoriale par les terroristes et djihadistes écervelés.

Et comme l’a si bien dit notre soldat de la démocratie, feu Président Amadou T. Touré « putschiste n’est pas un qualificatif dont on peut être fier », pour décrire toute la délicatesse et la complexité de la question qui a trait à la gloire certes, mais à quel prix ! Il est donc temps que l’on tire deux leçons de cette dure épreuve que vit le Mali à savoir :

Leçon numéro 1 : retenir une fois pour toute que la direction de la gouvernance est politique et doit rester politique comme c’est le cas de notre voisin le Sénégal.

Pour ce faire, le Mali doit réinventer un autre mécanisme qui puisse « démettre un Président élu qui déraille » sans que les armes ne parlent. C’est un tel Mali au règlement pacifique de la crise de gouvernance au sommet de l’Etat qui doit être légué aux futures générations. Et ça, ce n’est pas de la mer à boire !

Souvenez-vous qu’en dépit de l’existence de cette disposition constitutionnelle interdisant le putsch ou coup d’Etat, l’on n’est point sorti de l’auberge. Imaginons donc la sortie autrement. Et c’est la leçon que nos frères militaires doivent en premier retenir pour se convaincre que la non intrusion des armes dans la gouvernance est loin d’être une règle contre eux ; mais pour l’intérêt général dans lequel ils se retrouvent naturellement.

Leçon numéro 2 : La résolution à longue durée d’une équation se réalise au double niveau politique et militaire au sommet de l’Etat. En termes clairs, nonobstant le fait que le Président de la République (civil élu) est le chef suprême des armées, à un moment donné de la crise, la démocratie permet que ce double niveau s’asseye pour le bien du pays et décide de la conduite à tenir dans le strict respect des règles pré établies. Il n’y a là rien de chimérique ! C’est bien faisable, d’autant que ce n’est pas sous tous les cieux que les putschs surviennent. Et pourtant, ce ne sont pas des difficultés qui manquent ici et ailleurs. C’est la matière grise qui agit et non les armes pour le bien commun.

Leçons pour la communauté internationale, notamment sous régionale : 3 leçons
Leçon numéro 1 : adapter les interventions à la nature des conflits et à l’histoire de chaque pays. Exemple : MONUSCO en RDC, MINUSCA en RCA et MINUSMA au Mali ne peuvent s’apparenter dans l’opérationnalisation des attributions sur le terrain par double souci d’efficacité et de résultats tangibles.

Leçon numéro 2 : aider le pouvoir élu à répondre aux aspirations de son peuple sous divers angles, outre le sécuritaire : santé, économie, emploi, justice… ; assurant ainsi la stabilité des institutions démocratiques en place.

Leçon numéro 3 : ne pas occulter la « notion de souveraineté » des pays cibles d’interventions internationales selon laquelle le droit de dire oui ou non à une intervention, fut-elle de la communauté internationale, demeure en vigueur. En termes clairs, l’acceptation ou le refus d’une force internationale est un droit pour chaque pays.

CONCLUSION : Pas d’alternative à la gouvernance démocratique pour la simple raison que la démocratie, bien que perfectible, n’échoue jamais. Seulement, les démocrates peuvent trébucher ; ce qui est normal.

Pour notre cas actuel, grand étonnement. Bon sang ! Quelle mouche a piqué le Mali qui a occupé la TRES COIVOITEE PRESIDENCE DE LA COMMUNAUTE DES DEMOCRATIES durant deux ans (mai 2005-novemvre 2007) au nom du continent africain avant de passer le flambeau à l’Ukraine en avril 2008 pour se retrouver dans de si mauvais draps ?

L’aura de nos avancées démocratiques aura certainement pâli, et de si cruelle façon, sous le joug impérial des appétits déstabilisateurs mettant en insécurité voire en péril notre existence en tant que GRANDE NATION autant par la superficie que par la glorieuse histoire. Explication plausible mais pas suffisante.

Vive le Mali démocratique et indivisible ! Qu’ALLAH Soub’hanawatalah protège. Amen !

Bamako, le 11 juin 2022

Mamadou Fadiala KEITA, Juriste

Coordonnateur de l’ONG AJCAD

Président de COMED

Président de COPER

Organisateur en chef et Conseiller Permanent Cri-2002

Source : L’Alerte
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