Arrêté le 6 septembre 2021 alors qu’il se rendait à l’université où il avait repris ses activités d’enseignant-chercheur à Bamako, à la suite du renversement de Bah N’Daw, Dr Kalilou Doumbia, l’ancien secrétaire général de la Présidence vit jusqu’ici le pire des cauchemars qu’un juriste chevronné n’aurait jamais prédit. De la sécurité d’État en passant par la gendarmerie pour des enquêtes, celui qui a bénéficié d’un non-lieu dont Le Soft a pu visiter l’ordonnance, se retrouve encore maintenu en prison malgré son blanchiment au bout de dix mois d’enquêtes et de détention.
Dans l’enceinte de l’université des sciences juridiques et politiques de Bamako, les étudiants en droit qui ont pu effectuer le déplacement à la maison centrale d’arrêt (MCA) de Bamako pour prendre les nouvelles de leur brillant professeur, décrivent et dénoncent la situation qu’ils qualifient d’« acharnement » dont fait les frais cet intellectuel de haut niveau.
Si pour ces étudiants et collaborateurs du monde du droit qui attestent l’intégrité et le patriotisme de l’homme, « Dr Kalilou est justiciable », ils ne renient également pas l’obligation qu’il pourrait avoir à rendre des comptes s’il avait à le faire. Nul n’étant au-dessus de la loi, bien entendu !
Par contre, ce qui est pour eux inacceptable, c’est le fait que Dr Kalilou Doumbia ait été au début de l’affaire « enlevé, séquestré, torturé et détenu pendant plusieurs mois dans un lieu tenu secret ».
En se basant sur les arguments d’enlèvement, de séquestration et de torture, un étudiant en droit en larmes, rappelle l’article 3 de la constitution qui dispose que « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des sévices ou traitements inhumains, cruels, dégradants ou humiliants ». Or, « en voyant Kalilou en prison, la question sur les violences physiques et morales qu’il a subies, ne se pose même », nous confie dans l’anonymat, un juriste qui entrevoit la nullité du dossier, « eu égard aux violations répétées dans la procédure depuis le début », selon sa propre expression.
Même son de cloche du côté du collectif de ses avocats qui relèvent pour leur part, « des irrégularités flagrantes, notamment la séquestration prolongée et à la torture subie par certains des inculpés, pendant deux mois ».
Sur l’état de santé des inculpés dont Dr Doumbia, les avocats confirment dans leur note rendue publique, « le refus du juge d’instruction, d’autoriser les inculpés à se faire examiner par un médecin de leur choix, en violation de l’article 10 de la Constitution ». Pire, les avocats précisent surtout que ces sévices évoqués sont pourtant suffisamment documentés par des certificats et des témoignages poignants, ne laissant aucun doute sur leur réalité.
Malgré la situation intenable de leur client, les avocats de Dr Kalilou ont récemment cru à un épilogue. Car, l’ordonnance de non-lieu, de requalification et de transmission de pièces, rendu par le juge d’instruction du 3ième cabinet du Tribunal de Grande Instance de la Commune VI du District de Bamako, ne confirme aucune charge sur les faits supposés d’« association de malfaiteurs et de tentative de complot de renversement du gouvernement légal en République du Mali », contre Dr Doumbia. Mieux, il nous est revenu que tant à l’enquête préliminaire qu’à l’instruction judiciaire, « Kalilou Doumbia a catégoriquement nié les faits qui lui sont reprochés »
Mieux encore, dans l’ordonnance notifiée au Procureur de la République le 17 juin dernier, il ne ressort nulle part du dossier, la preuve que Kalilou Doumbia a pris part dans une « association ou entente dans le but de préparer ou de commettre un attentat contre les personnes ou les propriétés », et n’a participé ni de près ni de loin à une « tentative de complot de renversement du gouvernement légal en République du Mali ». Ce qui a permis au juge d’instruction de conclure qu’il n’y a pas de charges suffisantes contre Kalilou Doumbia. D’où le non-lieu qui, en pareille situation, met fin aux poursuites.
A leur grande surprise, les avocats de Kalilou Doumbia qui s’attendaient à sa mise en liberté sans condition, apprennent que le Parquet général a relevé appel. Une mutation qui fait dire à un proche de l’homme que « tout cet acharnement est dû au fait que Dr Kalilou a refusé d’entrer dans le gouvernement Choguel après le second coup d’État du 24 mai 2021 », malgré la demande expresse du Colonel Président Assimi Goïta.
Dans la note d’information qu’il a rendue publique le 1ier juillet dernier, le collectif d’avocats des inculpés dont Dr Kalilou Doumbia, prend acte de la mise hors cause par le juge du Docteur Kalilou DOUMBIA, ancien Secrétaire Général de la Présidence du Mali et de Moustapha DIAKITE, commissaire de Police, en charge du commissariat de Kayes, au moment des poursuites, sur demande du Parquet d’attache, formalisée par son réquisitoire. Car appuient-ils, que « c’est au vu des pièces que le parquet du Tribunal de Grande Instance de la commune VI s’est consciencieusement vu obligé de demander la mise hors de cause des deux inculpés, dans son réquisitoire ».
Ne voulant pas se laisser faire, ceux qui prévoient de tenir un point de presse pour mettre à nue une procédure qu’ils veulent nulle, informent qu’ils en ont immédiatement, après le parquet, suivant la logique, relevé appel pour que l’affaire soit réexaminée par la Chambre d’Accusation de la Cour d’appel de Bamako. Mais en attendant, Dr Kalilou Doumbia croupit en prison.
Affaire à suivre…