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Imbroglio : Le «Che» sauvé par sa bonté du cœur
Publié le mercredi 6 juillet 2022  |  Le Matin
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Fafré avait fait semblant de jouer le jeu lors de son entretien avec le «Che» sur la nouvelle politique de management de la Malienne de l’Electricité Pour Tous (MEPT). Mais, en réalité, il s’était empressé d’aller voir son féticheur attitré pour jeter un sort à ce dernier pour l’éloigner définitivement de la boîte. Et le jeune cadre a failli effectivement perdre la raison et la vie. Heureusement, le bienfait n’est jamais perdu. C’est son bon cœur qui le sauva !





Heureusement, c’est un concours de circonstance qui allait sauver le technocrate. A sa nomination, il remarqua un Vieux gardien qui normalement devrait se reposer vu son âge. Par le canal de Batio, il chercha à savoir pourquoi il faisait encore ce pénible travail de vigile. Il apprit alors que le vieux était l’une des victimes des privatisations imposées dans les années 80-90 par le FMI et la Banque mondiale. Il avait été compressé et spolié de ses droits par ceux qui étaient censés défendre leurs droits en tant que syndicalistes.

Pour nourrir sa nombreuse progéniture, il se réfugia dans un champ. Et comme un malheur ne vient pas seul, il fut aussi dépossédé de ce champ par des prédateurs fonciers. Il ne dû son salut qu’à une âme généreuse qui usa de son influence pour lui trouver un poste de vigile. Ému par tant d’injustice, il lui proposa de travailler pour lui. Il avait hérité de 5 hectares et y avait beaucoup investi à distance. Mais, il n’était pas satisfait de l’exploitation. Il était clair que ses employés abusaient de sa confiance. Il responsabilisa le vieux en lui payant le double de son salaire de vigile. Il lui laissa aussi un hectare qu’il pouvait cultiver ou utiliser comme jardin maraîcher en saison sèche pour nourrir sa famille.

Pour le vieux gardien, Aboubacar Sidiki était un Ange providentiel que le ciel lui avait envoyé. Passionné de maraîchage, ce dernier passait souvent le week-end chez lui, au champ. C’est pourquoi il était intrigué de ne plus le voir. Au début, il se dit qu’il devait être trop chargé dans la semaine et épuisé le week-end. Après un mois sans le voir, il s’informa auprès de Batio et appris avec consternation ce qui arrivait à son bienfaiteur.

Dans son village, il avait gardé de très bonne relation avec un chasseur très versé dans les scientifiques occultes. Mais, contrairement à «Samprin Djigui», il s’en servait rarement et généralement pour un noble usage. C’est souvent face à des cas désespérés comme «Le Che» qu’il acceptait de recourir à cet héritage. Quand le gardien lui expliqua qui était le jeune cadre pour lui et le mal qui le rongeait à cause de la méchanceté humaine, il ne se fut pas prier pour intervenir. Il fit venir le jeune cadre et le garda avec lui dans son hameau.

Au bout de 7 jours de traitement, il recouvra entièrement ses esprits. Avant de le laisser partir, il lui recommandât des sacrifices à faire dont une génisse rouge. Il lui indiqua quand il devait reprendre le travail, comment il devait procéder pour briser le sortilège et neutraliser Fafré.

Le jour J, seul le très dévoué et fidèle Batio était informé de sa reprise. Il arriva avant tout le monde en taxi pour surprendre son adversaire. Une importante réunion se tenait ce jour pour évaluer les réformes structurelles en cours. Il a attendu que tout le monde soit présent dans la salle avant de se présenter sans se faire annoncer. La surprise fut de taille car personne ne l’attendait ce jour. Il était même question de nommer son adjoint à sa place…

Quand il rentra, ce dernier a voulu se lever pour lui céder son fauteuil

– Je vous en prie. Continuez la réunion comme si je n’étais pas là. Je ne suis qu’observateur aujourd’hui. N’est-ce pas Doyen Fafré ?

Sentant tous les regards sur lui, il murmura des propos inintelligibles. Avant la fin de la réunion, il fit semblant d’aller aux toilettes pour s’éclipser. Il s’enferma dans son bureau toute la journée en essayant de comprendre ce qui n’avait pas marché.

-C’est impossible qu’il soit guéri pour venir me narguer. Je rêve sans doute. Il n’y pas de temps à perdre, il faut je que retourne voir Samprin Djigui.

Sa décision fut prise. La nuit aux environs de minuit il prit la route comme il en avait l’habitude. A mi-chemin il fut pris dans un terrible orage. Et juste avant d’atteindre le hameau du féticheur, sa V8 fut foudroyée. Il n’eut pas visiblement le temps de comprendre ce qui lui arrivait. C’est le lendemain matin que des visiteurs ont signalé au féticheur une voiture calcinée. Après vérification, on lui annonça que l’occupant sans vie était Fafré. Il lui avait annoncé sa visite en catimini et il l’avait attendu une partie de la nuit. Mais il n’était pas surpris de cette fin tragique. Avec la permission de la famille du défunt, il enterra le corps calciné dans son hameau et laissa les proches faire leur deuil dans la capitale.

Avec cette fin tragique de Fafré, «Le Che» venait de vaincre le plus sérieux des obstacles sur son chemin. Il pouvait mener ses réformes comme il l’attendait. Au bout de deux ans, la Malienne de l’Electricité Pour Tous (MEPT) était passée au vert. Elle avait réussi non seulement à éponger des dettes, mais elle n’était même plus déficitaire dans sa production de courant. Une électricité vendue à prix raisonnable parce que le jeune DG avait réussi aussi à considérablement réduire le coût de production grâce à la promotion des énergies renouvelables.

En effet, comme promu, les employés licenciés et qui souhaitaient être formés l’ont été. Et ils ont par la suite constituées deux sociétés de production d’énergie solaire soutenues et financées par des bailleurs de fonds qui faisaient confiance à Aboubacar Sidiki. Ces deux sociétés sont devenues des partenaires stratégiques de la Malienne de l’Electricité pour Tous à qui elles vendaient l’électricité à un prix concurrentiel.

Mais, en manager avisé, «Le Che» était convaincu que les résultats obtenus pouvaient être éphémères. Et cela d’autant plus que la volonté politique tient à peu de choses dans son pays. Et surtout qu’il n’avait jamais accepté de s’engager dans un parti politique. Tout changement de régime pouvait le fragiliser et l’exposer au retour en force de ceux qui continuent de le combattre dans l’ombre pour leur avoir coupé l’herbe sous les pieds.

Sans compter qu’il était de ceux qui pensaient que son pays avait réellement besoin d’une refondation de l’Etat pour améliorer la gouvernance du pays dans le sens des attentes profondes des populations. Une refondation qui passe aussi nécessairement par le formatage de l’Homme malien. Autrement, le Mali Kura ne sera bâti que par des «Maliens Kuraw» (les nouveaux Maliens), des citoyens au sens noble du terme prêts à sortir de leurs zones de confort pour se remettre en question. Et surtout à assumer leur part de sacrifices qu’impose tout changement.

Quelles que soient sa conviction, sa compétence et sa détermination patriotique, ce formatage est au-dessus de l’engagement d’un seul Malien. Seule une prise de conscience collective peut permettre d’y parvenir. Après avoir brillamment réussi sa mission, il rendit le tablier tout en s’assurant que celui qui allait lui succéder soit également un homme choisi par les PTF pour consolider les acquis.

Déchargé, il s’est beaucoup investi dans son champ/ferme où il pratiquait l’agriculture et le maraîchage en toute saison, l’élevage… Aujourd’hui, il est l’un des plus grands agro-businessmen du continent. Ce qui ne l’empêche pas d’être un consultant très sollicité sur les questions des politiques de développement !

Fin

Bolmouss

Source : Le Matin
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