Le Mali est victime des mauvaises politiques agricoles mises en œuvre depuis la fin de la première République (19 novembre 1968). Sinon nous avons tellement de potentiels agricoles que le pays peut-être non seulement autosuffisant, mais aussi exportateur de céréales. Notre pays est l’un des grands producteurs de riz en Afrique.
Avec une production record de 2,451 millions de tonnes de riz pour la campagne rizicole 2015-2016, nous étions même devenus le 2e producteur ouest-africain de riz derrière le Nigeria à la tête du peloton sur le continent. Cette production (2015-2016) a chuté à 1,7 million de tonnes pour la campagne agricole 2021/22.
Et cela, officiellement, en raison d’une diminution des superficies récoltées et d’une réduction des rendements. Le financement a-t-il été aussi à hauteur de souhait ? Pour la campagne 2015-2016, certaines sources indiquent que le gouvernement avait investi environ 55 milliards de francs CFA dans la fourniture d’engrais aux producteurs de riz. N’empêche que notre pays a produit 10,4 millions de tonnes de céréales en 2020-2021. Une performance qui devrait lui permettre d’enregistrer un excédent de 3,9 millions de tonnes de céréales et de reconstituer ses stocks stratégiques.
Mais personne ne sait où va cette production puisque le pays continue à importer au moins 10 % de sa consommation de riz pour faire face à la demande nationale. Quel que soit le niveau de production céréalière, le pays est contraint d’importer pour satisfaire ses besoins et les consommateurs ne sont pas à l’abri des hausses de prix savamment orchestrées par des opérateurs économiques véreux. En réalité, une grande partie du problème se trouve au niveau de la commercialisation qui ne profite qu’aux seuls opérateurs céréaliers.
Ceux-ci profitent généralement du manque de moyens des paysans pour leur proposer leurs appuis financiers leur permettant d’acquérir des équipements et des intrants. Et en contrepartie, ils s’engagent à leur vendre leur récolte. Et en cas de mauvaise pluviométrie, le paysan se retrouve pris à la gorge avec une production insuffisante, mais qu’il est contraint de céder à son créancier. Le hic, par la suite, c’est que certains n’ont même plus de quoi nourrir leurs familles.
Ayant fait main basse sur une grande partie de la production nationale, ces opérateurs créent des pénuries artificielles, du riz notamment, afin de pousser l’Etat à exonérer des quantités importantes à importer. Quant aux autres céréales, elles sont exportées dans des pays voisins où ils en tirent des prix conséquents. Au finish, ce sont ces opérateurs céréaliers qui bénéficient des investissements consentis par l’Etat pour augmenter la production agricole nationale. L’Etat est donc le dindon de la face au même titre que les producteurs et les consommateurs.
Jusqu’à l’imposition du libéralisme à notre pays les Institutions de Bretton Woods (FMI et Banque mondiale), de l’Office des Produits Agricoles du Mali (OPAM, créé par la Loi n°65-07/AN-RM du 13 mars 1965) avait joué un rôle essentiel pour régulariser le marché céréalier. En effet, après plusieurs réformes institutionnelles et organisationnelles, l’OPAM a eu comme missions principales de constituer, gérer et conserver un Stock national de sécurité (SNS) permettant d’intervenir, en cas de besoins, sur toute l’étendue du territoire national ; assurer l’approvisionnement des zones déficitaires sur la base d’un plan national de ravitaillement ; gérer et distribuer les aides alimentaires en céréales dans le cadre des conventions conclues avec les partenaires.
Par contre, de nos jours, la régulation du marché céréalier pour maintenir les prix à un niveau raisonnable lui échappe. Ce qu’il est urgent de corriger. Et cela d’autant plus qu’il a aujourd’hui presque les mêmes prérogatives que le Commissariat à la sécurité alimentaire. Il faut donc revoir la mission de l’OPAM en la focalisant sur la régulation du marché céréalier à travers un système garantissant avant tout les intérêts de l’Etat, surtout des paysans et des consommateurs !