Depuis quelques semaines, les autorités de la transition se sont lancées dans un projet de rédaction d’une nouvelle constitution pour le Mali. Une commission d’experts a été officiellement installée pour la cause. Même si certains mouvements et associations se disent favorables à des réformes politiques, le nouveau projet d’élaboration d’une nouvelle constitution se trouve confronté déjà à une contestation. La légalité des autorités actuelles est mise en cause.
CNAS-Faso Hèrè demande de ne pas engager le peuple dans une aventure sans issue et des convulsions sociopolitiques dont le Mali n’a pas besoin
En effet, réuni en session ordinaire le 18 juin 2022 à son siège à Hamdallaye (Bamako), le Bureau Politique National de la CNAS-Faso Hèrè (Convention Nationale pour une Afrique Solidaire) a procédé à une analyse approfondie de la situation politique, sécuritaire, économique et sociale du Mali.
En particulier, il a noté que, après l’adoption d’une loi électorale cachant mal des velléités de confiscation du pouvoir, les autorités actuelles issues du double coup de force militaire du 18 août 2020 et du 24 mai 2021 ont engagé un processus visant à doter notre pays d’une” nouvelle Constitution “. Buttées à l’impossibilité juridique de procéder à une révision de la Constitution démocratique du 12 janvier 1992, elles pensent pouvoir contourner cet obstacle insurmontable en tentant d’élaborer une “nouvelle Constitution”.
Rappelant ses nombreuses mises en garde antérieures, la Direction Nationale du Parti de l’avant-garde militante révolutionnaire du Peuple malien réitère son opposition ferme et inébranlable à toute manœuvre visant à jeter la Révolution démocratique et populaire du 26 mars 1991 dans les oubliettes de l’histoire au profit de forces nostalgiques de l’ordre sociopolitique colonial, pro-bonapartistes et hostiles à la laïcité de l’État, à l’unité nationale et à l’intégrité territoriale du Mali.
Tout en notant que la Constitution démocratique du 12 janvier 1992 a résisté et survécu aux coups de baïonnette de 3 coups d’État militaires successifs en l’espace de 10 ans, le Bureau Politique National de la CNAS-Faso Hèrè demande instamment aux autorités de renoncer définitivement à leur projet d’élaboration d’une “nouvelle Constitution” afin de ne pas engager notre Peuple et son cadre républicain et démocratique dans une aventure sans issue et des convulsions sociopolitiques dont le Mali n’a pas besoin. Le Peuple militant du 22 septembre 1960, du 20 janvier 1961, du 25 mai 1963 et du 26 mars 1991 est déterminé à faire échec à ce nouveau plan des forces de la Restauration.
Tout en notant que la Constitution du 12 janvier 1992 n’est pas un Livre Saint, la Direction Nationale du Parti de l’Avant–garde militante et révolutionnaire du Peuple malien maintient qu’à ce jour, au-delà de clichés désuets ou de critiques à l’emporte-pièces par des adeptes d’une fantasmagorique 4ème République présentée abusivement comme une panacée, personne n’a pu avancer un seul argument valable pour justifier quelque changement que ce soit dans la Loi Fondamentale du Mali.
Ce n’est ni la Constitution, ni la démocratie qui ont échoué, mais des hommes et des femmes bien connus, précisément pour avoir violé et laissé violer la Constitution.
Comme l’a clairement démontré l’un de nos Présidents d’honneur dans un appel “vers un Pacte de Refondateur global ” lancé dès le 2 février 2002, la refondation de notre État démocratique n’exige nullement une quelconque révision constitutionnelle, à plus forte raison une soi-disant” nouvelle Constitution”.
Le régime de Transition doit plutôt se concentrer sur la mise en place rapide et sans atermoiements, ni subterfuges des mesures propices à un retour durable à l’ordre constitutionnel démocratique issu de la Révolution démocratique et populaire du 26 mars 1991. La reconstruction d’une Armée républicaine devant résister au chant de sirène de la tentation bonapartiste et se consacrant exclusivement à ses missions régaliennes est une priorité vitale pour les Forces patriotiques, progressistes, républicaines et démocratiques.
L’Adéma-PASJ ne cache pas son opposition
L’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (ADEMA-PASJ), lors d’une conférence-débat organisée le jeudi, 14 juillet 2022, à la Maison de la Presse, pour débattre du projet d’élaboration de la nouvelle constitution, a été claire : le niet du parti.
Me Kassoum Tapo, vice-président, chargé de la Réconciliation et de la Cohésion sociale du parti de l’abeille, l’ancien bâtonnier et ancien ministre de la justice réprésentant son parti lors de cette rencontre de haut niveau, s’est braqué contre le projet d’élaboration de la nouvelle Constitution. « Quel est l’intérêt d’élaborer une nouvelle Constitution pour les Maliens ? Et quelle légalité ont les autorités actuelles à conduire ce processus ? »
Pour l’ancien Garde des Sceaux, ministre de la justice, la Constitution actuelle autorise seulement la révision constitutionnelle (partielle ou totale) sur proposition du Président de la République soumise au vote de l’Assemblée nationale. « Elle prend effet avec le vote des 2/3 des députés ».
Parlant du vote de l’Assemblée nationale, Me Tapo se pose également la question de la légalité actuelle du président de la Transition qui n’est pas élu et non plus les membres du Conseil National de Transition (CNT).
En plus, pour lui, Assimi Goïta n’ayant pas la qualité de « Président de la République » ne bénéficie pas non plus de l’autorité d’appeler à une simple révision, à fortiori la rédaction d’une nouvelle Constitution.
Par ailleurs, il a salué l’adoption de la nouvelle loi électorale qui a fait l’unanimité au sein de la classe politique. De ce fait, il a vivement remercié le CNT pour le travail remarquable qu’il a eu à abattre en associant l’ensemble du peuple malien.
Pour Me Tapo, l’Organe unique des élections n’est autre que la CENI renforcée. Toutefois, il dit adhérer à la décision de confier à l’Administration l’organisation matérielle et technique des prochaines élections.
Pour sa part, Makan Moussa Sissoko, constitutionnaliste, également opposé à ce projet, rappelle que « la Constitution de février 1992, qui n’a pas été suspendue, n’autorise que la révision constitutionnelle et non la rédaction d’une nouvelle constitution ». Pour lui aussi, les autorités actuelles n’acquièrent pas de légalité pour mener ce processus. Il a déploré quelques imperfections de la nouvelle loi électorale, notamment son article 155 qui parle de la candidature des militaires. Il dénonce l’individualisation de la loi en faveur d’une couche.