BAMAKO, 28 juin 2012 (AFP) - Les islamistes qui ont pris mercredi le contrôle total de la ville de Gao (nord-est du Mali) après de violents combats avec des rebelles touareg ayant fait au moins 20 morts, ont organisé des patrouilles dans la nuit et arrêté des civils armés, ont indiqué jeudi des témoins à l`AFP.
Les islamistes du Mouvement pour l`unicité et le jihad en Afrique de l`Ouest (Mujao) ont patrouillé toute la nuit de mercredi à jeudi dans les rues de Gao et ont procédé à l`arrestation d`au moins quatre civils en possession d`armes, selon ces témoins.
La situation était calme dans la ville jeudi, au lendemain des violents combats entre les combattants du Mujao et les rebelles touareg du Mouvement national de libération de l`Azawad (MNLA).
Ces derniers ont subi une lourde défaite, perdant leur quartier général pour tout le nord du Mali, installé dans le palais du gouverneur, ainsi que le camp militaire qu`ils contrôlaient près de l`aéroport.
Le bilan des combats est lourd: au moins vingt morts et quatorze blessés, essentiellement des combattants. Jeudi matin, deux corps gisaient encore à terre à proximité du gouvernorat, selon des témoins.
Le secrétaire général du MNLA, Bilal Ag Achérif, a été blessé pendant les combats et hospitalisé mercredi à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. "Il a notamment reçu des éclats d`obus" mais se portait "mieux" jeudi, selon une source hospitalière.
Deux anciens colonels de l`armée malienne passés à la rébellion, Bouna Ag Tahib et un certain "Wari", ont été tués, selon des témoins qui ont affirmé que "plusieurs blessés" du MNLA ont été transférés jeudi en Algérie pour y être soignés.
"Au total, 41 personnes blessées par balle ont été prises en charge à l`hôpital" de Gao "qui est soutenu par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) depuis le mois d`avril", a affirmé le CICR dans un communiqué transmis à l`AFP, qui ne mentionne pas de bilan concernant les morts.
Ces blessés ont été recensés sur deux jours, mardi et mercredi. L`un d`eux a été évacué "à Niamey, au Niger voisin, pour une intervention chirurgicale spécifique", selon l`ONG. Les autres blessés "reçoivent des soins d`urgence à l`hôpital de Gao. (...) Le personnel médical a pu faire face à cet afflux soudain de blessés et se tient prêt à toute éventualité", a précisé Susanna Cristofani, coordonnatrice médicale du CICR pour le Mali et le Niger.
Moussa Salem, un combattant du MNLA a affirmé à l`AFP qu`il était faux de dire que le camp militaire proche de l`aéroport était entièrement contrôlé par le Mujao. "Nous avons toujours le contrôle d`une partie du camp", a-t-il dit, n`excluant pas une contre-offensive du MNLA.
Information démentie par Adnane Abu Wali Sahraoui, un porte-parole du Mujao. "Nous sommes dans le camp militaire du MNLA, nous contrôlons même l`aéroport", a-t-il dit à l`AFP, ajoutant: "Tout est sous notre domination".
Selon lui, "le MNLA a complètement quitté Gao" et "nous les poursuivrons partout jusqu`à la défaite finale de ce mouvement". Le porte-parole a affirmé que le Mujao détenait "plusieurs prisonniers", sans en préciser le nombre.
Une colonne d`une dizaine de véhicules remplis de membres d`un autre groupe armé islamiste, Ansar Dine (Défenseurs de l`islam), a quitté jeudi matin Kidal, autre grande ville du Nord-Est tenue par les islamistes, pour Gao, a appris l`AFP de sources concordantes.
Depuis fin mars/début avril, les villes et régions administratives du nord du Mali --Tombouctou, Kidal et Gao-- sont tombées aux mains du Mujao et d`Ansar Dine, soutenus par Aqmi, du MNLA et de divers groupes criminels.
Cette chute de plus de la moitié du territoire malien a été précipitée par un coup d`Etat qui, le 22 mars, a renversé le président Amadou Toumani Touré.
Avant sa défaite à Gao, le MNLA, mouvement laïc qui a déclaré unilatéralement l`indépendance de l`Azawad (nord du Mali), avait déjà été marginalisé dans plusieurs localités, en particulier à Tombouctou contrôlée par Ansar Dine et où ce groupe applique la charia, la loi islamique. Ansar Dine et le Mujao veulent imposer la charia à tout le pays.