La Chicha (Narguilé) ou tout autre appareil similaire est proscrite au Mali notamment son importation, sa distribution, sa vente et son usage. L’annonce a été faite par un arrêté interministériel signé par des chefs des départements de la Sécurité et de la Protection Civile, de la Justice et des Droits de l’Homme, de la Santé et du Développement Social, de l’Economie et des Finances, de l’Industrie et du Commerce, et de la Jeunesse et des Sports, chargé l’Instruction Civique et de la Construction Citoyenne. Un arrêté qui n’a pas manqué de susciter des réactions, à la fois de réjouissance et d’indignation.
« Il est interdit l’importation, la distribution, la vente et l’usage de la Chicha (Narguilé) ou tout autre appareil similaire sur toute l’étendue du territoire national », tel est le 1er article de cet arrêté interministériel portant interdiction de l’importation, de la distribution, de la vente et de l’usage de la Chicha (Narguilé) ou tout autre appareil similaire du 15 Août 2022.
En définition, Chicha ou Narguilé est tout objet, appareil ou dispositif sous forme de pipe à eau qui permet de fumer du tabac grâce à un système d’évaporation de l’eau. Et la pipe à eau proprement dite est l’appareil composé de plusieurs parties, notamment la cheminée, le bol supérieur, le réservoir, la pipe immergée et le tuyau.
Depuis ce lundi 15 Août, elle (Chicha) est interdite au Mali et considérée comme infraction. Selon l’article 3 de cette décision, toute personne qui se rend coupable de la production ou de l’importation de la Chicha ou tout autre appareil similaire, est punie d’un emprisonnement de 1 à 10 jours et d’une amende de 300 à 18.000FCFA. Aussi, toute personne qui se rend coupable de la commercialisation de la Chicha ou tout autre appareil similaire est punie d’une amende de 300 à 10.000FCFA.
Toujours dans cet article, toute personne qui se rend coupable de la détention de la Chicha ou tout autre appareil similaire est punie d’emprisonnement de 1 à 10 jours et d’une amende de 300 à 10.000FCFA. Enfin, toute personne qui se rend coupable de l’usage de la Chicha ou tout autre appareil similaire est punie d’un emprisonnement de 1 à 10 jours et d’une amende de 300 à 10.000FCFA.
« Toutefois, chacune des sanctions précitées est suivie de la confiscation et la destruction de la Chicha ou de l’appareil similaire » conclut ledit article.
D’ailleurs, cette décision formule également, dans son 4ème article, que les importateurs, les distributeurs, les propriétés, colateurs ou gérants des bars, restaurants, night-club et autres espaces dits ‘’Chicha clubs’’ ou ‘’Chicha House’’ aménagés à cet effet, disposent d’un délai de 6 mois à compter de l’entrée en vigueur du présent arrêté pour se conformer à ladite règlementation. Par ailleurs, ce sont le Directeur de l’Office Central des Stupéfiants, le Directeur Général des Douanes, le Directeur Général de la Police Nationale, le Directeur Général de la Gendarmerie Nationale et le Directeur Général du Commerce et de la Concurrence qui sont chargés de l’application rigoureuse de ce règlement.
Une décision douce et aigre !
Ce nouveau règlement de l’interdiction de la Chicha a été accueilli avec satisfaction par de nombreux internautes sur les réseaux sociaux et des jeunes de certains quartiers de Bamako. Cela se justifie à travers des réactions positives exprimées depuis la publication de cette décision des autorités de la transition. Comme le cas pour Bassirou Traoré, Professeur d’anglais qui a manifesté sa joie sur la prise du présent arrêté. « Ce produit n’est pas seulement nuisible à la santé mais aussi c’est l’un des facteurs de la délinquance juvénile. Beaucoup de jeunes mélangent d’autres substances à la Chicha pour se droguer » a-t-il déclaré.
L’Etat a très bien fait de prendre cette décision, affirme le Prof d’anglais. D’ailleurs qu’il (l’Etat) a pris du retard par rapport à cela mais mieux vaut tard que jamais. Outre cela, étant un éducateur, il a révélé que la Chicha fait partie des causes de l’échec scolaire de beaucoup d’enfants aujourd’hui. « Vous trouverez des jeunes adolescents qui chôment les cours pour aller louer des appartements et passer toute la journée à fumer ce produit. Si cela venait d’être interdit, je ne peux que m’en réjouir» a-t-il ajouté. Avant de lancer un message aux Autorités en ces termes : « Il ne faut pas que ça soit comme le cas de la drogue hein, tout le monde sait que la drogue est interdite mais dans Bamako tout le monde sait où se pratique le commerce de la drogue. J’invite les jeunes à s’intéresser aux études parce qu’ils sont l’avenir du pays…».
Pour Yaya Keïta alias ‘’Obama’’, membre du CNJ-CII, l’arrêté sur l’interdiction de Chicha par les autorités au Mali tombe à point nommé dans la mesure où la jeunesse était en train de se perdre à cause de l’usage de ce produit. « La Chicha nuit à la santé voire tue. Je pense qu’il est temps pour les jeunes d’être responsables pour travailler dans le but de la construction du Mali. Vive la jeunesse sans Chicha » a clamé M. Keïta.
La mère de famille, Djénéba Dramé était en pleine allégresse en apprenant cette nouvelle. D’après elle, la consommation du Narguilé était devenue une tare de la société puisqu’on ne pouvait pas dépasser un groupe de jeunes sans voir ce produit à côté d’eux, chose qui inquiétait plusieurs parents à la fois. « Qu’Allah bénisse le président Assimi Goïta et le Gouvernement » s’est-elle réjouie.
L’interdiction au Mali de la Chicha est salutaire et l’Etat est dans son rôle, selon Dr Oumar Plea, enseignant-chercheur et consultant en système d’information géographique (SIG). Selon son analyse, les autorités ont étudié sérieusement les enjeux et les impacts de ce produit dans la société avant de prendre cette décision. « Je pense que la consommation de la Chicha est de plus en plus décriée partout à travers le monde. Donc tout Etat soucieux du devenir de sa population jeune devait s’assumer. Par exemple : certains pays producteurs de la machine à Chicha, notamment la Turquie, l’ont interdit » a soutenu Dr Plea. Sans manquer d’inviter les jeunes à comprendre qu’il s’agit pour leur bien-être. Qu’ils doivent collaborer à faciliter la tâche aux autorités. « C’est une question de discipline individuelle et collective » tranche-t-il.
A signaler que cette décision des autorités n’a pas fait que des heureux parmi la population malienne. De nombreux internautes estiment qu’il s’agit d’une mesure inappropriée et discriminatoire. Cela pour la simple raison que la chicha n’est pas plus nocive que d’autres produits (cigarette et alcool) comme on a tendance à le faire croire. Que cette interdiction va plutôt augmenter la consommation et la commercialisation de ce produit dans le marché noir. Toute chose qui favorisera le trafic des ingrédients très nocifs pour la chicha à l’attention des accrocs maliens. De même, que de nombreux jeunes trouvaient leur salut dans la promotion des espaces, tels ‘’les chicha-house ou chicha club’’, ainsi que dans l’importation des matériels et produits de Chicha. Dans cette optique, le Collectif des Distributeurs de la Chicha au Mali a organisé une conférence de presse le mercredi 17 Août dernier pour plaider auprès des Autorités, une éventuelle réglementation au lieu de l’interdiction pure et simple, comme le cas de la Cigarette. Seront-ils entendus ?