L’Institut national de Formation judiciaire (INFJ) Me Demba Diallo, a été le cadre d’une rencontre entre différents acteurs dont le dénominateur commun est leur intervention au profit des mineurs, « en conflit avec la loi » ou « en danger moral et matériel ». Officiers de police judiciaire (OPJ), Magistrats (poursuivant et du siège), agents sociaux et journalistes étaient en formation sur la protection des mineurs, dans le cadre du projet UNITAR/INFJ « Renforcement des capacités du système judiciaire et promotion de l’Etat de droit au Mali ». La formation qui a intéressé les quatre corps de métier s’est déroulée du 22 au 26 août en présence de participants de plusieurs localités du Mali dont Mopti, Fana, Koulikoro, Ségou, Bamako.
En s’ouvrant ainsi à des corps autres que les magistrats, l’Institut national de formation judiciaire (INFJ) innove. Ainsi, pour les Officiers de police judiciaire, cette opportunité s’offre comme une « École supérieure de la pratique de droits », et pour les journalistes, c’est une piste pour leur spécialisation, «il s’agit d’apprendre à se professionnaliser », selon le Directeur général de l’INFJ Toubaye Koné. La preuve a été faite de ce propos quant au cours d’une formation de cinq jours, journalistes et agents sociaux ont eu à s’imprégner des expériences de terrain des magistrats et des officiers de police judiciaire (et vice versa), en matière de protection des mineurs.
C’est en partenariat avec le ministère allemand des Affaires étrangères, le ministère de la Justice malienne, ainsi que l’Institut national de Formation judiciaire (INFJ), que l’Institut des Nations Unies pour la Formation et la Recherche (UNITAR), organise des formations dans le cadre du projet de « Renforcement des capacités du système judiciaire et promotion de l’Etat de droit au Mali ». La présente formation vise à renforcer les capacités des participants sur la protection et la prise en charge des mineurs dans le système judiciaire malien. Elle se concentre en outre sur l’application des principes directeurs durant la prise en charge des mineurs, tout au long de la procédure, l’identification et l’application des articles spécifiques aux mineurs dans les textes nationaux et internationaux, ainsi que sur la collaboration des acteurs avec la juridiction du tribunal des mineurs. Des exercices de groupe et des cas pratiques pour mettre des participants en situation et renforcer leurs capacités pratiques ont émaillé la formation. Ce qui permet non seulement d’améliorer les compétences des praticiens dans la prise en charge juridique et judiciaire des mineurs, mais également d’approfondir leurs connaissances sur les différents acteurs et textes applicables à cet accompagnement, a précisé le Directeur général de l’INFJ, Toubaye Koné.
Et quand les formateurs étaient des professionnels aguerris comme Zakariyah Kante et Moussa Toufado Touré (président du Tribunal pour enfant de Bamako), les participants ne pouvaient qu’être assidus aux sessions de cours magistraux et de cas pratiques. Le doyen Baya Berthé, représentant de UNITAR (United Nations Institut for Training and Research) se réjouit de sa collaboration avec l’INFJ.
Les principes directeurs pour la prise en charge des mineurs
Il s’agit essentiellement de 11 principes directeurs, qui sont : la priorité donnée à l’intérêt supérieur de l’enfant, la confidentialité, le consentement éclairé, le droit de participation, le droit à un traitement équitable par l’application du principe du double degré de juridiction, le droit à l’assistance obligatoire depuis l’enquête préliminaire jusqu’à l’application du jugement, la non-discrimination, la présomption d’innocence, la proportionnalité, la primauté aux mesures alternatives aux procédures judiciaires (mesures de déjudiciarisation) et la détention comme mesure de dernier recours.
Les principes directeurs en matière de protection de l’enfant qui sont consacrés par le Code de Protection de l’Enfant (CPE) et la Loi portant Minorité pénale et institution de Juridictions pour Mineurs (LMPIJM) s’inspirent largement de ceux édictés par la Convention relative aux Droits de l’Enfant. Ils facilitent l’interprétation et la mise en œuvre des droits de l’Enfant énoncés dans la Convention. Toutes les questions concernant les enfants doivent être examinées à la lumière de ces 11 principes suscités.
La priorité donnée à l’intérêt supérieur de l’enfant signifie que pour toutes les décisions qui affectent les enfants, qu’elles soient le fait d’institutions publiques ou privées, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. Les tribunaux et autres instances de règlement des conflits, doivent en toutes circonstances, fonder leurs décisions sur l’intérêt supérieur de l’enfant qui doit toujours l’emporter sur toute autre considération.
La confidentialité. La procédure concernant un enfant se caractérise par sa non publicité. Tous les débats, de la phase d’enquête préliminaire jusqu’au jugement, ont lieu à huis clos. L’article 43 de la Loi portant Minorité pénale et institution de Juridictions pour Mineurs (LMPIJM) interdit la publication par tout moyen des procès-verbaux d’enquête préliminaire, du compte rendu des débats, du jugement et de toute indication concernant l’identité et la personnalité des mineurs délinquants. La violation de cette interdiction, sauf cas de nécessité extrême, expose à des sanctions pécuniaires et à des peines d’emprisonnement, en cas de récidive. Le but visé par cette interdiction est de faciliter la réinsertion sociale de l’enfant.
Le Consentement éclairé. Le concept de consentement désigne le choix éclairé pour l’enfant d’accepter librement et volontairement toute chose le concernant. Il n’y a pas de consentement lorsque son accord est obtenu par l’usage de menace, de force ou autre forme de coercition, par l’enlèvement, la fraude, la manipulation, la tromperie, la déformation, ou encore par la menace de privation d’un avantage auquel l’enfant a déjà droit ou par la promesse d’un avantage.
Le droit de participation. Cela consiste à laisser l’enfant exprimer ses opinions et lui donner la possibilité de faire des choix et de participer à des prises de décisions qui ont une incidence sur sa vie et contribuent à faire en sorte que les décisions soient prises dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant.
Le droit à un traitement équitable par l’application du principe du double degré de juridiction. Le procès d’un mineur en conflit avec la loi doit intervenir et être tranché dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale et indépendante et le mineur ou son tuteur a droit à l’exercice des voies de recours en cas d’insatisfaction du jugement rendu (appel, voire pourvoi en cassation).
La proportionnalité. Toutes les mesures prises en ce qui concerne l’enfant en conflit avec la loi sont proportionnelles aux circonstances et à la gravité de l’infraction et aux circonstances et aux besoins éducatifs, sociaux, et aux autres de l’enfant.
La primauté aux mesures alternatives aux procédures judiciaires (mesures de déjudiciarisation). Lorsqu’il est jugé opportun, des mesures alternatives aux procédures judiciaires (mesures de déjudiciarisation) sont proposées pour traiter les enfants en conflit avec la loi. Toute mesure ou action utilisée comme mesure alternative à la procédure judiciaire, assure que les droits de l’enfant et les garanties juridiques sont entièrement respectés.
La détention comme mesure de dernier recours. La privation de liberté n’est imposée à un enfant en conflit avec la loi que comme mesure de dernier recours, elle est d’une durée aussi brève que possible et fait l’objet d’un examen régulier.