Le paysage politique actuel malien se caractérise par un manque de visibilité totale en raison de l’inaction et de la carence de leadership au sein des partis politiques. On a l’impression que ceux-ci ayant participé à plusieurs gouvernements de l’ère démocratique et tiré leur épingle du jeu financièrement, ne veulent plus de bataille aujourd’hui et désirent jouir de leurs richesses amassées à l’ombre du peuple.
Si l’Adéma fait encore quelques mouvements en faisant publier son bilan politique de 1992 à 2002, les autres formations politiques se taisent comme une tombe et beaucoup de gens se demandent ce que sont devenus leurs chefs. Il y a bien sûr la mort de certains leaders comme Soumaïla Cissé (URD) et Soumeylou Boubèye Maïga (Asma) et la fuite du virevoltant Oumar Mariko du Sadi, mais bien d’autres chefs sont encore en vie et qui se font oublier comme s’ils regrettaient leurs harangues passées.
Dans la rue, il est question de politiciens qui ont berné le peuple pour s’enrichir sur son dos, d’intellectuels pourris qui ont vendu le Mali à la France et d’hommes d’affaires qui vendraient des armes aux rebelles et aux djihadistes après s’être fait connaître auparavant pour des patriotes bon teints.
Dans les directions des partis politiques où des débats d’idées ont encore cours, si l’on évoque l’accord d’Alger pour la paix, c’est pour en rire ou souligner son caractère trop partisan pour la France et les rebelles du nord. Bien entendu, comme pour se masturber les idées et faire le jeu des colonels de la transition, on attaque inutilement la France pour des crimes qu’elle n’a pas commis car comme souligné par un sage du Bèlèdougou, « nous sommes responsables des cieux qui nous tombent sur la tête ».
Dans cette paix des braves ou de la trêve de Dieu comme au moyen âge français, les militaires de la transition, en raison de la mort politique des partis politiques, ont beau jeu et disposent d’un large boulevard de manœuvres devant eux.
La montée en puissance de l’ancien parti unique constitutionnel UDPM rhabillé MPR, qui n’avait aucun représentant dans les assemblées nationales passées, montre toute la déliquescence du mouvement démocratique qui gouverna le pays de 1992 à 2002. Son chef, Choguel Kokalla. Maïga, chef du gouvernement de transition, voulait lui jouer un vilain tour en faisant voter par le CNT une loi électorale qui aurait placé ses hommes de confiance aux commandes de l’Etat, lui-même se réservant pour les échéances futures.
Le CNT vit le complot ourdi venir de loin et le souscrit à la grande satisfaction des partis politiques qui n’avaient rien fait pour gagner cette bataille.
De toute façon, le méli-mélo actuel est profitable à la transition militaire qui travaille lentement et dans le silence à la pérennisation de son régime. Elle en a les moyens par les ressources humaines vendables à vil prix et qui y vont par des vidéo téléguidées et par des articles de presse sans autre logique que l’apologie du règne militaire qui régresse partout sur le continent.
On en oublie les massacres au nord et au centre, la perte des jeunes soldats morts gratuitement dans les mêmes zones, l’insécurité sédentarisée et les champs dévastés par les djihadistes qui demandent que tout le monde fasse le salam devant leurs bêtises.
La mort politique des partis de la démocratie est une mauvaise chose pour le pays quoiqu’on dise et pense du parcours de ceux-ci, ces 20 ou 30 dernières années. En 1958, la désunion de la classe politique de la IVè République française, avait permis au Général De Gaulle de faire un retour triomphal au pouvoir après l’avoir quitté en 1946 pour cause de mauvaise cohabitation avec les communistes du PCF. Il est à craindre que ce scénario cisalpin ne se reproduise chez nous.