SociétéPr Rokia Sanogo, chef du département de la médecine traditionnelle : «La médecine traditionnelle est victime de l’urbanisation et de la monétisation»
Publié le lundi 7 novembre 2022 | L’Inter de Bamako
Dans le cadre de la commémoration de la 20ème édition de la Journée africaine de la médecine traditionnelle, le Département de la médecine traditionnelle (DMT) a organisé, jeudi 27 octobre 2022, une conférence de presse dans ses locaux, sis à Sotuba.
Animée principalement par le Pr Rokia Sanogo, chef du Département de la médecine traditionnelle, qui s’est fait accompagner par le président de la Fédération malienne des associations des thérapeutes traditionnels et herboristes (FEMATH), M. Mohamed Fall et Dr Maria Cécille Dembelé, présidente de la Société malienne de phytothérapie (SMP), cette conférence de presse, avait pour objectif d’échanger avec la presse sur la contribution des ressources de la médecine traditionnelle dans l’atteinte de la couverture maladie universelle.
Après les mots de bienvenus prononcés par Mohamed Fall et Dr Maria Cécille, le Pr Rokia Sanogo, a indiqué que la célébration de la Journée africaine de la médecine traditionnelle au Mali, a été faite en collaboration avec l’Institut national de santé publique (INSP), la Fédération malienne des associations des thérapeutes et herboristes, à travers une série d’activités dont la principale portrait sur la contribution des tradipraticiens de santé à la campagne d’information et de sensibilisation sur la vaccination anti COVID 19.
Le Département de la médecine traditionnelle, a-t-elle précisé, est la structure technique du ministère de la Santé et celui de la Recherche scientifique, chargé de la politique de valorisation des ressources de la médecine traditionnelle en assurant la promotion des pratiques, produits et des praticiens de la médicine traditionnelle.
À en croire le Pr Rokia, le Département de la médecine traditionnelle est une structure de santé menant des recherches sur les plantes médicinales utilisées pour la prise en charge des pathologies fréquentes.
Mieux, a-t-elle renchéri, qu’il dispose d’installations, d’infrastructures, notamment des laboratoires et des herbiers d’environ 3.000 échantillons répartis entre 114 familles, 468 genres et 824 espèces dont le premier échantillon date de 1963.
Et de préciser que le succès de ses recherches a permis la mise au point des médicaments traditionnels améliorés (MTA) tels que le Balembo (sirop adultes et enfants) antitussif, le malarial (sachet) antipaludique, disenteral (anti amibien), le gastrosedal anti ulcéreux, laxa cassia (laxatif) et Psorospermine (pommade anti eczémateux) disposant d’une autorisation de mise sur le marché et figurant sur la liste des médicaments essentiels du formulaire thérapeutique national du Mali.
Reconnu comme un centre d’excellence de l’Organisation ouest-africaine de la santé de l’espace CEDEAO, l’offre des soins au niveau du Département de la médecine traditionnelle, se fait selon Rokia, à travers des consultations médicales et la prescription des médicaments traditionnels améliorés.
Aussi, souligna-t-elle que le département délivre des cartes professionnelles aux praticiens de la médecine traditionnelle sur la base d’une collaboration. Laquelle, dit-elle, s’inscrit dans un processus pour l’obtention de l’agrément auprès du ministère de la Santé en vue de l’ouverture d’un cabinet de soin. Avant de préciser que la carte professionnelle est personnelle et n’autorise nullement son titulaire à vendre de médicaments.
Pour avoir cette carte, précise le chef du Département de la médecine traditionnelle, le candidat doit au préalable collaborer avec des médecins de la santé conventionnelle durant quatre (04) mois et avoir soigné au moins trente (30) patients. Au bout de ces quatre (04) mois, celui-ci, selon ses dires, dresse un rapport d’évaluation qui est transmis au ministre de la Santé en plus de la demande timbrée, signée, avec photo du candidat pour l’obtention de l’agrément.
À l’entendre, la carte professionnelle, délivrée pour quatre (04) ans peut être retirée à tout moment si le tradithérapeute se livre à cœur joie à des publicités autour de sa personne ou de ses produits. Pour ce qui est des herboristes (vendeurs des plantes comme les écorces de caïcedrat, etc.) ceux-ci disposent d’une carte de trois (03) ans.
Exercice illégal de la médecine traditionnelle
Concernant le nombre de tradipraticiens disposant d’une carte professionnelle, le Pr Rokia a révélé que ceux-ci ne dépassent pas une moyenne de 47 par an. Avant de fustiger le caractère illégal des boutiques de vente de produits issus de la médecine traditionnelle ayant pignon sur rue, les publicités tapageuses des tradithérapeutes sur les radios privées au mépris de la Loi interdisant toute publicité autour de la santé. Pour prendre à bras le corps ce fléau et protéger les paisibles populations contre les marchands d’illusions, elle a invité les autorités en charge de la santé et de la communication d’œuvrer au respect de la règlementation.
Mettant en relief la médicine traditionnelle, le Pr Sanogo Rokia, a affirmé que celle-ci constitue la mère de la médecine conventionnelle et représente le premier recours des populations. Avant de déplorer le fait que la médecine traditionnelle, jadis non commerciale, est aujourd’hui victime de l’urbanisation galopante et son corollaire de recherche du gain par tous les moyens.
Mettant en garde les populations contre les produits issus de la médecine sous de bel emballage dont certains sont des alliages des produits synthétiques du système conventionnel à ceux de la médecine traditionnelle, elle a invité celle-ci à s’adresser au Département de la médecine traditionnelle et ses partenaires pour des soins sûrs, efficaces et de qualité.
Pour sa part, le président de la Fédération malienne des associations des thérapeutes traditionnels et herboristes (FEMATH), Mohamed Fall, a informé le public que la fédération créée, le 16 mars 2002, témoigne de la volonté des professionnels du secteur à fédérer les actions et à protéger contre les populations contre les tout-venants.