Le moteur du train de la reconstruction et la relance économique du Mali est-il grippé par les mauvaises pratiques ? Des irrégularités financières de plus de 749 millions de FCFA décelées par le Bureau du Vérificateur Général dans la Gestion du Projet de Reconstruction et de Relance Economique (PRRE). Ces irrégularités sont relatives à la violation des règles d’exécution et de règlement des marchés publics et à des dépenses irrégulières sur les intérêts créditeurs.
C’est un fait gravissime pour ce pays en grosse difficulté quant le projet chargé de la Reconstruction et de Relance Economique (PRRE) souffre de dysfonctionnements dans les procédures de passation et d’exécution des marchés publics, mais aussi et surtout du non-respect des exigences législatives et réglementaires par les acteurs chargés de la mise en œuvre du PRRE.
Selon le rapport, le Directeur Général de l’AGETIER a irrégulièrement payé le marché de construction du pont Kaneye. L’équipe de vérification explique que le Directeur Général de l’AGETIER a procédé au paiement intégral du contrat n°T1-IVP2-280-03-29/2014 relatif aux travaux de construction du pont (ouvrage) de Kaneye d’un montant de 24 597 500 F CFA, bien que ledit ouvrage se soit écroulé durant le délai de garantie. En effet, la réception provisoire du pont de Kaneye objet dudit contrat a eu lieu le 7 août 2018 et il s’est effondré le 1er mars 2019 avant l’expiration du délai de garantie des travaux soit environ sept (7) mois. Ainsi, par lettre n°007 du 2 mars 2019, le Maire de la Commune Rurale de Kaneye a informé le Coordinateur du PRRE pour lui faire part de l’effondrement du pont. Le bureau de contrôle BGET, chargé du contrôle et à la surveillance des travaux du pont a, ainsi été irrégulièrement payé à 23 437 000 FCFA pour ses prestations alors qu’il n’a pas accompli ses obligations contractuelles relatives au contrôle et à la surveillance des travaux. Ce qui justifie nettement l’effondrement de l’ouvrage de Kaneye.
Ce n’est pas tout, le Coordinateur de l’UCP, le Directeur Général de l’AGETIER, le Directeur Général de l’AGETIPE et le Directeur pays de CARE International au Mali ont procédé aux règlements de marchés sans exiger le paiement des droits d’enregistrement ou de la redevance de régulation. Il s’agit des marchés n°0612CPMP/2019 relatif au Recrutement d’une Agence de Communication et n°3592/CPMP/2019 relatif au suivi des activités déjà visitées par la Tierce partie qui ont été payés sans s’assurer de l’acquittement de la redevance de régulation pour des montants respectifs de 286 950 FCFA et 75 440 FCFA. Le montant total compromis s’élève à 362 390 FCFA.
Aussi, le Directeur Général de l’AGETIPE ne s’est pas assuré du paiement de la même redevance sur 22 contrats de marché payés pour un montant cumulé compromis de 8 771 454 FCFA ainsi que deux (2) autres contrats réglés mais dont les droits d’enregistrement n’ont pas été payés pour un montant de 3 623 842 FCFA. La redevance de régulation n’a pas été acquittée pour un montant de 712 689 FCFA. Le montant compromis s’élève à 13 107 985 FCFA.
L’équipe de vérification a, de plus, constaté que le Directeur Général de l’AGETIER ne s’est pas assuré du paiement de la redevance de régulation sur le contrat n°F1-BFEO-280-02-09/ pour un montant de 78 538 FCFA. En outre, le Directeur pays de CARE International au Mali ne s’est pas assuré du paiement de la redevance de régulation sur cinq (5) contrats payés pour un montant total compromis de 1 180 514 FCFA. Le montant total compromis s’élève à 14 729 427 FCFA dont 3 623 842 FCFA pour les droits d’enregistrement et 11 105 585 FCFA pour les redevances de régulation
L’équipe de vérification a constaté que le Coordinateur de l’Unité de Coordination du Projet a payé trois (3) marchés revêtus de faux cachets d’enregistrement. Le montant total compromis s’élève à 69 252 900 FCFA dont 59 359 629 FCFA au titre des droits d’enregistrement et 9 893 271 FCFA au titre de la redevance de régulation. Quant au Directeur Général de l’AGETIPE, il a payé quatorze (14) contrats revêtus de faux cachets d’enregistrement. Le montant total compromis s’élève à 59 833 642 FCFA dont 51 285 979 FCFA au titre des droits d’enregistrement et 8 547 663 FCFA au titre de la redevance de régulation A cela s’ajoute la non application des pénalités de retard par le Directeur Général de l’AGETIPE et le Directeur Général de l’AGETIER. Ces manquements concernent plus d’une trentaine marchés pour des pénalités de retard non appliquées totalisant un montant de 557 761 686 FCFA.
En somme, le rapport du BVG qui couvre l’exercice 2018, 2019 et 2020 de la gestion du PRRE, ressort que les opérations de dépenses relatives à la gestion du PRRE et du Plan de Sécurisation Intégré des Régions du Centre (PSIRC) ont été entachées d’irrégularités financières d’un montant total de 749 612 155 FCFA.
Un scandale au regard de la place centrale qu’occupe le PRRE dans le développement et la stabilité du pays durement éprouvé que le pôle économique et financier doit se saisir pour ce projet joue tout son rôle dans reconstruction et la relance économique du Mali.