Avec les Sy Souleymane Sy, Abdoul Razak Minta, feu Mamadou Bakary Coulibaly de la radio Bamakan, feu Souleymane Ibrahima Coulibaly de l’Ortm, Diossé Traoré de la station FR3 à vulgarisé le Bambara. Ce constat relève des proliférations des radios privées engendrée par le pluralisme politique. Ce qui a diversifié le traitement des sources d’informations, jadis dévolue à la seule Radio Mali. Diossé Traoré, l’un des animateurs de radios les plus connus et les plus populaires fait son passage dans la rubrique ” Que sont-ils devenus ? “. Bambara pur-sang, Diossé a une définition précise de cette ethnie. Laquelle ? Qu’est-ce qui explique sa passion pour le micro ? Les interviews avec les présidents ATT et IBK ? Que pense-il de l’avenir du Mali ? Voici les multiples questions qui nous ont servi de boussole pour retracer la vie de ce grand animateur.
Diossé Traoré, animateur de la radio FR3 est un descendant direct de l’emblématique Koumi Diossé, un vaillant guerrier du Royaume du Bélédougou, qui a opposé une résistance farouche à la pénétration française au Mali. En Mars 1915, il se fait sauter avec les siens plutôt que de se rendre aux Blancs. Notre héros est, à jamais, fier de son ancêtre.
Qu’est ce qui caractérise un vrai bambara ? Le bon comportement, la mort que d’envier une femme d’autrui, le respect de la parole donnée sont les caractères nobles d’un bambara, répond Diossé. Son analyse sur la situation actuelle du pays explique son amour pour la patrie. Il est formel que notre pays se relèvera pour vu que chaque Malien sache qu’il est un maillon important de la société
D’emblée, le niveau intellectuel et le français de la vieille école de notre interlocuteur nous surprennent. Parce qu’il ne nous est pas revenu de le voir parler la langue de Molière. Il s’est surtout illustré dans la revue de la presse en bambara. Un exercice qui ne demande pas un niveau d’étude assez élevé.
Diossé a commencé son cursus scolaire à Kayes, avant de décrocher le D.E.F à Bamako. Il s’exile au Sénégal pour une formation de Technicien supérieur en comptabilité au Collège Polytechnique de Thiès. De retour au pays en 1990, il est confronté au fléau du chômage. A défaut d’un emploi à la mesure de sa spécialité, il entreprend du commerce d’oignons entre Bamako et Niono. Il consacre également la période de soudure à la vente de friperie. C’était vraiment des temps durs. C’est à dire que Diossé Traoré faisait partie des jeunes qui avaient tendance à lier leurs conditions de vie au régime du feu président Moussa Traoré. C’est dans ces circonstances que les premières manifestations du 26 Mars ont commencé. Il se lance dans le combat et participe aux différents mouvements de contestations, jusqu’au Coup d’Etat. Voilà que le vent de la démocratie commence à souffler au Mali, des radios privées voient le jour pour annoncer le pluralisme politique. Une avancée qui conduit le destin de Diossé Traoré vers le micro. Pourtant, il était un novice pour intervenir sur les antennes d’une radio. Mais à cœur vaillant, rien d’impossible, dit-on. Il réagit à l’avis de recrutement de la radio FR3. Très bon orateur en français, il est retenu à l’issue de l’interview éliminatoire. En plus, il a l’art de parler.
Reporter pour assurer les journaux parlés de midi et 18h (présentés par Oumar Sidi Sangho), il couvre tous les évènements, les procès Crimes de sang et Crimes économiques, les manifestations de l’AEEM, les activités des partis politiques. Il s’en plaisait parce que les journalistes radios étaient rares. Cependant, un fait divers banal et les remontrances d’un auditeur feront de lui un chroniqueur bambara. Un changement de statut qui a déterminé sa notoriété.
Que s’est-il passé ? Diossé explique : “Une femme s’est retrouvée entre les mains du Commissariat du 2ème Arrondissement pour garantir sa sécurité, parce que la population voudrait la lyncher pour son appartenance à une secte de sorcellerie. L’atmosphère était électrique devant le Commissariat. Quand j’ai eu cette information, le reflexe journalistique me conduit sur le terrain pour en savoir plus. Le Commissaire crée les conditions de l’interview, mais la dame propose le bambara. L’élément est diffusé au journal parlé de 18h. Immédiatement un auditeur a appelé pour faire des remarques sur l’incompatibilité d’un reportage en bambara dans un journal diffusé en français. Il insiste sur le fait que la plupart des auditeurs sont des analphabètes. Alors, pourquoi ne pas présenter le journal en bambara ? J’ai conclu qu’il avait raison, et je fais la proposition au promoteur de la radio.
Donc, tous les matins à 8h, je présentais le journal sur l’actualité nationale et internationale. Cela fut un déclic et la radio a gagné en notoriété.
La revue de la presse est intervenue après, mais avec des soucis. Parce que les journalistes se plaignaient des commentaires sur leurs articles, lesquels commentaires, selon eux, avaient tendance à dénaturer le sens de leurs écrits. Il est indéniable que plusieurs radios se sont inspirées du journal en bambara de la radio FR3 pour enrichir leurs programmes”.
En plus de cette innovation, Diossé Traoré est plus inspiré avec la création de deux autres émissions : dibi fara (défier l’obscurité). Ouvert à tous les auditeurs, ce programme dénonçait les maux de la société, avec la possibilité d’opposer une version contradictoire aux dites dénonciations.
La troisième émission “Blan Galama” (laisser au bon Dieu) constituait un espace pour les démunis (orphelins, veuves, malades) afin qu’ils lancent un cri de cœur.
Diossé a passé dix ans à la radio FR3. En 2012, selon lui, le promoteur n ‘appréciait pas ses mouvements avec les autres candidats à l’élection présidentielle parce qu’il soutenait un prétendant pour lequel Diossé n’était pas apparemment engagé. Finalement, ce fut le divorce.
Il surgit sur les antennes de la radio Niéta pour une nouvelle aventure de dix ans avec le journal en bambara et Donw Kibaru.
Depuis une année, Diossé sert dans une nouvelle station : la radio Benkouman. Parallèlement à son statut d’animateur, il a mûri l’ambition de créer sa propre radio, mais en vain. Les sollicitations auprès des présidents feux ATT et IBK n’ont pas porté fruit. Il a pu au moins créer une agence de voyage. Car, depuis 1994, il est sollicité par des agences de voyages pour l’encadrement de leurs pèlerins.
Après trente ans de vie radio, peut- on déduire que le micro lui a rendu service ? Ou même d’indépendant dans la société ? Affirmatif, s’empresse-t-il de répondre. Partout où il passe, on le traite avec respect et considération. Ce qui lui permet de gagner sa pitance. A défaut d’un logement social, il a pu se construire une maison, et remercie le bon Dieu pour lui avoir facilité son quotidien.
Comment les interviews des présidents ATT et IBK se réalisaient ? Avait-il des retombées pécuniaires ? Diossé Traoré dit que l’exercice avait pour but de passer le message des chefs d’Etat, par rapport à leur bilan et surtout les promesses qu’ils avaient prises lors des campagnes présidentielles. ATT ne disait-il pas qu’il passait trois mois dans la tranquillité morale après chaque entretien avec les Sy Solo, Diossé Traoré et Souleymane Ibrahima Coulibaly de Radio Mali (Paix à son âme). Parce qu’il trouvait l’occasion d’expliquer aux Maliens la situation réelle du pays. Si le seul fait d’interviewer un président peut créer des relations ou des opportunités, en retour Diossé signe et persiste qu’il n’avait rien comme avantages particuliers en termes d’argent.
Diossé Traoré est marié et père de plusieurs enfants, selon ses propres termes. Dans la vie, il aime le social, l’islam et déteste l’hypocrisie et l’égocentrisme.