Apparemment notre manchette de la semaine dernière (ARÈNE POLITIQUE MALIENNE : La disette a-t-elle réduit les partis au silence ? Le Matin N°555 du mercredi 23 novembre 2022) semble avoir réveillé les politiciens désœuvrés de la République. C’est ainsi que, samedi dernier (26 novembre 2022), le Cadre des partis et regroupements politiques pour le retour à l’ordre constitutionnel a animé une conférence de presse pour exiger l’abandon du projet de la nouvelle constitution et l’organisation des élections présidentielles et législatives sous la responsabilité d’un gouvernement inclusif de mission. Autrement, pensent des observateurs, ils exigent un gouvernement d’ouverture en espérant être massivement invités à la table des convives.
L’organisation d’un dialogue républicain de haut niveau avec la classe politique et la société civile, l’organisation des élections présidentielles et législatives par un gouvernement inclusif, l’abandon du projet de la nouvelle constitution… Voilà, entre autres, les exigences formulées par le Cadre des partis et regroupements politiques pour le retour à l’ordre constitutionnel (une alliance qui serait constituée de dizaines de partis et de mouvements politiques) lors d’une conférence de presse animée samedi dernier (26 novembre 2022). Et selon son président, Dr Modibo Soumaré, il s’agit d’une condition sine qua non pour «sortir rapidement le Mali de la crise».
Selon ses responsables, la sortie de crise nécessite un «changement de cap et de paradigme» avec une vision politique clairement assumée et des actions concrètes. D’où, selon eux, l’urgence d’un «dialogue républicain» de haut niveau avec la classe politique et les autres forces de la société en vue d’une vraie décrispation et d’une vraie réconciliation entre les maliens. Cela permettra, selon Amadou Koïta (PS Yeleen Kura et porte-parole de la coalition) de «dégager un large consensus autour de la gestion et la conduite de la transition». Dans une déclaration lue par M. Koïta devant la presse (et signée par les représentants des partis politiques et regroupements politiques comme Espérance Jiguiya Kura, PS Yeleen Kura, Ensemble pour le Mali, Action Républicaine pour le Progrès/ARP, ASMA, ICAP…) le cadre a souhaité l’établissement d’une carte électorale sur la base des données sécuritaires, l’audit du fichier électoral, la distinction entre la gestion de la situation sécuritaire du pays (qui est permanente) et celle de la sécurisation des élections qui est temporelle et qui nécessite une stratégie spécifique.
Selon le porte-parole Koïta, le cadre soupçonne surtout les autorités de vouloir «changer la constitution» et modifier «les chronogrammes électoraux». Il a ainsi dénoncé cela comme «une démarche non inclusive». Ce regroupement a également exigé la cessation des arrestations extrajudiciaires, des intimidations et des menaces des personnalités politiques ainsi que le retour de celles qui ont été contraintes à l’exil, le retour du Mali dans le concert des nations, le respect strict de l’indépendance de la justice et des droits et libertés… Tout comme il a réclamé la nomination d’un Premier ministre «non partisan, consensuel, compétent, intègre et ayant une connaissance avérée des dynamiques politiques, économiques et sécuritaires du pays».
Il faut rappeler que, depuis juillet dernier, cette coalition n’a pas cessé de réclamer la démission du Premier ministre Dr Choguel Kokalla Maïga. Une exigence remise donc sur la table avec l’annonce du retour de Choguel au devant de la scène politique. «Notre regroupement tient à sa position», a martelé Dr Modibo Soumaré, président du cadre, tout en se réjouissant du rétablissement du chef du gouvernement.
Le timing de cette conférence presse ne semble pas avoir surpris beaucoup d’observateurs qui jugent nécessaire l’impulsion aujourd’hui d’une nouvelle dynamique à la transition. «Ces dernières semaines, il a été beaucoup question de la nécessité d’un remaniement ministériel. Et le cadre revient à la charge avec les mêmes revendications pour exercer la pression sur les autorités de la transition afin d’obtenir quelques portefeuilles dans le prochain gouvernement», a analysé un interlocuteur.
«Certaines revendications sont pertinentes comme la réduction du train de vie de l’Etat, la fin des intimidations et des arrestations arbitraires, le respect strict de l’indépendance de la justice et des droits et libertés, l’audit du fichier électoral et surtout le respect du délai de la transition. Mais, je ne trouve pas raisonnable qu’on exige à ce stade l’abandon du projet de nouvelle constitution qui est le socle de la refondation de l’Etat. C’est plus que jamais le moment de procéder à cette révision d’autant plus que tous les régimes démocratiquement élus l’ont tenté sans succès. Il faut juste se donner la main aujourd’hui pour améliorer le projet dans l’intérêt de la démocratie», conclut-il.
«Ces politiciens cherchent juste à manger en exigeant un gouvernement d’union… Certes le pays a besoin d’union de tous ses fils et filles, mais il n’est pas opportun aujourd’hui d’ouvrir le gouvernement aux politiciens. Qu’ils se préparent plutôt pour les prochaines échéances électorales, en demandant par exemple aux Maliens de voter Non au référendum constitutionnel s’ils ne sont pas d’accord avec le projet. Mais, cela ne les arrange pas parce que ceux qui exigent aujourd’hui le retrait du projet de constitution ne pèsent pas lourd sur l’échiquier politique. Ils veulent juste faire du bruit pour entrer dans le gouvernement», analyse un autre interlocuteur.
Le président Assimi Goïta va-t-il alors céder à leur «chantage politique» ? Les semaines à venir vont nous édifier !