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Mamadou Sinsy Coulibaly : « Il faut prioritairement proposer au peuple des alternatives plus rassurantes et réduire la pression de la flambée du coût de la vie
Publié le vendredi 16 decembre 2022  |  Le Wagadu
Conférence
© aBamako.com par A S
Conférence de presse du Conseil national du patronat (CNPM)
Bamako, Le 10 février 2020 Le Conseil national du patronat (CNPM) étaient face à la presse
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Le souverainisme à deux balles a servi, un temps, à nourrir l’ego surdimensionné de la foule des partisans déchaînés, à coup de slogans bellicistes, d’opprobres et d’anathèmes labellisés marque de patriotisme, en plus de menaces de violences et de privation de libertés envers qui mal y pense. Les invectives sont devenues la norme des relations avec les partenaires. Le réveil laisse pourtant groggy par la brutalité des difficultés face auxquelles la junte paraît désemparée. Signe qu’il est temps de proposer d’autres alternatives !

Au tout début, les soudards, dans leur obsession d’accaparement, voire d’usurpation du pouvoir, ont construit un narratif à l’usage du peuple, dans l’illusion du changement, soulevé d’euphorie à coup de promesses creuses d’un souverainisme de pacotille. Les conjurés du 18 août 2020 avaient pourtant fait croire, à l’époque, que le pays était en voie d’effondrement avancé. Mais, voilà qu’à l’heure du bilan, il l’est encore davantage sans doute plus encore qu’hier.

Aujourd’hui, comme l’on peut aisément s’en apercevoir, il y a un profond décalage entre l’envolée lyrique des militaires au pouvoir et la dure réalité de la situation du pays. À l’évidence, la désillusion est tellement plus forte que le règne des putschistes du Camp Soundjata, foncièrement axé sur le spectaculaire, s’apparente davantage à l’emprise de l’empire soviétique avec ce que cela comportait comme affichage équivoque d’une certaine suprématie martiale. Les militaires de Kati, toujours en quête d’une hypothétique popularité, ne savent pas encore qu’ils ont déjà perdu le contrôle du pays.

Le temps qu’ils s’en rendent compte, quelle souffrance vont-ils infliger à une population, de plus en plus désenchantée, à une économie agonisante et aux services financiers, plus que jamais extenués par les multiples ponctions auxquelles ils ont été soumis ?

Face à un tel cataclysme prévisible, ce qui revient à tout esprit lucide, c’est de conseiller à la junte au pouvoir de renoncer à toute idée de confiscation et surtout d’incrustation au pouvoir, et plutôt le rendre avant que, pour eux, le temps ne s’arrête.

Le retour de manivelle de la déception et de la défiance, dans une dynamique de mimétisme, pourrait s’avérer un retour de bâton, retournant contre les maîtres du jour leurs méthodes et excès.

Mystère de Koulouba ?

Tout le monde convient de cette évidence : le pays va mal. Face à l’inanité et l’impuissance de la junte à répondre aux grandes menaces, déjà connues, de l’instabilité institutionnelle et surtout de la sécurité, l’imaginaire populaire se nourrit aujourd’hui de croyances, un moment endormi, et qui se réveille à la faveur des multiples drames quotidiens vécus, comme explication ésotérique des échecs collectifs.

Et ce que l’on a longtemps appelé ‘’la malédiction de Koulouba’’, connue des initiés, revient donc aujourd’hui au goût du jour. Un tour d’horizon de la réalité du pouvoir, telle qu’elle est vécue, en ce haut lieu de la suprématie d’Etat, par les hommes d’Etat, nous le rappelle cruellement.

De Modibo Keïta, père de l’indépendance, à IBK, le dernier chef d’Etat malien évincé du pouvoir par un coup de force, qui a été transporté de sa résidence de Sébénicoro par les militaires pour le faire démissionner au Camp Soundjata, le président ATT, officier général de son état, exfiltré des sommets de la colline par ses hommes pour le faire échapper à la furie meurtrière du capitaine Amadou Aya Sanogo, en passant par le professeur Dioncounda Traoré, président intérimaire, violemment agressé au sein du palais de Koulouba, laissé pour mort par une foule déchaînée, il y a comme un mystère diffus enveloppant cette colline sacrée, surplombant majestueusement la ville des Trois Caïmans, devenue par la force des choses le symbole du pouvoir d’Etat dans notre pays.

Les barbelés de la profanation

Les initiés, pénétrés du mystère de cette colline si particulière, ne se font aucun doute : la majestueuse colline de Koulouba est sacrée. Elle conserve en son cœur, comme tous les attributs similaires, ce trait vénéré. Ici, on l’appelle « Koulouba-Dassiri », en langue bamankan.

Les habitués de ce haut lieu du pouvoir ont découvert récemment qu’une barrière y avait été érigée tout autour pour les besoins de la cause. C’est du jamais-vu, de mémoire d’initiés que la colline de Koulouba soit ainsi ceinte, tout au long de son pourtour, par des fils de fer barbelés, comme une prison à ciel ouvert.

Du coup, rien que pour ce supplice à lui infligé, les initiés ne se font pas faute de conclure à la profanation, par un si brutal acte d’autorité, de la tombe des triplés et de leur vénérable mère, du nom de Gnéléblén Konaté.

Les anciens n’ignorent rien du caractère sacré des lieux, emplis de la mémoire de la célèbre mère et de ses triplés, décédés des suites de l’accouchement, dont les tombes sont enfouies dans les entrailles de la Colline, aux côtés de la sœur jumelle de Gnéléblén, appelée Sogonafing, dont une bourgade, devenue un quartier de Bamako, porte le nom. Le sanctuaire, de tout temps vénéré par les traditions, a ainsi été cruellement violé par ce mur en fer.

Dans le secret des initiés, on assure d’une vengeance terrifiante de la mémoire profanée de cette célèbre mère et de ses filiations. La mémoire de la vénérable Gnéléblén et celle de ses triplés planent au-dessus de ce lieu du pouvoir, exécrant toute action même inconsciente de violation, et qui exige réparation pour en conjurer les conséquences inévitables.

Les initiés assurent qu’un marigot de sang coulera le long des pentes jusqu’à la caverne, en contrebas du palais, sur le second plateau de la colline de Koulouba, seul à même de réparer l’outrage fait aux mémoires profanées des fabuleux occupants ensevelis en ces lieux.

Selon les croyances populaires, cette blessure suprême va engendrer une violence extrême, dont le châtiment ne viendra que d’en bas de la colline, c’est-à-dire du peuple, selon les interprétations des initiés.

Pour éviter la fatalité d’une malédiction, les maîtres de la Transition sont sommés par les détenteurs des savoirs traditionnels de restaurer la primauté des droits de la sacralité. Mais la symbolique des faits invite en réalité au respect scrupuleux des libertés individuelles et collectives, systématiquement mises entre parenthèses et la chape de plomb de la gestion martiale sans partage.

Des germes de la « juntephobie »

Quelle réelle perspective la junte offre-t-elle aux Maliens ? De quelle vision de développement économique dispose-t-elle pour insuffler une nouvelle dynamique à ce pays, déjà en manque de perspectives ?

Voilà la quadrature du cercle par où les militaires de la junte, de plus en plus en mal de gouvernance vertueuse, doivent passer pour recoller les morceaux. Si ces militaires arrivés au pouvoir par les armes veulent terminer en beauté, il leur faut prioritairement proposer au peuple des alternatives plus rassurantes et réduire la pression de la flambée du coût de la vie. Sans calcul, la survie de la junte et de leur régime, aujourd’hui profondément englué dans des difficultés de toutes sortes, passe par cela.

La « juntephobie » naissante et croissante, comme l’on peut s’en apercevoir, est aujourd’hui la menace la plus sérieuse à laquelle sont exposés les militaires au pouvoir. Cette tendance pourrait être contenue par leur capacité à se remettre en cause et à s’engager dans la reconstruction urgente d’une armée républicaine.

La soviétisation de l’armée, dont les prémices sont en marche, depuis un certain, dans ce pays, n’est pas celle-là qu’il faut pour le Mali et son futur, aussi bien immédiat que lointain. Le pays a besoin d’une armée républicaine, au service du peuple et sous les ordres de l’autorité civile choisie par le peuple, comme du reste le retour à l’ordre constitutionnel l’exige de la transition qui doit nécessairement savoir reconnaître ses limites.

Mamadou Sinsy Coulibaly, président du groupe Klédu

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