Vendredi dernier 16 décembre, les Maliens ont été surpris par un appel de Ousmane Chérif Haïdara, le président du Haut conseil islamique du Mali. Cet appel adressé au président Assimi Goïta est une alerte sur les dangers de la cherté de la vie. Cette situation aurait pu être évitée si les responsables du commerce avaient pris les mesures qui s’imposent pour mettre le pays à l’abri de ce phénomène. Malheureusement, à chaque fois que les critiques se multiplient contre la cherté de la vie, le ministre du commerce sort pour amuser la galerie, histoire de tenter de calmer les esprits. C’est ainsi qu’il a animé une conférence de presse il y a une semaine.
Une fois de plus, le ministre et ses collaborateurs en charge du commerce et de la concurrence ont fait une sortie ratée. Les Maliens s’attendent à des mesures concrètes contre la cherté. Mais au lieu d’annoncer des mesures et un plan efficace de réduction des prix, le ministre et le directeur du Commerce et de la concurrence se sont contentés de faire le bilan des actions inefficaces qui ont été prises sans avoir un impact positif sur le quotidien des Maliens. Car la vie chère continue à frapper de plein fouet les ménages. “C’est à travers des échanges et des négociations avec les opérateurs économiques et les détaillants que le gouvernement au sein du Conseil national des prix fixe les prix », a expliqué le ministre. Ce qui choque les Maliens, c’est que les produits cultivés au Mali sont chers alors en pleine période des récoltes.
C’est la preuve que les autorités n’ont pas pris des initiatives endogènes pour soutenir le commerce entre les lieux de production et les grandes villes du pays. En lieu et place de ces solutions, le ministre, estime que le gouvernement a aussi besoin de ses impôts, il ne peut pas abandonner ses impôts et taxes indéfiniment. Dans ses déclarations décousues, il indiquera : « Aujourd’hui, les produits importés, riz, huile, sucre, lait ont été taxés depuis 4 à 6 mois. Nous nous sommes mis d’accord avec les opérateurs économiques pour fixer les prix malgré la suppression de la subvention pour lutter contre la fraude, la surenchère. Après la subvention du gouvernement, les prix en cours sont les fruits de négociation, d’entente. L’évaluation de ces prix est suivie ».
Incapable de mener des réformes nécessaires, le patron de la Direction général du commerce et de la concurrence demande la patience aux Maliens parce que jusqu’à présent les mesures ne sont pas au top. Tout en avouant la cherté ambiante des prix des marchandises. Pour lui, le haut fait du gouvernement contre la flambée des prix a été de se mobiliser pour lutter contre la rétention et les spéculations des marchandises.
Dans un discours au relent d’aveux d’impuissance, les responsables du ministère du commerce demandent aux Maliens de les accompagner dans la lutte contre la spéculation pour que les prix fixés soient respectés. Alors qu’ils avouent la suspension des subventions accordées au riz, au sucre et à l’huile. Malgré tout, affirment les conférenciers, les prix qui ont été fixés de commun accord sont toujours respectés, même si de petites augmentations sont constatées. « Pour cette discipline, nous remercions et félicitons nos opérateurs économiques et les Maliens. Chaque fois que le gouvernement renonce à ses impôts et taxes, la direction générale du commerce et de la concurrence s’emploie à faire respecter les prix fixés et évite la rétention et les spéculations des marchandises. Nos équipes sillonnent les marchés pour éviter les la rétention et les spéculations des marchandises », a raconté le directeur du Commerce et de la concurrence.
Concernant les dispositions et les stratégies mises en place par le gouvernement pour renforcer le pouvoir d’achat et diminuer l’impact de hausse des prix, Alousséni Sanou, a dit que plusieurs mesures ont été prises par le gouvernement. « Dans ce contexte, nous devrions faire face non seulement à une réduction drastique de nos recettes en sachant bien que la crise sécuritaire nous fait perdre au moins 3 à 4 % de notre PIB en recettes. Ne maîtrisant pas une grande partie de notre territoire, il va de soi que la douane ne peut pas percevoir le droit qu’il faut. Donc, nous avions un manque à gagner à l’époque de plus de 400 milliards de F CFA sur les frontières que nous ne maîtrisons pas ».
Aujourd’hui, la sécurité est en train de venir dans ces frontières et progressivement, le pays est en train de monter la pente. « Face à ces crises, il fallait que l’Etat puisse répondre aux besoins des populations. Il faut savoir que dans le même temps, il avait eu beaucoup de revendications salariales et là nous avons été obligés de voir ce que nous pouvions faire avec les partenaires sociaux pour permettre d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés. Nous avons passé par une justice sociale avec nos partenaires sociaux ce qui nous a permis d’avoir une harmonisation de la grille salariale avec un impact annuel d’environ 200 milliards de F CFA pour permettre aux salariés d’avoir une augmentation afin de faire face aux différentes crises », a indiqué Sanou.
Dans cet exercice qui ne convainc guère, il ajoutera qu’au-delà des mesures qui visent à l’améliorer le niveau de revenu, il fallait également faire face à l’augmentation des grilles en essayant de déduire des subventions. C’est pourquoi l’Etat a continué à faire des subventions sur les produits de première nécessité. Par exemple : entre 2021-2022, il y a eu un manque à gagner de plus de 17 milliards de F CFA sur le riz. En 2022, il y a eu un manque à gagner de plus de 8 milliards sur le sucre. Sur le lait, il y a eu un manque à gagner de plus de 3 milliards de F CFA et sur l’huile alimentaire, plus 1 milliard de F CFA.
Le riz ne devrait pas connaître la cherté actuelle constatée dans les marchés de Bamako. Dans le cercle de Niono, on distingue deux principales saisons de production de riz, qui nécessite 120 à 135 jours de culture avant d’être récoltée. La première durant la saison des pluies, de juillet à novembre, et la seconde, en saison sèche chaude, de janvier à juin, également appelée contre-saison. Mais le Mali importe 10% de sa consommation de riz pour faire face à la demande nationale.
Selon l’Institut national de la statistique du Mali (INSAT), la consommation annuelle du riz a augmenté de plus de 600 % dans les 50 dernières années, faisant du riz presque l’aliment de base du pays. Le riz est ainsi la première céréale consommée en zone urbaine. La variété cultivée ici est le “paddy” communément appelée gambiaka. Il s’agit de l’espèce la plus recherchée par les consommateurs, et qui est généralement disponible sur le marché avec des impuretés.
C’est dans ce cadre qu’intervient depuis 2017 le Programme Alimentaire Mondial (PAM) au Mali et son partenaire SOCODEVI, grâce à l’appui de la Banque Mondiale afin d’améliorer la qualité du riz et permettre de créer de la valeur ajoutée tout en limitant les pertes lors de la transformation. Pour promouvoir la chaîne de valeur, il est nécessaire de répondre aux besoins de renforcement des capacités tout au long de la chaîne et de mieux organiser les acteurs pour fournir un produit de qualité sur le marché. Réduire les pertes post-récoltes est un enjeu majeur à l’échelle du pays.
A Niono, la modernisation d’une unité de transformation a permis de créer de la valeur ajoutée et vendre le produit fini autour de 300 Francs CFA le kilogramme, lorsque le riz brut est généralement vendu à 150 Francs CFA. De nouvelles décortiqueuses, capables de traiter 900 à 1 200 kg de riz par heure, existent et sont gérées par des comités de gestion composés de 5 personnes membres.
De meilleures installations de séchage et de stockage et de meilleures pratiques de gestion introduites au niveau des Organisation Paysannes permettent de réduire les bris tout en améliorant la qualité afin d’augmenter la valeur finale. À travers l’amélioration de la chaîne de valeur, grâce au contrôle de la qualité et à une mécanisation accrue, à la formation et à la facilitation de l’accès aux services financiers et aux intrants, les organisations paysannes ciblées sont mieux préparées pour assurer la qualité du riz vendu par leurs agriculteurs.