Si tous les observateurs s’accordent à dire que seul un régime de Transition peut initier et faire aboutir un changement constitutionnel au Mali, l’on se perd en conjectures face aux rejets successifs que l’initiative du Col Assimi Goïta essuie actuellement.
La volonté et la nécessité de doter le Mali d’une nouvelle Loi fondamentale, ou tout au moins, de réviser celle en vigueur, la Constitution du 25 févier 1992, ne souffrent l’ombre d’aucun doute. Ne serait-ce que le point relatif à la disposition communautaire UEMOA relative à la création d’une Cour des Comptes impose cette retouche constitutionnelle au Mali.
Seulement voilà, le contexte sociopolitique du pays a fait que toutes les initiatives visant à réviser la Loi fondamentale malienne ont échoué, du président Alpha Oumar Konaré au président IBK, en passant par ATT. Les calculs politiciens (réélections et alliances politiques mal négociés) et les erreurs timing, mais aussi de contenu du texte adopté par les gouvernements ont pu justifier ces échecs. Ce qui a poussé les observateurs avertis à conclure qu’un régime d’exception peut initier et réussir à relever cette réforme majeure. C’est sans compter avec les réelles intentions d’une classe politique plutôt arcboutée sur ses ressorts démocratiques. « Comment un régime militaire, qui a mis les acteurs politiques en grande difficultés, peut ravir la vedette à ces derniers ? », pense-t-on tout bas à Bamako…
En effet, le pouvoir de Transition n’a pas su rassembler la classe politique dans la mise en place des organes de cette période transitoire. Le chef de l’Etat et ses collaborateurs ont plutôt mis en place un système de marginalisation des partis politiques les plus représentatifs des populations maliennes. A titre d’exemple, l’ADEMA-PASJ, le RPM, la CODEM, l’ASMA-CFP, l’UM-RDA Faso Jigi, les FARE Anka Wuli, le PS Yelen Kura, etc ne peuvent se targuer d’avoir un représentant au sein du gouvernement de Transition. Idem pour le CNT, où ces partis ne sont pas représentés, même si des cadres issus de leurs rangs y sont. S’y ajoute que les tenants et sympathisants du pouvoir se sont inscrits dans le discours de diabolisation de la « vielle classe politique », accusée d’être la seule responsable des crises que vit le pays depuis 2012…
Sans compter que le pouvoir de Transition ne s’est pas privé de priver les politiques des dividendes de la gouvernance, en particulier du financement public des partis politiques, depuis 2018.
Ce sont là des motifs qui incitent la classe à refuser d’accompagner la réforme fondamentale de cette transition, celle de l’adoption d’une nouvelle Constitution. Le chef de l’Etat, le Colonel Assimi Goïta doit alors saisir la balle de ces rejets successifs au rebond pour rectifier le tir. Car, il s’agit des vétos successifs de l’ADEMA-PASJ, du PARENA, des FARE Anka Wuli, de la CODEM et de diverses autres organisations et partis politiques. Tout ce beau monde demande que le processus référendaire soit purement et simplement abandonné, sous le motif qu’il n’est pas consensuel.
Il appartient désormais au chef de la Transition de reprendre la main à travers une seconde « rectification ». Car, une initiative référendaire est foncièrement politique. C’est au colonel Assimi Goïta d’ouvrir des discussions au sommet en vue de mieux associer la classe politique à la gestion des affaires urgentes. Cela peut passer par un réaménagement du gouvernement, afin de retrouver en plus de la souveraineté, un large consensus pour donner des chances de succès à la marche vers le référendum constitutionnel et celle vers les prochaines élections générales. Le plus tôt sera le mieux !