La région du Sahel est l’un des endroits les plus difficiles au monde pour les enfants, et nombre d’entre eux sont confrontés à des conflits, au changement climatique et à l’insécurité alimentaire. Pour détailler ces faits, Nicola Bennett, chef des urgences de l’UNICEF pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre a évoqué la gestion des crises et les prestations offertes pour les communautés.
Selon Nicola Bennett, chef des urgences de l’UNICEF pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, le Sahel désigne 10 pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre à savoir : le Burkina Faso, le Cameroun, le Tchad, la Gambie, la Guinée, la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Nigéria et le Sénégal. C’est une région qui fait rarement la une des journaux ou qui domine le cycle de l’actualité. C’est l’un des endroits les plus difficiles au monde pour les enfants à grandir.
Il en veut pour preuve le fait que 12% des enfants du monde vivent dans la région et souffrent d’un fardeau disproportionné de privations infantiles. Ainsi, la région abrite un tiers des enfants du monde qui meurent avant d’avoir atteint l’âge de 5 ans et un tiers des enfants du monde qui ne sont pas scolarisés. Pire, 40% de toutes les mères qui meurent en couches se trouvent dans cette région. De plus, au cours des cinq ou dix dernières années, surtout au Sahel, la situation s’est beaucoup compliquée à cause des conflits. Les conflits s’accompagnent de violences et de déplacements. Il y a eu une augmentation significative des attaques contre les civils.
Les pays du Sahel central – Burkina Faso, Mali et Niger – accueillent actuellement 3 millions de personnes déplacées. Et ces conflits ont été profondément perturbateurs pour beaucoup d’autres personnes, pour leur mode de vie. Aussi, plus de 8 000 écoles au Burkina Faso, au Mali et au Niger sont fermées, soit parce qu’elles ont été attaquées, soit parce qu’elles ont été menacées. L’insécurité alimentaire et les autres crises affectant les enfants du Sahel – toutes compliquées par le conflit en cours – font rarement la une des journaux. L’UNICEF surveille et signale les violations graves contre les enfants, et nous voyons beaucoup d’enfants directement pris dans le conflit et même directement attaqués.
Pour, Nicola Bennett, il existe différents niveaux de violence et les conflits traversent les frontières. D’après lui, une partie de la raison pour laquelle ce n’est pas tellement sur le radar international est que c’est une situation compliquée. Le changement climatique est un facteur. La crise climatique a entraîné beaucoup de sécheresses et beaucoup d’inondations. Il existe une insécurité alimentaire et une malnutrition sous-jacente. Il y a donc un conflit sur les ressources – l’eau, les pâturages.
De nombreuses personnes dans cette partie du monde survivent principalement grâce à l’agriculture ou à l’élevage, et les quelques ressources disponibles sont donc vivement contestées. Certains des mécanismes traditionnels de résolution des conflits qui existaient autrefois entre les communautés, entre les agriculteurs et les éleveurs, deviennent de plus en plus fragiles. Politiquement, la région est fragile. Deux des trois pays du centre du Sahel, le Mali et le Burkina Faso, ont connu deux coups d’État militaires au cours des trois dernières années. Sans compter le fait que des individus ont pris les armes contre leurs propres gouvernements ou dans certains cas, contre les gouvernements des pays voisins.
Ils ont une présence dans le pays où il y a un vide d’autorité et où ils peuvent être présents. Et certains de ces groupes sont liés à la dynamique des conflits mondiaux. L’État islamique et Al-Qaïda soutiennent certaines des activités des groupes armés dans ces États.
Les chiffres des personnes déplacées internes augmentent assez rapidement
Par ailleurs, dans les trois pays, il y a plus de déplacés internes que de réfugiés, mais il y a aussi des réfugiés qui vont dans les deux sens. Les gens peuvent fuir temporairement vers des endroits plus sûrs, puis repartir. On parle de déplacements multiples, ou déplacement circulaire. Au cours des deux dernières années, le conflit s’est propagé à certains des pays de la côte ouest-africaine, sur le golfe de Guinée, dans des pays qui n’étaient auparavant pas considérés comme touchés par le conflit, comme le Bénin, le Togo, le Ghana et la Côte d’Ivoire. Et donc dans ces pays, nous voyons maintenant aussi des incidents de sécurité. Nous assistons à des déplacements, à la fois des déplacements internes et des réfugiés traversant les frontières.
Le rythme auquel les choses se détériorent dans certains pays du Sahel central, est vraiment inquiétant. Certaines parties de nos pays qui étaient auparavant relativement plus stables sont désormais également très précaires. Et il y a eu plus d’attaques, plus de combats. Les chiffres des personnes déplacées internes augmentent assez rapidement.
Il y a beaucoup d’endroits dans le monde où des enfants se retrouvent au milieu d’un conflit ou d’une catastrophe naturelle. Et chaque fois qu’il y a une urgence, les enfants ont tendance à souffrir en premier, et souvent ce sont eux qui souffrent le plus. Généralement, les problèmes auxquels les enfants sont confrontés dans cette partie du monde sont : les difficultés d’accès à l’eau et à l’assainissement, la nutrition et l’école.
A cette situation s’ajoute aussi la rareté des ressources pour financer les besoins humanitaires dont les enfants méritent. Cela fait quelques années que les ressources mobilisées sont bien en deçà des besoins réels. On préfère surtout orienter les ressources vers d’autres secteurs comme l’armement qui est l’une des causes des problèmes que le Sahel connait aujourd’hui.