L’ex-PM Soumeylou Boubeye Maïga est décédé, le lundi 21 mars 2022 à l’âge de 67 ans dans une clinique de Bamako, alors qu’il était en détention en raison d’un dossier de « corruption » le concernant. Face aux critiques et dénonciations qui se poursuivent sur le sujet, le procureur général près la Cour Suprême du Mali a fait, le 16 mars 2023, un communiqué avertissant les uns et les autres. Se sentant personnellement ciblé, le magistrat Cheick Mohamed Chérif Koné, président de l’AMPP réplique.
Le magistrat Koné qualifie le communiqué du procureur « de sans tête ni pied ».Aussi, argue-t-il, le procureur général près la Cour Suprême du Mali est, dans cette affaire SBM, « impliqué dans des faits de forfaiture ». Lesquels demeurent encore pendants devant la justice. Le président de l’Association malienne des procureurs et poursuivants, Cheick Mohamed Chérif Koné souligne être important de rappeler la teneur de l’article 75 du code pénal au procureur général. Cet article, rapporte-t-il dans sa réplique, dispose : « Seront coupables de forfaiture et punis de cinq à vingt ans de réclusion, tout officier de police judiciaire, tous procureurs généraux ou de la république, tous substituts, tous juges qui auront provoqué, donné ou signé un jugement, une ordonnance ou un mandat tendant à la poursuite personnelle ou à la mise en accusation soit d’un Ministre, soit d’un membre de l’Assemblée nationale sans les formalités ou les autorisations prescrites par la loi, ou qui n’auront pas suspendu la détention ou la poursuite… ou qui, hors les cas de flagrant délit, auront sans les mêmes modalités et autorisations, donné ou signé l’ordre ou le mandat de saisir ou arrêter un ou plusieurs ministres ou membres de l’Assemblée nationale ». Ainsi, Cheick Mohamed soutient que le « procureur général, plutôt que de se livrer à une fuite en avant, voire un chantage de diversion, aurait dû porter plainte pour dénonciation calomnieuse relativement à ces faits criminels, s’il ne se reprochait rien ». A entendre le magistrat syndicaliste, le président de la cour suprême et un procureur général près la cour « obligent », dans cette affaire SBM, le premier avocat général, non moins commissaire du droit et défenseur de la loi en charge de veiller à la régularité des procédures « à prendre ses responsables pour les dénoncer à qui de droit, lorsqu’ils s’aventurent à poser des actes de forfaiture avérée ». Cela, précise-t-il, « sur instruction du pouvoir politique, en violation de leur serment ». Le président de l’AMPP énonce défier le procureur général de prendre une seule disposition ou démarche jurisprudentielle. Laquelle permet à la cour suprême de « se substituer à la Haute cour de justice, pour s’auto saisir des dossiers impliquant des justiciables de cette juridiction, jusqu’à placer des ministres sous mandat de dépôt, en l’absence de toute résolution de mise en accusation de l’Assemblée nationale ». S’il y a quelques magistrats maliens en déphasage avec la loi, voire en conflit avec le serment, l’éthique et la déontologie de la profession, « ce sont justement ces deux hauts magistrats du pays ». Cheick Mohamed Chérif estime, sans ambages, que le président de la cour suprême et le procureur général ont pris, dans ce dossier, « la responsabilité de poser des actes de forfaiture sur instruction du politique pour, précise-t-il, des intérêts personnels et égoïstes ». Dans ce communiqué de trois pages, le coordinateur général de la Coordination des Organisations de l’appel du 20 février 2023 pour sauver le Mali ne mâche pas ses mots. Le magistrat a d’ailleurs saisi l’occasion pour réitérer « que l’on est bien dans une tragédie judiciaire », dans cette histoire du décès de Soumeylou Boubeye Maïga. Puis d’arguer ceci à qui voudra l’entendre : « Les expressions de tragédie judiciaire, qui semblent déranger, sont bien appropriées en ce qu’elles découlent des propres termes du procureur général lui-même, lors de son mea-culpa, au moment de la remise du corps de Soumeylou à ses parents ».