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Rapport du Secrétaire général de l’ONU sur la situation au Mali
Publié le mercredi 12 avril 2023  |  aBamako.com
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© Autre presse par DR
Journée internationale de la fin de l’impunité pour les crimes commis contre des journalistes, 2 novembre 2022: Message du Secrétaire Général de l’ONU
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I. Introduction
1. Par sa résolution 2640 (2022) du 29 juin 2022, le Conseil de sécurité a prorogé
jusqu’au 30 juin 2023 le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des
Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) et a prié le Secrétaire
général de lui faire rapport tous les trois mois sur la suite donnée à ladite résolution.
Le présent rapport porte sur les faits nouveaux survenus au Mali depuis la publication
du précédent rapport (S/2023/21), en date du 6 janvier 2023.
2. Dans l’ensemble du rapport, l’accent est mis sur les quatre paramètres essentiels
à l’exécution du mandat de la MINUSMA, tels que présentés dans le rapport du
Secrétaire général sur l’examen interne de la Mission (S/2023/36). Ces paramètres
sont les suivants : a) l’avancement de la transition politique, conformément au
chronogramme électoral publié par les autorités de transition ; b) les progrès
accomplis dans l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali ;
c) la liberté de circulation, y compris pour les moyens de renseignement, de
surveillance et de reconnaissance essentiels à la sûreté et à la sécurité des soldats de
la paix ; d) la capacité d’exécuter l’intégralité du mandat que lui a confié le Conseil
de sécurité, y compris les dispositions relatives aux droits humains.
II. Principaux faits nouveaux sur le plan politique
3. La période considérée a été marquée par les nouveaux progrès accomplis dans
le processus de transition, l’impasse dans laquelle l’application de l’Accord pour la
paix et la réconciliation au Mali (ci-après « l’accord de paix») et le lancement officiel
de la stratégie de stabilisation des régions du centre du Mali arrêtée par le
Gouvernement.

A. Transition politique
4. Le 27 janvier, le Président de la transition, le colonel Assimi Goïta, a nommé
les 72 personnes, dont 15 femmes (soit 20,83 %), composant la Commission qu’il a
créée par décret le 19 décembre 2022 et chargée d’examiner et de finaliser le projet
de constitution. Des membres des autorités de transition et d’autres institutions,
d’anciens responsables gouvernementaux et des représentants de syndicats, de partis
politiques et de la société civile siègent à la Commission. Le 27 février 2023, à l’issue
de ses délibérations, la Commission a remis le texte du projet de constitution révis é
et son rapport de fin de mission au Président de la transition. Le 20 mars, le Président
de la transition a présenté le projet de constitution aux acteurs politiques, aux forces
vives de la nation, dont des représentants des partis politiques, de la société civile et
des groupes armés signataires, et aux chefs traditionnels. Il a également demandé à
l’ensemble des parties prenantes de contribuer à la vulgarisation du projet de
constitution.

5. Parmi les dispositions clés du nouveau texte, on mentionnera les suivantes : la
possibilité d’engager une procédure de destitution du Président pour trahison ;
l’interdiction faite aux députés de changer de parti politique, c ’est-à-dire qu’un
membre du Parlement qui démissionnerait de son parti serait automatiquement dé chu
de son mandat de député et que l’adhésion à un autre parti politique vaut démission ;
la possibilité pour les citoyens de saisir le Conseil supérieur de la magistrature et la
Cour constitutionnelle ; le principe de bonne gouvernance ; la laïcité ; l’affirmation
de la lutte contre la corruption ; l’octroi du statut de langues officielles aux langues
nationales, le français devant une langue de travail ; la mobilisation générale des
citoyens en cas de nécessité. Par ailleurs, le projet de constitution révisé fait référence
à des éléments figurant dans l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali,
notamment à la mise en place de la deuxième chambre du Parlement et à la
reconnaissance du rôle des autorités traditionnelles et des modes alternatifs et
traditionnels de règlement des différends.

6. Le 27 janvier, alors que la version finale du projet de constitution était en cours
d’élaboration, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), qui avait au
départ accepté de participer au processus de révision constitutionnelle, est revenue
sur sa décision au motif que le processus de paix était dans une impasse. Le
lendemain, la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam
Mahmoud Dicko et la Convergence pour le développement du Mali ont publié des
déclarations dans lesquelles elles se disaient opposées à cette révision. De son côté,
le 2 février, le Cadre de partis et regroupements politiques pour le retour à l’ordre
constitutionnel, qui a participé aux travaux de la Commission, a plaidé en faveur
d’une révision minimale de la Constitution en vigueur, préférable selon lui à une
révision complète de la Constitution.

7. Après que le projet de constitution a été remis au Président de la transition le
27 février, d’autres parties prenantes ont fait des déclarations. Le 2 mars, la Ligue
islamique des imams du Mali a publié une déclaration dans laquelle elle s’est opposée
à ce que la laïcité devienne une caractéristique de l’État malien. Le 4 mars, le Parti
pour la renaissance nationale a dit déplorer la concentration excessive du pouvoir
entre les mains de la présidence envisagée dans le projet de constitution et l’absence
de consensus national à l’appui du processus. De leur côté, l’Union nationale des
travailleurs du Mali et d’autres mouvements sociopolitiques se sont déclarés
pleinement favorables au projet de texte.
8. Le 10 mars, les autorités de transition ont annoncé le report du référendum
constitutionnel jusqu’à nouvel ordre et préciser que ce report tenait au fait qu’elles
souhaitaient appliquer les recommandations des Assises nationales de la refondation,
et assurer notamment la pleine mise en œuvre opérationnelle de l’Autorité
indépendante de gestion des élections (AIGE), et la mise en place de ses antennes
régionales ainsi que la vulgarisation du projet de réforme constitutionnelle. La
nouvelle date sera communiquée à l’issue de consultations avec l’AIGE et les parties
concernées.

9. Les autorités de transition ont pris des mesures en vue de faciliter la tenue des
élections. Le 10 janvier, le Président de la transition a installé dans leurs fonctions les
15 membres de l’AIGE, dont quatre femmes (soit 26,6 % des membres). L’AIGE s’est
ensuite employée à mettre en place ses antennes locales (coordinations) et notamment
à recruter environ 3 000 membres du personnel. Par ailleurs, le 14 mars, le Ministère
de l’administration territoriale et de la décentralisation a consulté les parties
concernées au sujet des modalités de nomination des représentants des pouvoirs
publics qui siégeront dans les coordinations de l’AIGE.

10. La MINUSMA a recruté 182 agents électoraux, dont 56 femmes (soit 30,77 %)
qui ont suivi une formation, du 6 au 10 février, avant d’être affectés à travers le pays.
Un groupe de travail conjoint a été créé afin que l’AIGE et la MINUSMA coordonnent
les questions liées à l’appui technique et logistique à apporter en vue des élections.
Par ailleurs, l’Équipe intégrée des Nations Unies pour l’appui électoral, composée de
la MINUSMA, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et
de l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes
(ONU-Femmes), a fourni au Ministère de l’administration territoriale et de la
décentralisation et à la Cour constitutionnelle une assistance technique, du matériel
informatique et des véhicules d’une valeur de 2 millions de dollars. Un appui au
renforcement des capacités de 16 organisations de la société civile est actuellement
apporté en vue d’informer les électeurs, de prévenir les violences liées aux élections
et de promouvoir les questions de genre dans le cadre des élections. Dans le même
temps, des centres de gestion de crise tenus par des femmes ont été créés dans les
régions de Kayes, de Ségou, de Sikasso et de Koulikoro afin de faciliter la
participation des femmes aux élections.

11. Le 28 février, le Conseil national de transition a adopté des modifications
apportées à la loi électorale de juin 2022. Les modifications avaient été proposées par
le Gouvernement à l’issue de consultations tenues le 12 janvier entre le Ministère de
l’administration territoriale et de la décentralisation, d’une part, et, d’autre part, des
partis politiques et des organisations de la société civile. Plus précisément, le
Gouvernement a proposé que les élections aient lieu trois mois après l’installation des
bureaux de coordination de l’AIGE, que les membres des Forces de défense et de
sécurité maliennes aient la possibilité de voter par anticipation afin qu’ils puissent
accomplir leur mission de sécurisation des bureaux de vote le jour du scrutin, que les
modalités de vote pour les personnes déplacées à l’intérieur du pays soient précisées,
que la carte nationale biométrique sécurisée fasse office de carte d’électeur et que les
listes électorales soient mises à jour conformément aux six lois sur la réorganisation
territoriale et administrative adoptées le 19 février 2022 (S/2023/21, par. 8) et
promulguées le 13 mars 2023.
12. En vertu de ces lois, le pays compte 19 régions, 168 cercles, 472
arrondissements et 859 communes ainsi que le district de Bamako. Les textes de loi
prévoient, entre autres, la création de circonscriptions administratives déconcentrées
(régions, cercles et arrondissements) dans l’ensemble du pays et la délimitation des
frontières administratives des nouvelles régions de Kita, Dioïla, Nara, Bougouni,
Koutiala, San, Douentza et Bandiagara.

13. Dans ce contexte, une nouvelle dynamique a été observée dans le paysage
politique. Le 5 janvier, le Président de l’Assemblée nationale en exercice lors du coup
d’État d’août 2020, Moussa Timbiné, a démissionné du Rassemblement pour le Mali
et créé un nouveau mouvement politique appelé Convergence 2023. Le 28 janvier, le
Président de l’Union pour la République et la démocratie, Gouagnon Coulibaly, a
annoncé la formation d’une plateforme politique dénommée Coalition pour un
nouveau Mali. Le même jour, l’ancien Ministre de l’agriculture, Moulaye Ahmed
Boubacar, a lancé un nouveau parti politique, le Parti malien du travail et de la
refondation. Le 20 février, 12 entités, dont Espérance Nouvelle Jigiya Kura, dirigée
par l’ancien Ministre des sports et Président de la Convergence pour le développement
du Mali, Housseini Amion Guindo, et la Coordination des mouvements, associations
et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko ont annoncé la création d’une coalition
appelée la Coordination des organisations de l’appel du 20 février 2023 pour sauver
le Mali.

14. Les autorités de transition n’ont pas autorisé la tenue de réunions du Cadre de
partis et regroupements politiques pour le retour à l’ordre constitutionnel et
d’Espérance Nouvelle Jigiya Kura initialement prévues le 4 et le 25 février,
respectivement, pour des raisons de sécurité d’après ce qui a été rapporté. Le
20 février, des inconnus ont saccagé la Maison de la presse lors d’une réunion de
l’Appel citoyen pour la réussite de la transition. Condamnant cet acte, qu’elles ont
qualifié de violation de la liberté d’expression, certaines parties ont demandé aux
autorités de transition d’ouvrir une enquête et de traduire les auteurs en justice. La
Commission nationale des droits de l’homme a rappelé l’obligation faite à l’État de
promouvoir le respect des droits et libertés fondamentaux et demandé instamment aux
médias et à la population de s’abstenir d’inciter à la haine et à la violence.
15. Dans le cadre du suivi de la mise en œuvre des recommandations des Assises
nationales de la refondation relatives aux réformes, les 7 et 8 février, le Ministère de
l’administration territoriale et de la décentralisation a organisé, avec l’aide de la
MINUSMA, un atelier à l’intention de représentants de l’administration publique
centrale et régionale et des autorités locales afin que le cadre politique national
d’administration territoriale soit approuvé avant d’être soumis au Conseil des
Ministres. De même, l’Équipe intégrée des Nations Unies pour l’appui électoral a aidé
le Ministère de l’administration territoriale et de la décentralisation et le Ministère de
la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille à organiser à Bamako, du
28 février au 4 mars, un séminaire de haut niveau en vue d’élaborer un document
d’orientation pour la prise en compte des questions de genre dans l’ensemble des
réformes politiques et institutionnelles.
16. Le 18 février, la Conférence des chefs d’État et de gouvernement des États
membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest
(CEDEAO) a convoqué un sommet extraordinaire en marge de la trente-sixième
session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’Union
africaine à Addis-Abeba afin d’examiner, entre autres, les transitions en cours au
Burkina Faso, en Guinée et au Mali. Dans le communiqué final 1 , la Conférence des
chefs d’État et de gouvernement des États membres de la CEDEAO a décidé de
maintenir les sanctions visant actuellement les trois pays et d’imposer des
interdictions de voyager à des membres des gouvernements et autres hauts
responsables des trois pays. Cette décision a été prise comme suite à la demande
conjointe que les trois pays avaient soumise le 9 février afin que l’Union africaine et
la CEDAO lèvent les sanctions et autres restrictions qu’elles leur avaient imposées.
17. Du 20 au 22 février, le Médiateur de la CEDEAO et ancien Président du Nigéria,
Goodluck Jonathan, s’est rendu au Mali pour se faire une idée de l’état d’avancement
de la transition. Il a rencontré les membres du comité de suivi local de la transition
et, avec eux, a tenu des consultations avec le Ministre des affaires étrangères, la
Commission de suivi du calendrier des réformes politiques et institutionnelles ainsi
qu’avec le Président de la transition. Le Médiateur a brièvement pris la parole devant
les représentants de partis politiques et des acteurs de la société civile lors d’une
réunion présidée par le Ministre de l’administration territoriale et de la
décentralisation. Les autorités de transition ont informé le Médiateur des progrès
accomplis depuis juillet 2022, tout en admettant que du retard avait été pris dans
__________________

l’exécution de certaines activités essentielles, tels la mise en place de l’AIGE au
niveau local et le processus constitutionnel. Le Médiateur a pris note avec satisfaction
des progrès accomplis et a demandé instamment aux autorités de tenir le cap de façon
à ce que l’ordre constitutionnel soit rétabli avant mars 2024, comme elles s’y étaient
engagées auprès de la CEDEAO.

B. Accord pour la paix et la réconciliation au Mali
18. Après que les mouvements signataires ont suspendu leur participation aux
mécanismes d’application de l’accord de paix en décembre, des initiatives ont été
prises en vue de sortir de l’impasse. Les 9 et 10 janvier, le Ministre algérien des
affaires étrangères, Ramtane Lamamra, s’est rendu à Bamako afin de s’entretenir avec
les autorités maliennes, notamment avec le Président de la transition, ainsi qu ’avec
les mouvements signataires, au sujet de la voie à suivre. Le 15 janvier, le Ministre
malien des affaires étrangères, Abdoulaye Diop, et le Ministre malien de la
réconciliation nationale, de la paix et de la cohésion sociale, le colonel-major Ismaël
Wagué, ont rencontré le Président de la République algérienne, Abdelmadjid
Tebboune, et M. Lamamra à Alger. À la suite de ces rencontres, le 24 janvier, les
autorités maliennes ont proposé que la septième session de haut niveau du Comité de
suivi de l’Accord soit organisé avant la mi-février en vue de donner les assurances
nécessaires à toutes les parties concernées. La session en question n’a pas encore eu
lieu car des discussions sont en cours afin que, au préalable, les mouvements
signataires participent de nouveau aux mécanismes de suivi et d’application de
l’accord de paix.
19.

Le 1er février, la Médiation internationale a rencontré la direction de la CMA à
Kidal, où cette dernière a une nouvelle fois demandé qu’une réunion soit organisée
en terrain neutre en vue de discuter de la viabilité de l’accord de paix et que la
participation de la Médiation internationale soit plus active, conformément à
l’article 52 de l’accord de paix. Le Gouvernement a cependant émis des réserves au
sujet de la tenue de discussions sur l’accord de paix en dehors du territoire malien.
Le 13 février, la Médiation internationale a rencontré la Plateforme et les
Mouvements de l’inclusivité à Bamako. Le 14 février, elle a été reçue par M. Wagué.
Le 20 février, elle a demandé instamment aux parties de faire preuve d’un engagement
renouvelé et de s’abstenir de faire toute déclaration ou de commettre tout acte de
nature à compliquer davantage la situation et les efforts déployés afin qu’une session
de haut niveau du Comité de suivi de l’Accord soit organisée au plus tôt. Du 20 février
au 3 mars, les responsables de la CMA et de la Plateforme se sont rendus en Algérie.
Ils ont été reçus par M. Tebboune et M. Lamamra. À cette occasion, la CMA et la
Plateforme, sous l’égide du Cadre stratégique permanent pour la paix, la sécurité et
le développement, ont annoncé qu’une vaste opération de sécurité serait menée afin
de protéger la population contre les groupes extrémistes et terroristes dans les régions
du nord du Mali. Le Gouvernement a estimé que cette initiative constituait une
violation de l’accord de paix et a averti qu’elle risquait de nuire au processus de paix.

20. L’impasse persistante a également retardé l’élaboration du plan stratégique
national de désarmement, de démobilisation et de réintégration pour 2022-2024. La
Commission nationale de désarmement, démobilisation et réintégration et la
MINUSMA ont néanmoins continué de s’occuper des aspects opérationnels,
notamment de la remise en état des infrastructures existantes dans les sites de
désarmement, démobilisation et réintégration et la gestion des questions liées au
domaine médical, aux transports et à la formation, en prévision du lancement du
processus global de désarmement, démobilisation et réintégration. La Commission a
également poursuivi ses efforts visant à faciliter la réinsertion socioéconomique des
ex-combattants et du personnel associé. Du 13 au 28 février, elle a commencé à organiser l’ouverture de camps à Gao, Kidal, Ménaka et Tombouctou destinés à
accueillir 900 femmes associées à des groupes armés.

21. La MINUSMA a continué d’exécuter des projets de lutte contre la violence de
proximité visant à ce que la population soutienne le processus de désarmement, de
démobilisation et de réintégration et le processus d’intégration et à prévenir le
recrutement de jeunes à risque par les groupes armés. Au total, 35 projets sont en
cours dans les régions de Gao, de Kidal, de Mopti et de Tombouctou ; 26 342
personnes, dont 12 242 femmes (soit 46,47 %), devraient en bénéficier. Ces projets
sont axés sur la formation professionnelle, le système d’eau, l’agriculture, la remise
en état des infrastructures de base et les activités génératrices de revenus.
C. Stabilisation et rétablissement de l’autorité de l’État dans le centre
du pays

22. Le 17 mars, à Mopti, le Premier Ministre, Choguel Kokalla Maïga, a
officiellement lancé la stratégie de stabilisation des régions du centre du Mali. Sur le
plan opérationnel, le secrétariat permanent du Cadre politique de gestion de la crise
du Centre s’est employé en priorité à renforcer ses capacités, notamment à mobiliser
les ressources nécessaires et à renforcer la coordination entre les ministères
d’exécution concernés et entre ces ministères et les gouverneurs des cinq régions du
centre, les organisations de la société civile, les organisations non gouvernementales
et les partenaires techniques et financiers encadrant la mise en œuvre. L’application
du plan d’action triennal (2022-2024) de la stratégie coûtera 956,1 milliards de francs
CFA d’Afrique de l’Ouest ; le financement sera assuré au moyen de ressources
nationales (205,5 milliards de francs CFA) et de la mobilisation des partenaires
techniques et financiers (750,6 milliards de francs CFA, soit 75 % du montant total).
Le secrétariat permanent a mené diverses activités de suivi et fait plusieurs états des
lieux, notamment en ce qui concerne l’affectation de responsables élus et de
responsables locaux, la réouverture d’écoles et le fonctionnement des services
sociaux et des services de santé.

23. Les autorités régionales ont elles aussi pris des mesures afin de faire avancer
l’application de la stratégie. À Mopti, le Gouverneur a défini des mesures prioritaires
pour la région, axées sur la cohésion sociale, l’accès aux services sociaux de base et
l’extension de l’administration publique. À San, le Gouverneur a lancé une campagne
visant à faire connaître une loi pastorale encadrant les activités liées au pastoralisme
et à la transhumance. Le Gouverneur de la région de Bandiagara a déclaré la ville
zone d’interdiction des armes.

24. La MINUSMA a continué de collaborer avec le secrétariat permanent du Cadre
politique de gestion de la crise du Centre et facilité la mise en place du mécanisme de
coordination interministérielle nationale et des comités régionaux du secrétariat
permanent. Elle a financé deux projets ayant trait à la remise en état de la préfecture
de San et au lancement et à la diffusion de la stratégie. Le premier projet devrait
améliorer les conditions de travail des 33 fonctionnaires de l’administration de la
région, où vivent environ 335 000 personnes. Afin de promouvoir la participation des
femmes à l’élaboration des politiques, la MINUSMA a organisé deux ateliers, à
l’intention de 60 femmes et jeunes, à Mopti du 21 au 23 février et à Ségou du
28 février au 2 mars. À la suite d’une campagne de sensibilisation sur le rôle que les
commissions foncières peuvent jouer dans la promotion de la cohésion sociale et du
règlement des conflits qui a pris fin en 2022, la MINUSMA a facilité la création de
143 commissions foncières.
25. La MINUSMA a soutenu financièrement la création d’un centre de formation
local pour les jeunes dans la région de San afin de soutenir l’action que le
Gouvernement mène en vue de prévenir et combattre l’extrémisme violent. Du 2 au
11 janvier, elle a organisé trois ateliers sur la prévention de l’extrémisme violent à
l’intention de 150 jeunes et femmes jouant un rôle moteur à Bla, à San et à Ségou.
Elle facilite également la construction d’un centre régional pour les jeunes et d’une
maison de retraite.


III. Principaux faits nouveaux en matière de sécurité
et intervention de la MINUSMA

26. Les conditions de sécurité au Mali demeurent précaires. Les régions de Gao et
de Ménaka sont toujours l’épicentre des hostilités entre l’État islamique du Grand
Sahara et Jama’a Nusrat ul-Islam wa al-Muslimin qui entraînent, en plus des atteintes
et menaces dont les civils sont victimes, des déplacements massifs de populations.
Des éléments extrémistes ont également poursuivi les attaques dans le centre du pays.
Des attaques contre les Forces de défense et de sécurité maliennes ont été signalées
en janvier et en février dans les régions de Kayes et de Koulikoro.
27. Malgré ces attaques, les Forces armées maliennes ont maintenu la cadence des
opérations. Le 25 janvier, dans un communiqué, le Ministre de la défense a déclaré
que, depuis le 3 décembre, les forces armées maliennes avaient menées 62 missions
offensives, dont 22 opérations aéroportées, 20 missions de reconnaissance offensive,
17 frappes aériennes et 3 frappes d’artillerie dans différentes parties du Mali,
notamment dans les régions du centre.
28. L’insécurité continue de limiter la présence des autorités publiques. En janvier,
110 (soit 44 %) des 245 représentants des autorités administratives (gouverneurs,
préfets et sous-préfets) avaient pris leurs fonctions dans les régions du centre et du
nord du pays. Tous les gouverneurs se trouvaient dans leur lieu d’affectation, mais
seuls 67 % des préfets et 38 % des sous-préfets étaient en poste.
29. Pour aider les Forces de défense et de sécurité maliennes à faire face aux
problèmes de sécurité actuels, la MINUSMA a organisé, du 16 janvier au 24 février
à Bamako, des formations à l’intention de 56 sous-officiers de gendarmerie axées sur
diverses compétences telles que la protection des hautes personnalités, la gestion des
foules, la détection d’engins explosifs improvisés, la protection des droits humains,
le renseignement tactique, la sécurité des élections et le secourisme au combat. Ces
formations seront par la suite proposées à Mopti. Face aux attaques persistantes à
l’engin explosif improvisé menées contre les Forces de défense et de sécurité
maliennes, de janvier à mars, le Service de la lutte antimines a proposé cinq cours de
formation suivis par 18 officiers d’état-major et 33 autres membres des Forces de
défense et de sécurité maliennes. Par ailleurs, dans le cadre de la lutte contre
l’impunité, la MINUSMA a remis au groupe d’enquête malien spécialisé dans la lutte
antiterroriste 23 rapports de criminalistique et preuves scientifiques concernant des
affaires relatives à des attaques à l’engin explosif improvisé dont la Mission avait été
la cible entre avril 2021 et juin 2022.

30. La MINUSMA a proposé une formation et du matériel spécialisés en matière de
sécurité à des agents pénitentiaires travaillant à Bamako, Gao, Mopti et Tombouctou.
Elle a également apporté une assistance technique en vue d’améliorer les conditions
de détention dans des établissements pénitentiaires à Gao, Mopti et Tombouctou
conformément à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement
des détenus (Règles Nelson Mandela). Dans le cadre du fonds d’affectation spéciale
de la MINUSMA, 36 propositions de projet d’un montant total de 27 millions de
dollars ont été retenues en vue de faciliter la tenue d’élections présidentielle et
législatives crédibles et inclusives ainsi que le renforcement des institutions dans des
secteurs essentiels tels que l’état de droit, la promotion du dialogue et les droits
humains.

Nord du Mali
31. Dans la région de Gao, Jama’a Nusrat ul-Islam wa al-Muslimin et l’État
islamique du Grand Sahara s’affrontent pour étendre leur mainmise sur les territoires
et les ressources et ordonnent aux populations locales de partir sous peine de
représailles. Selon la Direction régionale du développement social et de l’économie
solidaire, depuis le 31 décembre 2022, 3 808 ménages, soit 16 824 personnes, sont
arrivées à Gao. Le 10 janvier, des extrémistes qui seraient affiliés à Jama’a Nusrat ul-
Islam wa al-Muslimin ont attaqué les villages de Egaf-narodj et de I-n-Tillit, dans le
cercle de Gao, et enlevé trois civils avant d’ordonner aux habitants de partir. Le
lendemain, la MINUSMA a activé un dispositif d’alerte rapide afin de faire face aux
menaces. Néanmoins, les autorités locales n’ont pas accordé d’autorisation de vol
pour des opérations visant à recueillir des informations et l’accès terrestre a dans un
premier temps été limité du fait de restrictions liées à des opérations militaires. Le
12 janvier, six camions à bord desquels se trouvaient 118 femmes sont arrivés dans la
ville de Gao depuis I-n-Tillit et, le 16 janvier, au moins 438 familles de I-n-Tillit et
des villages environnants ont trouvé refuge dans les différents camps de déplacés. Le
19 janvier, une patrouille de reconnaissance de la MINUSMA à destination de I-n-
Tillit et de Dorey a constaté que seul un petit nombre d’hommes civils se trouvaient à I-n-Tillit et à Dorey et que ceux-ci se préparaient à partir. Le 23 février, une autre
patrouille de reconnaissance de la Mission près de Doro, dans la commune d’I-nTillit, a fait des observations similaires.

32. Le 2 février, des attaques menées par l’État islamique du Grand Sahara dans le
village de Dorey ont entraîné une nouvelle vague de déplacements. Les assaillants
ont tué deux hommes et ont ordonné à la population de quitter le village. Ils ont
également saccagé et incendié des commerces et détruit le château d’eau. Le 3 février,
une patrouille terrestre de la MINUSMA à destination de Dorey n’a pas obtenu le feu
vert des Forces armées maliennes. Les 4 et 5 février, respectivement, deux camions
transportant 1 122 personnes déplacées pour l’un et 456 pour l’autre, en provenance
des villages de Dorey et Oussadja, dans la commune de I-n-Tillit, sont arrivés à Gao.
Le 8 février, lors d’une reconnaissance aérienne au-dessus du village de Dorey, la
MINUSMA a constaté que plusieurs bâtiments avaient été partiellement détruits ou
incendiés, notamment près du marché. Des personnes déplacées en provenance I-nTillit n’ont cessé d’arriver, en plus des 9 055 déplacés originaires de la commune qui
étaient arrivés à Gao en janvier et en février.
33. Le 25 janvier, le Ministre de la défense a fait savoir que les Forces armées
maliennes avaient escorté des civils, depuis des secteurs auxquels des groupes
extrémistes avaient imposé un blocus, notamment plus d’un millier de véhicules sur
l’axe Gao-Labézanga, et plus de 450 personnes et leur bétail de Tin-Hama à Ansongo.
Il a également annoncé que les bases de groupes terroristes avaient été détruites dans
les cercles d’Ansongo et de Tessit. Selon certaines informations, des éléments
extrémistes auraient imposé un autre blocus aux habitants de Tessit depuis janvier. Le
10 février, des affrontements entre Jama’a Nusrat ul-Islam wa al-Muslimin et l’État
islamique du Grand Sahara dans le village de Bakal, dans la commune de Tessit, lors
desquels plusieurs personnes auraient été tuées, ont été signalés à la MINUSMA. Les
Forces armées maliennes n’ont pas autorisé la MINUSMA à se rendre dans le secteur,
que ce soit pour un déploiement terrestre ou une reconnaissance aérienne car des
opérations militaires étaient en cours. Le 21 février, l’État islamique du Grand Sahara
a sommé la population de Tagarangabot, dans la commune de Tin-Hama (cercle
d’Ansongo), de quitter le village. La MINUSMA a pu surveiller la zone, notamment
par des moyens aériens, mais, le 24 février, le centre malien de conduite des
opérations aériennes a refusé qu’un vol de dissuasion soit effectué.
34. Dans la région de Ménaka, les civils sont exposés à des menaces similaires. Le
6 janvier, l’État islamique du Grand Sahara a attaqué le village d’Inagam (à 25 km de
Ménaka) et établi une présence dans ce secteur. Le 14 janvier, il a pris d’assaut le
village d’Iguedou, dans le cercle d’Inékar, tuant trois éleveurs et volant leur bétail.
Dans la ville de Ménaka, un membre du personnel de l’Organisation mondiale de la
Santé (OMS) qui avait été enlevé par des personnes armées non identifiées le
23 janvier a été libéré le 2 février. La MINUSMA a poursuivi ses patrouilles destinées
à établir la confiance à Ménaka avec les forces de sécurité maliennes et a assuré le
transport de 54 agents de police maliens supplémentaires déployés depuis Gao. Le
28 février, la MINUSMA a lancé quatre projets à effet rapide d’un coût total de
125 500 dollars destinés à remettre en état des bâtiments publics et à effectuer des
travaux de maintenance du système d’alimentation en eau du village de Tineloine.
35. Entre novembre et décembre 2022, à Gao, des membres de l’État islamique du
Grand Sahara ont mené deux attaques ciblées dans des camps de déplacés. Les

personnes visées étaient soupçonnées de donner des informations à Jama’a Nusrat ul-
Islam wa al-Muslimin ou aux Forces armées maliennes. La MINUSMA, en
coordination avec les Forces de défense et de sécurité maliennes, effectue en moyenne
cinq patrouilles par jour autour de six ensembles de camps de déplacés (17 camps au
total) à Gao, deux patrouilles solo autour de cinq camps à Ansongo et deux patrouilles
solo par jour autour de trois camps à Ménaka.
36. Dans la région de Kidal, des personnes déplacées originaires de Gao et de
Ménaka se sont installées dans 26 camps. Les 7 et 8 février, la MINUSMA a aidé
l’Équipe régionale d’appui à la réconciliation à organiser un dialogue, à Akoucheche
(commune de Kidal), visant à apaiser les tensions entre les déplacés et la population
locale. Des tensions similaires, au sujet de l’accès à l’eau, ont surgi à Inafaraq, dans
la commune d’Aguelhok (cercle de Tessalit). Conjointement avec l’Équipe régionale
d’appui à la réconciliation et une organisation non gouvernementale locale, la Mission
a facilité un dialogue communautaire visant à promouvoir la cohésion sociale. Par
ailleurs, quatre projets à effet rapide ont été mis en train à Kidal ainsi qu’à Inazaraf
et à Intahek (cercle de Kidal) afin que 2 050 personnes et 440 membres de l’unité de
l’armée reconstituée basée à Kidal puissent bénéficier d’un meilleur accès à l’eau.
37. Du 15 au 17 janvier, les mouvements signataires se sont réunis à Anéfis (région
de Kidal) afin d’élaborer un cadre de sécurité commun pour les régions du nord. La
décision des composantes de la CMA de fusionner a été annoncée lors d’une
cérémonie à Kidal le 8 février. Le 20 janvier, la MINUSMA a achevé un projet de
lutte contre la violence de proximité préalable au désarmement, à la démobilisation
et à la réintégration axé sur l’accès à l’eau et le maraîchage dont ont bénéficié 180
jeunes à risque, dont 80 femmes, à Matalmen, dans le cercle d’Aguelhok. Le
1 er février, un autre projet de lutte contre la violence de proximité a été lancé à
Tissakadawen, dans le cercle d’Aguelhok. Il était destiné à 433 bénéficiaires directs,
dont 135 femmes, tous des jeunes à risque et des ex-combattants et visait à offrir des
emplois temporaires et à améliorer l’accès à l’eau.

38. Dans la région de Tombouctou, le 1er mars, Jama’a Nusrat ul-Islam wa al-
Muslimin a mené une attaque contre le camp des Forces armées maliennes à

Acharane, tuant deux soldats et en blessant sept autres. La MINUSMA a fourni des
services d’évacuation sanitaire primaire aux Forces armées maliennes. Elle a continué
d’être la cible d’attaques. Les 9 et 10 janvier ainsi que le 7 et les 16 et 17 février
notamment, des convois de la Mission ont essuyé des tirs directs et été la cible
d’attaques à l’engin explosif improvisé le long de l’axe Tombouctou-Ber. La
MINUSMA a aidé les forces de sécurité maliennes à renforcer leurs capacités de
gestion des foules et de protection et de respect des droits humains dans le cadre des
activités de police. Elle a effectué 369 patrouilles, dont 12 de longue distance, afin
d’assurer la sécurité des populations civiles dans la ville de Tombouctou et dans les
cercles de Goundam, de Diré et de Niafunké. À Tombouctou, 26 patrouilles ont été
menées en coordination avec les forces de sécurité maliennes.

Centre du Mali
39. Dans le centre du Mali, le nombre d’attaques à l’engin explosif improvisé
commises par les groupes extrémistes violents a augmenté. Entre le 6 janvier et le
1er mars, 126 attaques, dont 29 à l’engin explosif improvisé, ont été enregistrées. Au
moins 206 personnes, dont 84 civils, y compris 6 civiles (cinq femmes et une fille)
ont été tuées et 80, dont 38 civils, y compris deux femmes, blessées. Le 21 février, un
convoi de la force de la MINUSMA a heurté un engin explosif improvisé dans le
cercle de Bandiagara ; trois soldats de la paix ont été tués et cinq autres blessés.
40. Le 7 février, dans un communiqué, le Ministère de la défense a confirmé que
dans la nuit du 6 au 7 février, les Forces armées maliennes avaient mené une opération
à Korientzé et N’Gorodia, dans la région de Mopti, et auraient tué 34 éléments
terroristes et saisi du matériel.
41. Dans la commune de Sokolo, dans le cercle de Niono, les Forces armées
maliennes ont gagné peu à peu du terrain, ce qui a entraîné une baisse du nombre
d’attaques et d’enlèvement et permis le retour d’un petit nombre de personnes dans
les secteurs de Bankass, de Koro et de Niono. Dans le prolongement de ces efforts, la
MINUSMA a mené des activités de réconciliation et facilité la création de conditions
propices au retour volontaire des déplacés. Dans la commune de Dioungani (cercle
de Koro), elle a facilité un dialogue en même temps que des projets tels que la
reconstruction de greniers.
42. Les régions de Bandiagara et de San ont été le théâtre de multiples attaques
menées par des groupes extrémistes violents. Le 24 janvier, des affrontements
auraient eu lieu entre les éléments de la Katiba du Macina et des dozos ( chasseurs
traditionnels) dans le village de Gomassagou, dans la commune de Léssagou Habbé.
Le 3 février, des extrémistes présumés ont attaqué Léssagou Habbé, probablement en
représailles. Le 23 février, des éléments radicaux présumés ont mené une attaque dans
le village de Kani Bozon, dans le nord de Bandiagara ; 13 personnes ont été tuées et
3 autres blessées lors de l’attaque, qui a entraîné le déplacement de près de 3 000
personnes. Rien qu’entre le 6 janvier et le 6 février, les intervenants humanitaire s ont
dénombré 9 222 déplacés de plus, dont 4 541 se trouvent dans la région de Bandiagara
et 4 681 dans la région de Mopti.

43. La MINUSMA a effectué 241 patrouilles, dont 22 avec les forces de sécurité
maliennes et 64 patrouilles de longue distance. Ces patrouilles visaient
principalement à sécuriser la route reliant Sévaré et Bandiagara. Du 23 janvier au
3 février, à Mopti, la MINUSMA a formé 25 membres de la Police nationale au
rétablissement et au maintien de l’ordre public. Pendant la même période, elle a formé
20 pompiers à des techniques de sauvetage et de secourisme. À Bla, Douentza, San,
Ségou, Sirakoro et Tominian, elle a mené 10 missions intégrées sur le terrain afin
d’avoir des échanges avec les populations locales au sujet de la cohésion sociale et
de la réconciliation.

IV. Situation des droits humains
44. Le 4 février, le Gouvernement de la transition a soumis le rapport du Mali au
titre de l’ Examen périodique universel, rapport qui avait été établi avec le soutien

technique et financier de la MINUSMA. Une collaboration a également été maintenue
avec les Forces armées maliennes en vue d’établir le projet de texte final d’un manuel
de formation sur les droits humains, qui a été validé par un comité technique conjoint
entre le 20 et le 22 février.

45. À la suite de la séance d’information et des consultations sur le Mali que le
Conseil de sécurité a tenues le 27 janvier, une représentante de la société civile, qui
avait été invitée à y présenter un exposé, a été la cible d’une campagne de dénigrement
et d’attaques verbales sur les réseaux sociaux. La Commission nationale des droits de
l’homme a exprimé sa préoccupation et demandé instamment aux autorités de
protéger les défenseurs des droits de l’homme et les membres de leur famille. Le
Représentant spécial a pris contact avec les autorités, qui ont indiqué qu ’elles
garantiraient la sécurité et la sûreté de cette personne.
46. Le 5 février, le Gouvernement de la transition a déclaré le Directeur de la
Division des droits de l’homme de la MINUSMA persona non grata, prétendument du
fait d’« agissements déstabilisateurs et subversifs » à l’occasion de « différentes
sessions » du Conseil de sécurité, et l’ont sommé de quitter le pays dans un délai de
48 heures. Le Secrétaire général, la MINUSMA et le Haut-Commissariat des Nations
Unies aux droits de l’homme ont dit déplorer vivement la décision du Gouvernement,
ont souligné qu’un dialogue constructif sur les questions relatives aux droits humains
était nécessaire et ont rappelé que la doctrine de persona non grata ne s’appliquait pas
au personnel des Nations Unies.
47. Conformément à la politique de diligence voulue en matière de droits humains,
28 évaluations des risques ont été réalisées pendant la période considérée au sujet du
soutien fourni aux forces de sécurité non onusiennes, y compris les Forces de défense
et de sécurité maliennes et la Force conjointe du Groupe de cinq pays du Sahel. Elles
avaient trait aux transports, au partage de renseignements, aux travaux de construction
ainsi qu’au carburant et aux rations destinées aux bataillons de la Force conjointe du
Groupe de cinq pays du Sahel. Entre autres, les mesures d’atténuation ci-après ont été
recommandées : limiter l’éventail et le type d’informations partagées avec les Forces
de défense et de sécurité maliennes, assurer le suivi de l’examen des cas de violations
avérées, faire mieux connaître le droit international des droits de l’homme, le droit
international humanitaire et le droit international des réfugiés.
48. La note trimestrielle sur la situation des droits de l’homme portant sur la période
allant d’octobre à décembre 2022 a été publiée le 22 mars 2023. En janvier et en
février 2023, la MINUSMA a effectué cinq missions de contrôle sur le terrain dans
les villes de Bourem (région de Gao), de Douentza (région de Douentza), de Goundam
(région de Tombouctou), de Kidal (région de Kidal) et de Ségou (région de Ségou).
Par ailleurs, 20 enquêtes sur des violations graves du droit international des droits de
l’homme et du droit international humanitaire concernant l’ensemble du pays sont
actuellement menées à distance : 2 dans la région de Tombouctou, 11 dans le centre,
1 dans la région de Ménaka, 2 dans la région de Kidal et 4 dans la région de Gao.
49. La MINUSMA a recensé et confirmé 224 violations (39) des droits humains et
atteintes (185) à ces droits : 95 personnes ont été tuées [82 hommes, 5 femmes et
8 enfants (7 garçons et 1 fille)] et 87 blessées [38 hommes, 19 femmes et 30 enfants
(15 garçons et 15 filles)] et 42 hommes ont été victimes d’enlèvement ou de
disparition forcée. Les groupes extrémistes violents sont les principaux auteurs
d’actes de violence commis contre des civils, 170 cas d’atteintes dont ont été victimes
116 hommes, 21 femmes et 33 enfants (18 garçons et 15 filles) leur étant attribuables.
Il a été établi que des violations du droit international humanitaire et du droit
international des droits de l’homme ont été commises lors d’opérations militaires
menées par les Forces armées maliennes, notamment lors d’opérations auxquelles du
personnel de sécurité étranger et des dozos (chasseurs traditionnels) avaient pris part.
Cinquante-cinq cas d’arrestation et de détention arbitraires lors d’opérations
militaires ont été enregistrés.

Violences sexuelles liées au conflit
50. Dans le Système de gestion de l’information sur la violence de genre, 230 faits
de violence sexuelle ont été enregistrés. La MINUSMA a continué de travailler avec
le Haut Conseil islamique du Mali et a notamment facilité l’organisation d’un atelier
national sur les violences sexuelles liées au conflit auquel ont participé 51 chefs
religieux, dont quatre femmes, et qui a abouti à l’adoption et à la validation, le
28 janvier, d’une fatwa (droit islamique) interdisant les violences sexuelles liées au
conflit. Cette fatwa contribue à la prise en main par le pays de la prévention des
violences sexuelles liées au conflit et de la lutte contre de telles violences. Par ailleurs,
du 7 au 9 février, la MINUSMA a facilité l’organisation d’une formation sur la
protection contre les violences sexuelles liées au conflit à l’intention de 267 chefs de
file de la société civile dans la région de Kidal.

Les enfants et les conflits armés
51. L’Organisation des Nations Unies a constaté que le nombre de violations graves
(264) commises contre des enfants avait augmenté par rapport à la période précédente
(215) et que 134 enfants avaient été directement touchés. Ces violations comprenaient
le recrutement et l’utilisation (135, contre 68 pendant la période précédente), le
meurtre ou les atteintes à l’intégrité physique (61), les violences sexuelles (4), les
enlèvements (19), les attaques contre les écoles et les hôpitaux (31, contre 5 pendant
la période précédente) et le refus d’accès humanitaire (14). Parmi les 135 enfants
recrutés, 67 ont quitté les groupes armés pendant la période considérée, 15, dont trois
filles, ont été enlevés et recrutés de force et une fille a été enlevée à des fins sexuelles.
52. De janvier à mars, la MINUSMA et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance
(UNICEF) ont organisé des ateliers de renforcement des capacités à l’intention de
54 personnes référentes en matière de protection de l’enfance de la CMA et des deux
composantes de la Plateforme, dont trois femmes, dans les régions de Kidal et de Gao.
Les ateliers ont été suivis de réunions avec les groupes armés, de campagnes de
sensibilisation et de visites dans des camps de groupes armés visant à vérifier l’âge
des éléments de ces groupes.

V. Situation humanitarians
53. La persistance du conflit et des violences dirigées contre les civils a entraîné
une augmentation du nombre de personnes déplacées, passé de 350 000 en janvier
2022 à plus de 412 000 en décembre 2022. En outre, 175 000 autres personnes se sont
réfugiées dans les pays voisins.

54. En 2023, 8,8 millions de personnes auront besoin d’une aide humanitaire. Ce
chiffre a augmenté de 17 % par rapport à 2022 du fait des déplacements liés au conflit,
des chocs climatiques et de l’insécurité alimentaire. Au total, 5,1 millions d’enfants
(ce qui représente une augmentation de 59 %) ont besoin d’aide et 1,4 million (ce qui
représente une augmentation de 21 %) souffrent de malnutrition aiguë. Les
intervenants humanitaires ont demandé 751,4 millions de dollars pour venir en aide à
5,7 millions de personnes, mais l’accès humanitaire reste très difficile.


VI. Difficultés d’ordre opérationnel

55. La mise en œuvre du plan d’adaptation de la force s’est poursuivie. Le
développement d’infrastructures critiques a continué à Gao, à Mopti et à Tombouctou
afin de faciliter le déploiement de trois unités d’hélicoptères supplémentaires,
fournies par le Bangladesh, l’Inde et le Pakistan, ainsi qu’un deuxième aéronef-cargo
fourni par la Tunisie au deuxième trimestre de 2023.

56. Des difficultés persistent sur le plan logistique car, depuis juillet 2022, trois des
quatre compagnies de combat spécialisées dans l’accompagnement des convois ne
sont pas disponibles, ce qui met à rude épreuve les capacités de la force et absorbe
des ressources considérables au détriment d’autres tâches, notamment la protection
des civils. Il a donc fallu réduire la taille des convois et donné la priorité à
l’acheminement de carburant et de rations, ce qui a retardé considérablement le
transport d’autres conteneurs, freiné des projets d’ingénierie et pesé sur la
disponibilité des véhicules. Pour faire face à ce problème, la MINUSMA étudie la
possibilité d’utiliser un système de transport multimodal qui permettrait d’acheminer
les cargaisons en passant par des pays voisins. Elle a achevé la construction d’un
aérodrome à Kidal, réservé à la Mission et aux Forces armées maliennes, qui sera
opérationnel une fois que l’Agence nationale de l’aviation civile aura donné son
approbation.

57. Le 20 février, la Jordanie a fait savoir à l’Organisation des Nations Unies qu’elle
avait décidé de mettre fin immédiatement à sa contribution à la MINUSMA. En
conséquence, trois des quatre unités de l’équipe spéciale mobile (celles de la Jordanie,
de la Suède et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord) ne sont
plus opérationnelles. Une étude des capacités militaire sera réalisée sous la conduite
du Siège de l’Organisation des Nations Unies du 20 mars au 3 avril en vue de régler
cette question, entre autres.

Accès et liberté de circulation du personnel de la MINUSMA

58. La MINUSMA a recensé six restrictions aux déplacements terrestres imposées
par les Forces armées maliennes. Par exemple, le 14 janvier, les Forces armées
maliennes ont informé la MINUSMA que les déplacements terrestres au sud de la
ville d’Ansongo n’étaient pas autorisés car des opérations dirigées contre des groupes
extrémistes étaient en cours. Depuis, la MINUSMA n’a pas eu accès à ces secteurs.
Pour la même raison, dans le centre du pays, elle a dû reporter sine die une mission
d’établissement des faits à Kani Bonzon, dans le cercle de Bandiagara.
59. Au 1er mars, la MINUSMA avait demandé 1 231 autorisations de vol ; 297 ont
été refusées (soit 24,1 % des demandes) et la plupart de ces demandes (238)
concernaient des drones de renseignement, de surveillance et de reconnaissance. De
manière générale, les restrictions continuent de varier d’un secteur à l’autre. Au total,
245 autorisations de vol ont été refusées dans le secteur est, deux dans le secteur
centre et 50 dans le secteur ouest. Afin de garantir la sécurité des convois, la Mission
a utilisé d’autres moyens aériens, notamment des hélicoptères et des plateformes à
voilure fixe pilotée de renseignement, de surveillance et de reconnaissance le long
des routes de réapprovisionnement, notamment sur l’axe Gao-Kidal.
60. Le 18 janvier, le commandant de la force par intérim de la MINUSMA et le chef
d’état-major de l’armée de l’air malienne se sont rencontrés à Bamako afin
d’examiner la procédure relative aux vols de drones arrêtée le 15 novembre 2022.
Toutefois, aucun progrès n’a été fait en vue de la reprise des vols de renseignement,
de surveillance et de reconnaissance, bien que la Mission ait appliqué les mesures
convenues avec les autorités maliennes, notamment en ce qui concerne l’échange
d’informations. Le 15 février, la MINUSMA a envoyé une note verbale aux autorités
maliennes afin d’appeler leur attention sur cette situation et a demandé que le comité
technique se réunisse pour faire le point.
Communication externe

61. Dans le cadre des activités qu’elle mène pour lutter contre la désinformation et
la mésinformation, la MINUSMA a renforcé ses partenariats avec les médias locaux
et les organisations de la société civile en vue de faire mieux connaître ses activités.
De janvier à mars, elle a effectué des visites sur le terrain à Gao, Kidal et Tombouctou
afin de permettre aux blogueurs et aux personnes militant sur le Web de mieux rendre
compte des effets positifs de la Mission. Par ailleurs, Mikado, la Radio des Nations
Unies, a continué de diffuser son programme hebdomadaire intitulé « Le vrai du
faux », qui vise à lutter contre la désinformation sur les médias sociaux.
62. La MINUSMA a soutenu financièrement la caravane pour la paix et la diversité,
une initiative menée dans le cadre du festival Ségou’Art, qui a eu lieu du 30 janvier
au 5 février, en vue de promouvoir la paix en s’appuyant sur la richesse des
expressions culturelles maliennes. Le festival a donné l’occasion à la radio Mikado
d’organiser des réunions d’information sur le mandat et les activités de la
MINUSMA.

Sûreté et sécurité du personnel des Nations Unies
63. La MINUSMA a été la cible de neuf attaques, dont cinq ont eu lieu à
Tombouctou, deux à Mopti et deux à Gao. Lors de ces attaques, trois soldats de la
paix ont été tués et cinq autres blessés. Le nombre d’attaques contre la MINUSMA a
diminué par rapport à la période précédente, pendant laquelle 18 attaques, qui ont fait
38 blessés, avaient été signalées. Le groupe de travail de la MINUSMA sur la lutte
contre les engins explosifs improvisés a étendu le champ d’application de la méthode
de raisonnement tactique de la Mission à la composante Police, à la composante civile
et aux intervenants humanitaires. Une surveillance hostile au moyen de drones non
identifiés survolant les camps de la MINUSMA a continué. Entre le 16 et le 19 janvier,
quatre drones suspects ont survolé des camps de la MINUSMA : deux à Tombouctou
et deux à Goundam.
64. La Mission a régulièrement appliqué des mesures de gestion des risques de
sécurité et les infrastructures ont continué d’être renforcées dans les camps géants
afin de réduire le risque de tirs indirects. Des activités ont également été menées afin
de pallier les lacunes en matière d’évacuation sanitaire primaire. Par exemple, une
formation a été dispensée à 29 policiers hors unités constituées et à des membres de
huit unités de police constituée dans toutes les régions.
65. Le Groupe des commissions d’enquête a établi cinq comptes rendus d’incident,
dont un concernait des tirs directs dans une attaque qui a fait un mort et trois blessés
graves parmi les soldats de la paix, un autre des tirs et un troisième des blessures
graves lors d’un accident du travail. Un des deux autres comptes rendus portait sur
un indicent de tir qui a entraîné la mort d’un soldat de la paix. Le 1er février, une
commission d’enquête s’est réunie pour examiner les circonstances de l’attaque
menée le 16 décembre 2022 contre une patrouille d’une unité de police constituée lors
de laquelle deux Casques bleus nigérians ont été tués et quatre autre grièvement
blessés. La composante Police de la MINUSMA s’emploie à faciliter les enquêtes
maliennes afin que les auteurs soient traduits en justice. Après que la Commission
d’enquête du Siège de l’Organisation a achevé ses travaux sur les multiples attaques
à l’engin explosif improvisé menées contre le bataillon de combat égyptien spécialisé
dans l’accompagnement des convois, un groupe de travail a été créé en vue de mettre
en œuvre les recommandations.


66. Le 24 janvier, la Cour d’assises de Bamako a condamné une personne pour une
attaque perpétrée le 22 février 2019 sur la route menant à Siby, contre des soldats de
la paix lors de laquelle cinq Casques bleus ont été tués et deux autres blessés.
L’attaque a également fait une victime civile. La peine capitale a été prononcée contre
l’accusé. Il est à noter qu’aucune peine de mort n’a été exécutée au Mali depuis quatre
décennies en raison d’un moratoire de fait.
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