Difficile pour le panier de la ménagère et surtout pour le pouvoir d’achat des chefs de famille, mais voilà. Pour ce mois de ramadan, le prix plafond de recharge de la bombonne de gaz de 6 kg est à 8090 FCFA, au lieu de 6440 FCFA en février. Cette situation découle de la non-subvention de l’Etat accordée sur la vente du gaz butane suivant l’arrêté n°2023-0277/MEF-SG du 20 mars 2023. Or, l’un des facteurs pour sauver le domaine forestier du Mali repose sur la consommation du gaz. Hélas, faute de gagner ce pari, chacun est devenu exploitant de charbon ou vendeur de bois, en violation de toute législation. Malheureusement, ces pratiques se font au vu et au su des plus hautes autorités.
Ce faisant, faut-il le rappeler, le monde vit sa survie. Outre les maladies épidémiologiques et pandémiques, l’humanité fait face à un grand fléau naturel dénommé les effets du changement climatique, mettant en péril les espèces animales et végétales. Aujourd’hui, c’est dommage de constater que le principal ennemi de la nature n’est autre que l’Homme qui l’exploite abusivement. Pourtant, l’Homme et la nature sont indissociables.
De ce lien, la préservation de l’environnement incombe à l’Homme. Hélas, ce gardien semble abandonner son devoir à des endroits de la planète. Pire, au-delà de la pauvreté, les humains n’hésitent pas une seconde à couper tout sur leur passage. De nos jours, on coupe abusivement le bois. Chacun est devenu exploitant de charbon, ou vendeur de bois, en violation de toute législation. Malheureusement, ces pratiques se font au vu et au su des plus hautes autorités. Dans ce désordre infernal, le prix du charbon a connu une flambée exponentielle. Le sac qui était cédé dans les campagnes à moins de 1000 FCFA a grimpé jusqu’à 3000 ou plus. Ce qui fait que dans la capitale Bamako, le prix du sac de charbon varie selon les quartiers et les marchés. Il varie entre 4000 et 6000 FCFA. Pendant ce temps, la déforestation gagne du terrain et la sécheresse se propage. Que dire des feux de brousse criminels ? Conséquences : de plus en plus le bois se fait rare et le charbon devient cher. Malgré tout, les marchés et les abords des localités traversées par des autoroutes sont pris d’assaut par des stocks de charbons et de bois. Sur les voies publiques, ce sont des camions et minicars surchargés de bois et de charbons qui perturbent souvent la circulation et occasionnent d’accidents de la route. Il est important de souligner que l’exploitation abusive de la forêt se situe à plusieurs niveaux, comme l’avait déjà soutenu l’actuel directeur général adjoint des eaux et forêts, colonel-major Abdoulaye Tamboura, alors qu’il assumait les fonctions de chef de bureau services généraux. De son explication, il faut d’abord souligner le volet de surveillance.
Le mea culpa des soldats de la nature
Sur ce point, il faut reconnaitre l’insuffisance de l’effectif des agents par rapport à la superficie. Ce qui fait que les agents n’atteignent pas là où ils doivent aller normalement et surtout dans un contexte d’insécurité que le pays vit. C’est pourquoi, on remarque des postes sur le goudron. Normalement, un poste forestier est l’équivalent d’un arrondissement ou de deux communes. Il faut 3 éléments dont un technicien et deux agents techniques. Mais il est très fréquent de voir un seul agent pour deux ou trois arrondissements. Il y a aussi un problème de moyens roulants, les motos par exemple. Pour qu’un agent puisse parcourir toute sa zone, il lui faut forcément un moyen de déplacement. L’autre facteur lié à l’économie est que le commun des gens pense que la forêt est un don de Dieu. De cela, beaucoup de personnes pensent que le remède de leur pauvreté est de s’abattre sur la forêt pour avoir de quoi vivre. Cela, surtout en milieu rural, lorsqu’il n’y a pas de récolte et autres activités génératrices de revenus, on coupe le bois pour venir chercher à manger. Malheureusement de l’autre côté, il y a l’effet néfaste des changements climatiques qui se caractérise par la sécheresse, le manque de pluie. Comme conséquence, on ne trouve que des brindilles dans les marchés. Or, selon l’officier supérieur des eaux et forêts, les normes veulent que le diamètre de l’arbre atteigne au moins 10 cm pour qu’il soit coupé. Cela veut dire que les arbres n’ont plus le temps de grandir. S’y ajoute un nouveau phénomène criminel très dangereux qui prend de l’ampleur. C’est le gain rapide et facile. C’est dans ce cadre qu’est apparu le terme de prime l’exploitation de bois communément appelé en langue bambara « Tou tiguè sara » ou prime de la coupure de bois, payée aux élus et responsables locaux. Or, il n’y a aucun texte au Mali qui institue cette prime. Pire, l’exploitation de bois serve à faire des meubles. Cela est aggravé surtout par l’exportation de ces bois vers l’extérieur, comme l’Asie. Or, ces pays ont plus de forêts que nous, mais ils préfèrent sauvegarder leur environnement.
Pour 1 kg de charbon, il faut au moins 7 kg de bois
Autre fait, compte tenu de la démographie des villes, c’est la préférence pour les femmes de préparer avec le charbon. A ce niveau, il faut admettre que la hausse du prix du gaz favorise cette ruée sur le charbon de bois. Or, le charbon est un grand danger pour la nature. En effet, pour faire un 1 kg de charbon, il faut au moins 7 kg de bois. Pourtant, plus de 90% des Maliens utilisent le bois ou le charbon. Tous ces facteurs sont aggravés par l’utilisation du bois par les boulangers.
En somme, le reboisement reste la solution durable. Les forêts de la Faya et du Mont Mandingue ont toutes été plantées. Mais, ces grandes plantations sont dans des états de dégradation très poussés à cause de l’exploitation abusive. Pour renverser la tendance, il faut nécessairement promouvoir la reconversion des mentalités pour aller vers de nouveaux comportements. Pour cela, il faut davantage inculquer la culture des foyers améliorés, qui permettent de réduire considérablement la consommation de charbon. Des efforts sont faits dans cette dynamique. La politique de couverture végétale très précieuse qui a été adoptée devrait permettre d’amoindrir les effets néfastes du changement. Malgré tout, le charbon est de plus en plus produit.
En tout cas, si rien n’est rigoureusement entrepris, dans quelques décennies le désert aura totalement raison de notre environnement. En ce moment, il serait trop tard.
Jean Goïta