Le gouvernement malien va-t-il prendre des mesures pour démasquer la machine à piller du Coordinateur du PRRE (Projet de Reconstruction et de Relance Économique), Oumarou Camara et du Directeur général de l’Agence d’Exécution des Travaux d’Infrastructures et d’Équipements Ruraux (AGETIER), Zana Coulibaly? En tout cas, le jeu en vaut la chandelle, rien que de par les pratiques d’outre-tombe qui ont cours dans le service des responsables de ces deux structures stratégiques dans le développement rural au Mali.
Depuis l’arrivée du Coordinateur Oumarou Camara au PRRE et du DG Zana Coulibaly à l’AGETIER, la mauvaise gestion des fonds et bien d’autres phénomènes jugés diffus sont devenus courants au niveau de ces deux structures.
Fraude à tous les niveaux
Au titre de l’impact de l’indiscipline budgétaire dans la gestion des Conventions sur les performances de l’AGETIER, avec de nombreux transferts entre conventions, l’Agence ne perçoit pas les intérêts créditeurs sur ses comptes alors qu’elle a négocié leur rémunération avec les banques. Plus grave, des transferts et des paiements irréguliers sont reçus et exécutés par l’AGETIER au profit de certains maîtres d’ouvrage à titre d’honoraires. Dans certains cas, les pièces justificatives ne sont pas fournies.
Décidemment, le DG de l’AGETIER, Zana Coulibaly, est sur une pente raide pour son implication dans les réalisations d’ouvrages du PRRE. C’est du moins ce que révèle le rapport d’enquête du Vérificateur sur la gestion du PRRE qui a occasionné des irrégularités financières de 749,6 millions FCFA (749 612 155F) pendant les périodes 2018, 2019 et 2020.
Comme mentionné dans le document, le Directeur Général de l’AGETIER, Zana Coulibaly, a irrégulièrement payé le marché de construction du pont de la localité de Kaneye. Pour s’assurer que les travaux de construction de l’ouvrage de franchissement de Kaneye ont été totalement achevés et que la réception définitive a eu lieu, l’équipe de vérification a examiné les dossiers dudit marché. Elle s’est également entretenue avec le Chef de projet de l’AGETIER, le Spécialiste en Passation de Marchés et le Spécialiste en Gestion Financière de l’Unité de Coordination du PRRE.
Du coup, les enquêteurs ont constaté que le Directeur Général de l’AGETIER, Zana Coulibaly, a procédé au paiement intégral du contrat n°T1-IVP2-280-03-29/2014 relatif aux travaux de construction du pont (ouvrage) de Kaneye d’un montant de 24,5 millions FCFA (24 597 500F), bien que ledit ouvrage se soit écroulé durant le délai de garantie. En effet, la réception provisoire du pont de Kaneye objet dudit contrat a eu lieu le 7 août 2018 et il s’est effondré le 1er mars 2019 avant l’expiration du délai de garantie des travaux soit environ sept (7) mois. Ainsi, par lettre n°007 du 2 mars 2019, le Maire de la Commune Rurale de Kaneye a informé le Coordinateur Oumarou Camara de l’UCP- PRRE pour lui faire part de l’effondrement du pont.
À son tour, le Coordinateur de l’Unité de Coordination dudit Projet a saisi le dirlo de l’AGETIER, Zana Coulibaly par e-mail en date du 5 mars 2019 pour l’informer de l’effondrement du pont de Kaneye et solliciter par la même occasion les mesures urgentes qu’il compte prendre pour y remédier.
Auparavant, par e-mail du 7 février 2019, le Coordinateur Oumarou du PRRE avait informé la Direction de l’AGETIER des plaintes faites par les autorités communales sur la qualité de certaines infrastructures routières réalisées sous la maîtrise d’ouvrage de l’AGETIER dans la région de Tombouctou et spécifiquement, les travaux de construction de l’ouvrage de franchissement de Kaneye sur le marigot de Bourem.
En réponse à la correspondance du Coordinateur du PRRE, l’AGETIER par e-mail en date du 11 février 2019 émanant de son Directeur Technique a assuré que toutes les dispositions seront prises pour réparer les dégradations survenues.
Nonobstant l’engagement formel pris par l’AGETIER à travers son Directeur technique, aucune disposition n’a été prise pour prendre en charge les plaintes formulées par le Maire de la Commune de Kaneye alors que les clauses contractuelles du marché, stipulent que l’entrepreneur est tenu, durant le délai de garantie, à une obligation dite ‘’obligation de parfait achèvement‘’ au titre de laquelle il doit remédier à tous les désordres signalés par l’autorité contractante ou le bureau d’étude et de contrôle, de telle sorte que l’ouvrage soit conforme à l’état où il était lors de la réception provisoire.
En outre, le Bureau d’études Techniques et de Gestion de Projets (BGET) chargé de l’étude et du contrôle des travaux, objet dudit marché, n’a fait aucune diligence pour signaler les défaillances sur l’ouvrage. Il a également procédé à la validation des trois décomptes relatifs au paiement des 80 564 275 FCFA. De plus, il a participé à la réception technique des travaux, le 16 juillet 2018 à Kaneye.
Par ailleurs, la retenue de garantie d’un montant de 4,2 millions FCFA (4 240 225F) a été payée par le Directeur de l’AGETIER à l’entreprise. Aussi, l’AGETIER n’a entrepris aucune action pour mobiliser la caution de retenue de garantie fournie par l’entreprise. Le montant total compromis s’élève à 24 597 500 FCFA.
Plus grave encore, indique le rapport du Vérificateur, le DG de l’AGETIER, Zana Coulibaly, a irrégulièrement payé un bureau de contrôle qui n’a pas rempli ses obligations contractuelles.
Ainsi, il ressort des vérifications que le Bureau d’études Techniques et de Gestion de Projets (BGET), chargé des études et du contrôle des travaux de construction du pont de Kaneye n’a pas exécuté correctement ses obligations contractuelles relatives au contrôle et à la surveillance des travaux. Pire, ledit bureau n’a signalé dans aucun de ses rapports une situation de non ou mauvaise exécution des travaux pouvant compromettre la solidité de l’ouvrage. De plus, il a approuvé l’ensemble des décomptes de paiement de l’entreprise chargée des travaux ; a établi et signé les documents de réceptions techniques et provisoires des travaux de construction du pont de Kaneye.
Aussi, il résulte du procès-verbal de réception technique établi le 16 juillet 2018 par le Bureau d’études Techniques et de Gestion de Projets, notamment après une visite contradictoire des tâches exécutées par l’entreprise, et des vérifications techniques nécessaires que la commission (composée des représentants du bureau de contrôle et de l’entreprise) a procédé à la réception technique sans réserve des travaux.
Également, il apparaît dans le procès-verbal de réception provisoire établi le 7 août 2018 et signé par les représentants du PRRE ; de l’AGETIER ; du bureau de contrôle BGET ; de l’entreprise et du Maire de Kaneye que l’AGETIER en sa qualité de Maître d’Ouvrage Délégué a approuvé, sans réserve , le document attestant la bonne exécution des travaux du pont 22 de Kaneye alors que l’ouvrage comportait des malfaçons, et il a cédé le 1er mars 2019 (voir la photo d’illustration) avant l’expiration de la période de garantie, soit sept (07) mois après sa réception provisoire. Le montant total payé par le Directeur Général de l’AGETIER, Zana Coulibaly, au bureau de contrôle BGET pour ses prestations alors qu’il n’a pas accompli ses obligations contractuelles relatives au contrôle et à la surveillance des travaux s’élève à plus de 23 millions FCFA (23 437 000F).
Autant de pratiques mafieuses qui font perdre à l’AGETIER plusieurs centaines de millions de francs CFA. À en croire une source, avec l’application incorrecte des pénalités de retard des périodes 2018, 2019 et 2020, l’AGETIER aurait subi une perte sèche d’environ 800 millions de francs CFA représentant des montants payés contre cautionnements non remboursés et non recouvrés.
En attendant, le Coordinateur du PRRE, Omarou Camara et le DG de l’AGETIER, Zana Coulibaly, sont en taule position. Ils défilent au Pôle Économique et Financier.