Ancien footballeur professionnel désormais consultant, Cédric Kanté a fait les belles heures du Racing Club de Strasbourg. Également passé par la sélection du Mali, il a vu évoluer le football malien et en a connu les arcanes comme joueur, puis membre de l’encadrement. Invité du podcast de Sport News Africa, il est revenu sur la situation actuelle du football malien, non sans déplorer la gestion au sein de la Fédération malienne de football. Extraits.
Les regrets de ne pas avoir gagné une CAN malgré une très bonne génération
Cédric Kanté : « Intrinsèquement on avait de bons joueurs. Au moins 4 ou 5 joueurs niveau Ligue des champions avec Seydou Keïta, Momo Sissoko, Mahamadou Diarra et les autres. Je pense qu’on pouvait le faire. Sur les éliminatoires on faisait de supers matchs, mais en compétition je pense qu’on manquait de structure autour de l’équipe. C’est un petit regret, même si en 2012 on fait une belle campagne avec Seydou (Keita, ndlr). Quand on avait tous ces joueurs-là, on aurait dû faire plus. »
Son regard sur la génération actuelle des Aigles
Cédric Kanté : « En terme de jeu, il y a plus de satisfaction. Mais en terme de résultat, ça manque encore de maturité. Ça joue bien mais sans plus. On a des garçons bien élevés et des fois c’est un peu lisse. On a les défauts de nos qualités. On a aussi des joueurs qui sont ensemble depuis les équipes jeunes, c’est une bonne chose car il y a de la continuité. Mais dans le même temps ça manque de sang neuf. Ça n’aide pas à se surpasser, à gérer la concurrence. En terme de qualité pour rivaliser avec les grosses équipes, il nous manque 2-3 joueurs à certains postes clés. »
Les fausses promesses de la Fédération malienne et du ministère des Sports
Cédric Kanté : « On sait qu’avec la situation politique et les sanctions internationales, la situation économique est compliquée. Mais il faudrait aussi qu’il y ait un discours de vérité au lieu de nous faire rêver. Je suis allé pour une mission pour être team manager. J’avais plein d’ambition, je faisais des rapports, je voulais aller sur place pour y travailler, mais la fédération n’avait pas d’argent pour me payer un billet d’avion. J’aurais aimé le savoir dès le début plutôt que de perdre six mois en allant 4 fois à Bamako en pensant qu’on allait construire quelque chose (…) Dès le lendemain de l’élimination à la CAN, le président Bavieux nous contacte Frédéric Kanouté et moi. On a des échanges tous les deux jours, des visioconférences. Ensuite il y a le barrage au Mondial contre la Tunisie où on se fait éliminer, mais derrière on a la volonté de s’investir. Team manager, pour moi c’est un travail à temps plein. Il y a un tel potentiel entre le binationaux et les joueurs actuels… Et du jour au lendemain tu n’as plus de nouvelles. Quand la situation politique sera apaisée, on verra ce qu’il est possible de faire pour revenir aider, mais moins naïvement. »
Cédric Kanté : « On sait qu’au début on n’aura pas un contrat en bonne et due forme. Mais on l’accepte, c’est pour le pays. Même le sélectionneur, on ne sait pas combien de mois il a attendu après son arrivée avant de signer son contrat. Après les deux matchs contre la Tunisie, on nous fait comprendre très vite que ce ne sera pas possible de nous faire venir au Mali pour travailler et qu’en gros le document qu’on nous avait soumis il ne vaut rien. A ce moment-là j’ai demandé à avoir une proposition de collaboration écrite et non pas message vocal sur WhatsApp. Et bien sûr elle n’est jamais arrivée. C’est décevant. On n’est pas encore aux portes de la professionnalisation du football malien. »
La relation entre anciens internationaux et la Femafoot
Cédric Kanté : « Les dirigeants savent où nous trouver (les anciens internationaux, ndlr) quand ils ont besoin de nous. Mais quand il faut par exemple choisir un nouveau sélectionneur et un nouveau staff, on a été mis de côté. Silence radio. Le football malien est très compliqué à comprendre. »
Le choix de Winfried Schäfer comme sélectionneur et le revirement
Cédric Kanté : « Après la fameuse fiche de poste ‘guardiolesque’, ils ont eu énormément de candidatures. A l’époque j’étais conseiller du président de la Femafoot. Du jour où la fiche de poste est sortie jusqu’à la nomination du sélectionneur, il était injoignable alors que c’était quand même un moment important. J’avais fait un rapport dans lequel je préconisais la nomination d’un coach jeune, en phase avec le football actuel et les profils de nos joueurs. Finalement on m’annonce que ce sera Winfried Schäfer. Ils ont fait tout l’inverse de ce qui a été préconisé. Et au final ils changent encore de décision en moins de 24 heures pour annoncer un autre sélectionneur. Tu te demandes : où est le sérieux ? »
Le Mali vainqueur de la CAN ?
Cédric Kanté : « Gagner la CAN ? Vu le niveau des équipes actuellement qui monte, on ne peut pas espérer gagner en bricolant. Après on n’est pas à l’abri d’une surprise ce ne sera pas facile. Le niveau est très élevé et il faudrait aux tous les feux soient au vert. »
Une nouvelle collaboration à l’avenir avec la Femafoot ?
Cédric Kanté : « Je ne peux pas fermer la porte. Le Mali c’est mon pays, c’est mon équipe. Mais est-ce que ma vision des choses est compatible avec celle des gens en place ? C’est plutôt ça la question. On part de très très loin sur les gens qui décident. Il y a un décalage entre les discours et les faits.