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Doit-on sacrifier la démocratie au profit de la soldatesque ?
Publié le dimanche 13 aout 2023  |  Le Wagadu
Moussa
© AFP par FRANCOIS ROJON
Moussa Traoré
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Je vois, avec beaucoup de sidération, les masses remplir des stades de 10, 20, 30 et même 60.000 places pour ovationner les auteurs de coups d’Etat dans les pays du Sahel. Le coup d’envoi a été donné par le Mali à la faveur d’une collision entre les auteurs du double putsch en août 2020 et mai 2021 et les forces dites du changement. Une idéologie de l’apocalypse a été conçue et savamment éprouvée et mise en œuvre avec le mot d’ordre de mobilisation : le rejet de l’ancienne puissance coloniale et de sa politique néocoloniale.

À partir de ce moment, une véritable politique de terre brûlée a été mise en œuvre pour embobiner les masses. C’était de bonne guerre, car malheureusement, la France a eu un président jeune et arrogant dont le message est, sans concessions, celui de la répudiation de toute responsabilité de la France dans le sort de l’Afrique francophone et du rejet de l’échec sur les Africains eux-mêmes.

Cette posture de la France a réduit l’admiration, la crainte et le respect jadis portés à cette grande Nation. L’âge de son président et son statut marital aussi jurent également avec l’idée que les Africains se font du chef. La défiance engagée au Mali vis-à-vis de la France a déstabilisé la politique africaine de ce pays au point de lui faire perdre pied.

L’objet de ce texte n’est pas de conseiller à la France la meilleure posture pour sauver les meubles. La France est suffisamment stratège pour trouver la parade et stopper sa descente aux enfers.

Revenant à nos putschistes, je sais qu’ils sont impliqués dans et responsables, avec les civils, de la gouvernance calamiteuse qu’ils finissent par dénoncer quand ils commettent leur forfaiture. Dans la vie publique, ils sont associés à l’évaluation et aux prises de décisions concernant les affaires militaires à travers leur participation aux Conseils nationaux de Défense ou de Sécurité. Les stratégies de Défense et de Sécurité sont conçues dans les états-majors avant d’être approuvées par les politiques.

Les armées définissent leurs priorités et expriment leurs besoins en ressources humaines et en équipements. Les moyens financiers dégagés sont mis à la disposition des états-majors pour l’acquisition des moyens sur la base des priorités qu’ils définissent eux-mêmes.

Les États-majors sont plus qualifiés que les autorités civiles pour apprécier la qualité des ressources humaines et des équipements acquis. Ils ont des voies de recours pour dénoncer le déficit de qualité des équipements au sein du Conseil national de Défense. Sur le champ de bataille, ils sont mieux à même de définir les stratégies et tactiques nécessaires pour sortir victorieux. Le politique se limite à définir l’objectif á atteindre.

Dans la vie civile, la tenue est crainte et respectée dans toutes les structures publiques comme privées. Les hommes en tenue le savent d’ailleurs. Qu’ils soient militaires, gendarmes, policiers, douaniers, agents des eaux et forêts ou autres, ils aiment à se présenter en tenue, sachant qu’ils auront droit à la préséance et au traitement de faveur.

Le Mali a la spécificité d’avoir institutionnalisé un poste de Haut officier militaire dans le cabinet de chaque ministre dans le gouvernement. Les raisons officielles pour l’instauration d’une telle pratique sont d’assurer une meilleure coordination entre les affaires civiles et militaires.

Dans la pratique, elle a créé un véritable pôle d’influence au sein des cabinets ministériels entre les mains de l’officier désigné. Elle permet également au Département chargé de la Défense d’avoir un regard sur les autres politiques sectorielles tout en les influençant, le cas échéant.

Dès lors que peut reprocher la soldatesque à la gouvernance civile ?

Vous allez constater que ce sont les officiers qui sont à l’origine des putschs. Ce sont les mêmes officiers qui conçoivent la politique en matière de Défense et de Sécurité. Les moyens humains et financiers sont mis à leur disposition. Vous constaterez avec le cas du Mali que ce sont désormais tous les corps de Défense et de Sécurité qui se liguent contre l’autorité civile démocratiquement élue. Celle-ci n’a plus d’autres voies de recours.

Vous allez également constater que ce sont ceux à qui les autorités civiles confient leur propre sécurité (forces spéciales, garde républicaine…) qui sont à l’origine des complots contre la même autorité.

Les conséquences sont terribles

Aucun pays n’est plus à l’abri de la trahison de ses hommes en tenue, mêmes pas ceux des pays considérés comme les plus stables. Les hommes en tenue n’arrêteront plus tant qu’ils sont sûrs de réussir leur coup. La preuve est que cela fait tache d’huile ! Celui qui est dépositaire de la force létale légitime en abuse et en fait un usage illégal et illégitime. Cela devient la loi du plus fort, celle de la jungle quoi !

Qu’est-ce qui risque d’arriver dans le futur immédiat ?

Nous apprenons de la nature que les espèces développent une carapace pour se protéger contre les éléments (vent, soleil, eau…) et les hommes développent la résilience face à l’adversité.

Cela pourrait se traduire par les situations suivantes : 1-les politiques vont cesser d’engouffrer des milliards dans la campagne pour se faire élire. Ils feront alliance avec des chefs militaires pour organiser des putschs contre les putschistes. Le plus fort l’emportera pour quelque temps ; 2-si les politiques se font élire, quand même, ils vont faire appel à des milices pour protéger leur pouvoir ; 3- s’ils sont élus, les politiques feront appel à des forces extérieures, qu’elles soient des forces sous-régionales et des mercenaires. 4- Les élus feront appel à leur tribu ou communauté pour les protéger.

Ça en sera fini de l’Armée nationale, à moins que les élus ne la dissolvent pour en revoir le concept, le contenu et la philosophie et la moralité des hommes qui vont l’animer.

Sambou SISSOKO

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