Résolument engagé dans le combat pour que l’or du Mali brille pour les Maliens, le Front pour l’Emergence et le Renouveau du Mali (Fer- Mali) est ‘’né avec ses 32 dents’’. Car, depuis sa création, il multiplie les actes dans le sens de la valorisation de l’or au profit de l’économie nationale et des zones d’exploitation. Dans cette interview exclusive qu’il nous a accordée au siège du parti à la Cité Unicef, son président, Sory Ibrahim Touré, nous parle du parcours de Fer et des combats déjà gagnés.
Bonjour M. le président ! Si l’on vous demandait ce que devient Fer-Mali que vous avez créé depuis quelques années déjà, que diriez-vous ?
Je vous réponds que fer-Mali se porte à merveille. Les Maliens sont mieux placés pour l’apprécier, parce que c’est pour eux qu’il se bat. Fer-Mali a été créé essentiellement pour la conquête de la souveraineté économique. Car avec le potentiel du Mali en ressources humaines et en ressources minières, il n y’a aucune raison que notre pays ne puisse goutter à la prospérité. Donc fer-Mali se porte très bien par la grâce de Dieu et la volonté des Maliens.
Vous êtes, semble-t-il, engagé pour l’épanouissement de vos concitoyens à travers la valorisation de l’or du Mali. Selon une formule consacrée, vous menez le combat afin que l’or du Mali brille pour les Maliens. Quel bilan en tirez-vous aujourd’hui ?
Le premier combat de fer Maliens, c’était d’amener l’ensemble des Maliens, acteurs politiques et civils et autres, à être conscients du potentiel du Mali. C’est pourquoi nous disions que l’or du Mali ne brille pas pour les Maliens. Dieu merci, ce combat est presque gagné et la question de l’amélioration de la gouvernance de l’industrie extractive, c’est-à-dire l’exploitation des ressources minérales, n’est plus un sujet tabou. C’est sur toutes les lèvres aujourd’hui. Nous avons réussi à faire en sorte que la question de la transparence dans l’exploitation de nos ressources minérales soit au cœur du débat public. Cette prise de conscience est le premier résultat le plus important de fer Mali à capitaliser dans notre bilan.
Mais au-delà, nous avons amené le gouvernement à être plus regardant sur le mécanisme d’exploitation de nos ressources en renforçant le contrôle. C’est ce qui a fait passer la manne financière que l’Etat tire de l’exploitation de l’or qui est passée de 450 à plus de 750 milliards, de 2021 à 2022. Déjà avec 450 milliards en 2021, le gouvernement s’en glorifiait. Mais en 2022, grâce à la vigilance des citoyens à tous les niveaux grâce au lobbying et au plaidoyer pour un meilleur contrôle de la production et des taxes autour des ressources minières, nous sommes retrouvées aujourd’hui à plus 700 milliards.
Nous venons de décrocher notre première loi dans le lobbying, puisque nous avons été à l’origine de la loi sur contenu local. Le gouvernement l’a soumise au Cnt qui l’a votée. C’est une des rares fois au Mali qu’une organisation nationale porte un processus de lobbying qui aboutit au changement du cadre législatif, c’est-à-dire à l’adoption d’une loi.
La loi sur le contenu local est une réalité aujourd’hui. Nous sommes en train d’organiser un symposium par rapport à ce contenu local pour la 2è fois afin que les opérateurs maliens puissent s’organiser de sorte que l’ingénierie nationale en matière d’exploitation des ressources minière soit une réalité. Nous pensons que l’environnement a été bouleversé, les nationaux sont en train de prendre leur place et fer-Mali continuera à veiller ce que l’exploitation des ressources minières du Mali donne satisfaction à beaucoup plus de Maliens.
Les autorités de la transition prêtent-elles une oreille attentive à vos cris de cœur pour que l’exploitation de l’or du Mali se fasse dans les règles de l’art ?
Je dirais que oui, bien que cela ait été difficile par moment. Cependant, il est de notre devoir de reconnaître que les autorités de la transition ont toujours été réceptives à nos appels. Bien que le gouvernement ne fût pas initialement favorable à l’idée d’élaborer une loi sur le contenu local, nous avons réussi à instaurer un dialogue avec le Conseil national de transition, la première institution à répondre à notre sollicitation. 7 à 8 mois de collaboration ont abouti à l’élaboration de cette loi. Suite à cela, sous l’impulsion du président de la transition, Colonel Assimi Goïta, dont je salue aujourd’hui la pro-activité et la volonté de renforcer la souveraineté économique du Mali, le gouvernement a finalement adopté la loi sur le contenu local.
Bien sûr, d’autres acteurs œuvrent également dans le domaine de l’exploitation des ressources minières. Mais chaque fois que Fer Mali a pris position, le gouvernement a toujours été sensible à nos préoccupations.
Le secteur minier est généralement l’objet de scandales à cause de certaines pratiques. Y a-t-il de l’amélioration sur ce registre ?
Oui, des améliorations ont été observées tout au long de la chaîne. Il est indéniable qu’il y a deux ans, la situation était désastreuse. Bien qu’il reste encore beaucoup à accomplir, il est important de reconnaître les progrès réalisés, notamment en ce qui concerne le contrôle des impacts environnementaux. Des efforts considérables ont également été déployés pour lutter contre les exploitations illégales de nos ressources naturelles. Le ministère des Mines a mis en place une unité spéciale chargée de protéger notre environnement contre les agressions et de prévenir les exploitations illégales. De plus, des missions de contrôle sur le terrain sont régulièrement menées. Par conséquent, il est juste de dire que nos autorités sont plus vigilantes que jamais en ce qui concerne la gouvernance du secteur minier malien, comme en témoigne la récente révision du code minier et l’adoption de la loi sur le contenu local, une première en République du Mali. Ces mesures démontrent leur engagement pour une meilleure gestion du secteur.
Des exploitants seraient illégalement installés dans certaines régions aurifères. Pouvez-vous nous parler de cette situation et des actions éventuelles que vous avez initiées ?
En effet, il y a quelques années, le Mali a été confronté à une invasion d’opérateurs illégaux. Ces opérateurs, originaires de deux pays différents (un pays africain et un pays asiatique), se sont établis dans nos forêts et nos zones minières aurifères entre 2011 et 2019, causant des préjudices considérables. Cependant, à partir de 2018-2019, une nouvelle vague d’opérateurs, principalement asiatique, est apparue. Entre 2020 et fin 2021, plusieurs acteurs ont pris position contre ces pratiques. Il convient de les féliciter pour leurs efforts. Cependant, bien avant Fer Mali, nous avons constaté les ravages causés par ces opérateurs prédateurs sur notre environnement et notre économie. C’est pourquoi nous avons pris des mesures concrètes, telles que la mise en place de mécanismes de surveillance citoyenne avec la participation d’élus locaux, d’autorités coutumières et religieuses. Cette mobilisation nous a permis de porter la voix de ces populations qui étaient également victimes d’accaparement de leurs espaces de vie par des spéculateurs.
À partir de fin 2021, le gouvernement a pris des mesures fermes contre ces opérateurs illégaux, entraînant l’arrestation de nombreux d’entre eux et la saisie de matériel illégalement utilisé. Bien qu’il subsiste encore quelques poches de résistance, notamment entre les zones de Bougouni et Yanfolila, dans le cercle de Kéniéba, la pratique illégale a considérablement diminué par rapport au passé.
Même si le Mali produit de l’or en grande quantité, il n’y a aurait pas un seul kilogramme du précieux métal au trésor public. Quel commentaire avez-vous à ce sujet ?
C’est très dramatique et honteux et regrettable. Le Mali est naturellement et historiquement riche en or. Donc il est inacceptable que le pays de Kankou Moussa, toujours classé parmi les grands producteurs du métal jaune, ne possède aucun gramme dans le Trésor public. Fer Mali a toujours souhaité qu’une partie de la part du Mali en dividende soit payée en nature. Nous attendons toujours la réaction des autorités.
Quelle part l’or peut-il assurer dans le développement du Mali ?
C’est notre premier produit d’exportation qui représente 10% du Pib. En 2022, il a occupé presque la moitié du budget national avec 700 milliards pour le trésor public. En plus de cela, il y a le contenu local comme les prestations de service. Nous pouvons dire que l’or est la colonne vertébrale de notre économie. Ce n’est pas seulement une simple question pécuniaire, mais aussi de coutume, d’histoire et de gloire depuis l’empire de Ouagadou. L’exploitation de l’or doit booster l’économie du Mali car c’est un secteur qui impacte tous les autres avec plus d’opportunités d’emplois aux Maliens.
Quel est votre commentaire par rapport au problème de raffinerie d’or au Mali ?
Il s’agit d’une question de volonté et de conscience politiques. Nos autorités n’ont pas très tôt compris les enjeux du raffinage de l’or sur place. Il y a au Mali deux raffineries dont l’une appartenant à un Malien. Cette raffinerie dépasse les standards de beaucoup de raffineries internationales. Elle a la capacité de raffiner environ 30 tonnes d’or qui représentent 50% de nos productions industrielles. Mais à cause de l’orpaillage, beaucoup de quantités échappent au contrôle. S’il y avait une volonté politique, le gouvernement exigerait la raffinerie d’une partie de production sur place. Sans une raffinerie nationale et l’interdiction de l’exportation de l’or brut, nous ne pourrons jamais contrôler la quantité de production aurifère du Mali.
Quel message (appel, critiques et suggestions) transmettez-vous aux autorités de la transition fortement engagées aussi, comme on le sait, dans la reforme du secteur ?
Je leur demande la rigueur, d’agir sans complaisance pour que l’ensemble des acteurs soient conscientisés, mobilisés pour bien jouer leur rôle. L’Etat seul ne suffit pas, parce qu’on nous vole avec la complicité de certains compatriotes. Chacun doit connaitre l’impact de l’or sur l’économie du Mali pour s’engager à le défendre. Il faut l’implication de tous les acteurs, la transformation sur place pour créer des richesses et de la valeur ajoutée.
Entretien réalisé par Drissa Togola, Soundiè Koné et Fatoumata Djourté