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Fermeture de l’ambassade de la Norvège au Mali : Des organisations humanitaires norvégiennes regrettent un « abandon trop tôt »
Publié le jeudi 7 septembre 2023  |  Le wagadu
Cérémonie
© aBamako.com par A S
Cérémonie de décoration de Mm Alida Jay Boye.
Bamako, le 02 juillet 2013 au ministère de la sécurité. Le ministre de la sécurité, le grl Tiéfing Konaté a décoré la conseillère à l`ambassade de Norvège au Mali, Alida Jay Boye.
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À la faveur du retrait en cours de la Minusma devant prendre fin au plus tard le 31 décembre, conformément à la Résolution 2690 adoptée par le Conseil de sécurité, le 30 juin dernier, les autorités norvégiennes viennent d’annoncer à leur tour leur retrait du Mali. Même si elles reconnaissent l’existence d’un grand besoin de stabilisation, de résolution des conflits et de développement au Sahel.

Selon la cheffe de la diplomatie norvégienne, Anniken Huitfeldt, la présence de son pays au Mali se fera désormais différemment malgré les énormes défis qui restent à relever.


actualite
Ouverte depuis 2017, l’ambassade norvégienne à Bamako prévoit de refermer ses portes avant la fin de cette année. Bien que comprenant la difficulté de la situation, Morten Bøås, chercheur principal à l’institut norvégien des affaires internationales (Nupi), estime que c’est un « abandon trop tôt ».

L’occasion pour lui de rappeler que la Norvège a maintenu des contacts avec des organisations et des régimes de pays qui ont posé des problèmes dans le passé. Selon lui, les autorités de son pays sont un peu alarmistes sur la situation au Mali.

Il n’a pas manqué d’exprimer son incompréhension face à la stratégie quadriennale 2021-2025 que son pays vient d’adopter pour le Sahel, alors qu’il est en train de se retirer d’un pays central pour ce programme. Celui-ci, a ses yeux, sera difficile à mettre en œuvre.

À l’en croire, si son pays estime avoir des difficultés à travailler directement avec le Mali dans le cadre de l’exécution de ce programme, il fallait songer à d’autres alternatives comme mettre les fonds à la disposition d’acteurs multilatéraux comme la Banque mondiale ou le Programme alimentaire mondial (PAM). D’après lui, sans une présence, il sera difficile de mettre en œuvre ce programme.

Le chercheur du Nupi estime que les autorités norvégiennes abandonnent bien trop tôt. C’est ainsi qu’il a déclaré que « nous abandonnons maintenant quelque chose que nous ne pouvons vraiment pas nous permettre d’abandonner ». Il a indiqué que l’engagement au Sahel est aussi une question d’intérêt personnel.

« Si la situation devient complètement incontrôlable, elle affectera également l’Europe » a-t-il averti. Il a déploré le manque de « courage » de son pays qui n’est pas disposé « à prendre des risques pour résister à des situations exigeantes ». C’est très regrettable, dit Bøås.

Rappelons que lorsque le retrait de la force onusienne –Minusma- a été annoncé, plusieurs organisations norvégiennes travaillant dans la région du Sahel espéraient que la Norvège maintiendrait sa présence. Pour Morten Bøås, « c’est un triste jour que celui où la Norvège a choisi de retirer sa présence au Mali ».

Même son de cloche du côté de l’homme politique et ancien ministre Dagfinn Høybråten, actuellement cadre au Norwegian Church Aid, une organisation mondiale qui œuvre pour un monde plus juste. Ce dernier a souligné que même si l’ambassade est fermée, il est plus important que jamais que la Norvège maintienne son implication au Mali et dans le reste de la région du Sahel.

Les inquiétudes de l’organisation humanitaire CARE

Il s’est par ailleurs dit très préoccupé par le développement au Sahel et par le fait que la communauté internationale et divers acteurs réduisent, voire retirent leur soutien à l’aide d’urgence et au travail de développement, en raison de la situation politique et sécuritaire compliquée.

Pour lui, c’est précisément dans cette situation qu’il est important d’intensifier les efforts visant à aider la population à sortir de la pauvreté. D’après cet homme politique norvégien, « ce travail devrait se poursuivre sans relâche, même si l’ambassade est fermée pour le moment ».

L’organisation humanitaire Care dit regretter dans un communiqué la fermeture de l’ambassade et affirme avoir contribué positivement au travail de Care dans la région du Sahel. Elle estime que les pays du Sahel sont parmi les plus pauvres du monde et la région est caractérisée par une série de coups d’État militaires, une intensification des conflits et la crise climatique. En outre, les prix des denrées alimentaires ont augmenté en raison de la guerre contre l’Ukraine.

Le secrétaire général de Care, Kaj-Martin Georgsen, a déclaré que « nous encourageons les autorités norvégiennes à évaluer s’il serait possible d’avoir une présence dans d’autres parties du Sahel ». Quant au secrétaire général du Strømmestiftelsen (organisation norvégienne de développement bénévole), Erik Lunde, il s’est également dit profondément préoccupé par les signaux que la Norvège envoie actuellement en fermant son ambassade à Bamako.

« Cela fait seulement cinq ans que l’ambassade a été ouverte dans le cadre d’un engagement à long terme en faveur des États vulnérables et du Sahel. Dans ce cas, il serait à court terme de fermer l’ambassade maintenant dans une région devenue plus vulnérable ces dernières années », estime Lunde.

C’est ainsi qu’il a demandé au ministère des Affaires étrangères de reconsidérer sa décision soulignant que la population des pays du Sahel subit la terreur, que beaucoup sont déplacées à l’intérieur du pays et que la pauvreté est grande. Il révèle que les besoins d’aide pour sortir les gens de la pauvreté sont énormes.

Dans le même temps, des pays comme la Russie et la Chine sont devenus des alliés plus importants pour plusieurs pays, tandis que l’ancienne puissance coloniale, la France, s’est retirée ou a été éliminée. Lunde estime que la Norvège ne devrait pas se sentir obligée de suivre la France.

450 millions d’euros versés aux pays du Sahel

Il a exprimé sa crainte sur la réduction des efforts d’aide de la Norvège à la population du Sahel et que les conséquences en matière de politique de sécurité pour la Norvège soient également plus graves si ce retrait du Mali devient effectif.

C’est la raison pour laquelle il a demandé au ministère des Affaires étrangères de reconsidérer cette position. Il note que les pays de la région pourraient désormais avoir l’impression que la Norvège est plus soucieuse de suivre l’UE et la France que de mener une politique indépendante.

Il faut rappeler que la Norvège apporte une aide considérable aux pays du Sahel, qui s’est élevée en 2022 à un total de 745 millions euros dont 180 millions rien que pour le Mali. En outre, la Norvège fournit un soutien humanitaire considérable au Sahel. Du début de l’année à nos jours, environ 450 millions d’euros ont été versés comme aide humanitaire aux pays du Sahel.

Le ministère des Affaires étrangères norvégien a indiqué que la situation politique au Mali est préoccupante après deux coups d’État militaires en 2020 et 2021. Lorsque l’opération de l’ONU prendra fin, il sera plus difficile de maintenir des activités diplomatiques normales dans le pays, estime le ministère des Affaires étrangères. Grâce à des accréditations dites secondaires, l’ambassade de Bamako a représenté la Norvège au Burkina Faso, en Mauritanie, au Niger et au Tchad, ainsi qu’au Mali.

Le ministère des Affaires étrangères travaille actuellement sur des solutions pour sauvegarder la représentation diplomatique de la Norvège dans tous ces pays après la fermeture de l’ambassade à Bamako.

Pour la diplomatie norvégienne, la fermeture de l’ambassade ne signifie pas la fin de son engagement au Sahel. Il existe des besoins humanitaires majeurs au Sahel et la Norvège doit continuer à être un partenaire crédible à long terme pour la population civile du Mali et des autres pays du Sahel, déclare Huitfeldt, ministre des Affaires étrangères de Norvège. En tout cas, le débat reste très ouvert et il est clair que la communauté internationale dans son ensemble n’est pas favorable au maintien du Mali dans l’isolement.

Encore qu’il faudrait, pour ce faire, un engagement plus accru des autorités de la Transition. Lesquelles doivent prouver que, contrairement aux intentions qu’on leur prête, elles ne cherchent pas à se maintenir au pouvoir.



Cheick B. CISSÉ

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