A travers la Charte de Liptako-Gourma, le Mali, le Burkina Faso et le Niger, trois pays au destin lié par l’insécurité, ont institué, le samedi 16 septembre 2023, l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Une nouvelle alliance militaire qui a pour objectif de, non seulement, faire face au terrorisme existant dans l’espace commun, mais aussi et surtout faire bloc contre toute autre menace portant atteinte à l’intégrité du territoire et à la souveraineté de chacun des pays membres.
« Une architecture de défense collective et d’assistance mutuelle au bénéfice de nos populations », rappelle ce passage de la charte dans un Tweet, le président de la transition du Mali, le Col. Assimi Goïta, comme vision de cette nouvelle Alliance des États du Sahel (AES), instituée par le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
Après la dislocation de la force conjointe du G5-Sahel en 2022, suite au retrait, le 15 mai, du Mali, les pays du Sahel, plus particulièrement ceux partageant la zone rouge du Liptako-Gourma (la zone des trois frontières) décident de prendre leur destin en main. C’est à travers l’érection d’’un nouveau dispositif sécuritaire conjoint permettant désormais de faire face, sans apport extérieur, au terrorisme sous toutes ses formes dans la région ainsi que la criminalité transnationale organisée. En plus de cet objectif premier, les trois pays en transition, par cette initiative, comptent également faire front contre toute autre menace à la quiétude ou à la souveraineté des Etats qui forment l’Alliance, y compris, les mouvements armés et les rébellions. « Les Parties contractantes œuvreront en outre à la prévention, la gestion et au règlement de toute rébellion armée ou autre menace portant atteinte à l’intégrité du territoire et à la souveraineté de chacun des pays membres de l’Alliance », indique cette charte dans son article 5 tout en précisant qu’elle privilégierait bien évidemment les voies pacifiques et diplomatiques de sortie de crise, mais n’hésitera jamais à employer la force lorsque c’est nécessaire. Les parties œuvreront «… en privilégiant les voies pacifiques et diplomatiques et, en cas de nécessité, à user de la force pour faire face aux situations de rupture de la paix et de la stabilité », note toujours l’article 5 et le 6 d’ajouter que « toute atteinte à la souveraineté et à l’intégrité du territoire d’une ou plusieurs Parties contractantes sera considérée comme une agression contre les autres Parties et engagera un devoir d’assistance et de secours de toutes les Parties, de manière individuelle ou collective, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité au sein de l’espace couvert par l’Alliance ».
Par contre au niveau de l’article 8, les parties ont placé des garde-fous contre différends à l’interne. Elles ne doivent jamais : « recourir entre elles, à la menace, à l’emploi de la force ou à l’agression, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’une partie ; ne pas faire de blocus des ports, des routes, des côtes ou des infrastructures stratégiques d’une Partie par les forces armées ; ne pas à partir d’un territoire mis à la disposition par une Partie, perpétrer des attaques ou des agressions contre une autre partie ou des Etats tiers ; ne pas à partir du territoire d’une Partie permettre à des groupes armés, des forces armées irrégulières ou des mercenaires de perpétrer des attaques contre un pays du champ ».
Contrairement au G5-Sahel dont le financement était conditionné à une contribution extérieure, l’Alliance des États du Sahel (AES), est exclusivement fiancée par les Etats membres.
Aussi, niveau de l’article 11, on a laissé une fenêtre ouverte à l’élargissement. Cette alliance peut être ouverte à tout autre Etat partageant les mêmes réalités géographiques, politiques, socio-culturelles qui accepte les objectifs de l’Alliance, mais faudrait-il, précise-t-on que cette demande d’adhésion soit acceptée à l’unanimité des Etats Parties.
Il faut rappeler que l’initiative de l’AES survient dans un contexte où le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont respectivement dénoncé l’accord de coopération militaire avec la France après le renversement des gouvernements précédents jugés incapables d’apporter une solution efficace à la crise sécuritaire.
La communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’organisation sous régionale mère a même dressé une menace d’intervention militaire contre le Niger, dernier pays à vivre l’épisode de coup d’état. Mais immédiatement, le Mali et le Burkina Faso se sont engagés à défendre militairement leur voisin, le Niger en cas, d’agression de la Cédeao. Un front qui se renforce plus avec nouvelle charte.